De quoi ça parle ?
Après un désastre évité de justesse, un tueur se bat contre ses employeurs et lui-même, dans une mission punitive à travers le monde qui n'a soi-disant rien de personnel.
C'est avec qui ?
C'est l'un des films de grand réalisateur les plus attendus de la fin d'année sur Netflix : The Killer est le nouveau long-métrage de David Fincher. Pour incarner le Tueur de son thriller, qui avait fait évènement à la Mostra de Venise, le cinéaste a fait appel à Michael Fassbender (Hunger, Shame, Twelve Years A Slave).
Netflix
L'acteur germano-irlandais ne casse pas la baraque seul puisqu'il est entouré de Tilda Swinton, Charles Parnell (Top Gun : Maverick), Arliss Howard (Full Metal Jacket), Kerry O’Malley (Why Women Kill, Snowpiercer), Emiliano Pernía (Pickpockets), Sala Baker (Bullet Train, The Mandalorian), Sophie Charlotte (Dark Days) et Gabriel Polanco, pour qui il s'agit de son premier rôle.
Ça vaut le coup d’œil ?
Trois ans après Mank, David Fincher revient avec un nouveau long-métrage sur Netflix, partenaire privilégié du célèbre réalisateur qui a signé un contrat d’exclusivité avec la plateforme.
Douzième film du cinéaste, The Killer est un projet de longue date pour ce maître du thriller qui retrouve pour l'occasion le scénariste Andrew Kevin Walker, qui avait signé le scénario de Seven.
Ensemble, ils se sont emparés de la série de bandes dessinées Le Tueur des Français Alexis Nolent (Matz), au scénario, et Luc Jacamon, à l'illustration, pour en livrer une adaptation très attendue par les fans de David Fincher. Alors le cinéaste a-t-il opéré un retour réussi à ses premières amours ?
Thriller en six chapitres qui nous plonge dans la psyché d'un tueur à gages nihiliste, The Killer est un grand film de mise en scène. Dans l'attente comme dans l'action - le yo-yo quotidien d'une vie de tueur à gages - David Fincher soigne avec une précision chirurgicale les moindres faits et gestes de son anti-héros sans nom (et sans âme ?) incarné avec la froideur requise et la pugnacité cynique d'un Michael Fassbender en grande forme.
Netflix
Surveillant son rythme cardiaque tout en méditant sur le rythme du groupe The Smiths (dont les musiques accompagnent le film du début à la fin), ce Tueur a un code bien à lui en ce qui concerne ses contrats et se répète ses mantras à longueur de temps :
"Respecte le plan. Ne fais confiance à personne. Respecte le plan. Bannis l'empathie. Respecte le plan. Anticipe. N'improvise pas. Respecte le plan. Ne cède jamais le moindre avantage. Respecte le plan. Ne mène que le combat pour lequel on te paye", comme nous l'assène sa voix intérieure dans le teaser du film.
Cette morning routine du parfait tueur à gages, qui se la joue très premier degré dans le premier tiers du film, se veut froide, implacable et très robotique. Cette figure à l'ancienne se fait finalement balader au moment où tout échappe au contrôle du Tueur. Il rate pour la première fois sa cible et comprend qu'il devient un homme recherché.
Sauf qu'il ne l'entend pas de cette oreille et qu'il n'en a désormais plus "rien à f**tre". Le Tueur se lance alors dans une chasse à l'homme à travers le monde entier pour retrouver les responsables du contrat et les abattre.
The Killer bascule dans une sorte d'autocritique cynique à double tranchant puisque le Tueur répète à qui veut l'entendre que cela n'a rien de personnel.
Netflix
Et pourtant, tout est personnel car il s'en veut surtout à lui-même d'avoir raté son contrat et de constater un dysfonctionnement chez lui, mais aussi de voir que ses proches sont menacés, notamment sa femme Magdala (Sophie Charlotte). Plus qu'une libération à gagner, c'est aussi une manière de se retrouver lui-même que le Tueur cherche à atteindre.
Au fur et à mesure qu'il avance dans sa chasse à l'homme à niveaux à la manière d'une œuvre vidéoludique, qui le mènera à rencontrer le Client (Arliss Howard), l'Avocat (Charles Parnell), la Brute (Sala Baker) ou encore l'Experte (Tilda Swinton), le Tueur chasse également son humanité et en retrouve ce qui - dans sa conception singulière de la vie - s'en rapproche le plus.
Certes, l'intrigue de The Killer ne révolutionne pas totalement le genre du thriller (mais était-ce vraiment l'intention ?). Il lui redonne tout de même un certain coup de fouet et sonne comme une manière pour David Fincher de se tourner lui même en dérision à travers ce film.
Il joue avec sa figure du cinéaste carré, millimétré, cérébral et envoie tout balader pour nous offrir un spectacle ultra jouissif, aussi violent que drôle (tout en gardant un cadre strict, parce qu'après tout on ne se refait pas !).
Netflix
Car The Killer est avant tout un film immersif, qui se ressent par la voix-off du Tueur (insupportable au début pour nous fatiguer avec le personnage et puis plus entraînante ensuite pour accompagner l'action), par la musique très présente et par les bruits intenses des corps et du matériel du tueur à gages.
On vit et se questionne avec le personnage du Tueur, qui rejoint la longue liste des figures à la marge et à la morale douteuse faisant face au consumérisme et au mode de vie ultra-connecté omniprésent dans notre société de la filmographie de David Fincher.
L'intrigue de The Killer est parfois déroutante mais colle au développement du personnage, qui se prend des droites littéralement (la scène de combat avec la Brute est mémorable) et métaphoriquement (l'interaction délicieuse avec l'Experte) mais surtout les pieds dans le tapis en se détournant de ses convictions premières.
David Fincher opère donc un retour réussi au genre du thriller avec un grand film immersif qui pourrait en dérouter certains mais qui raconte un certain déraillement d'un homme et par extension d'une époque. Simple en surface, mais fait en grandes pompes avec une clarté nécessaire et efficace.
Le film The Killer de David Fincher est disponible sur Netflix.
