La sortie d'un film n'est pas toujours un long fleuve tranquille... Flo, à l'affiche depuis ce mercredi, a dû affronter quelques tempêtes avant de gagner les salles de cinéma.
Ce film consacré à la navigatrice Florence Arthaud, biopic librement inspiré et basé sur un livre de Yann Quéffelec, aurait même pu ne jamais sortir. La raison ? Le projet mis en scène par Géraldine Danon a suscité de vives réactions d'une partie de la famille de Florence Arthaud, qui a, de ce fait, saisi la justice.
Comme le relayait France Inter, en avril dernier, alors que le film s'apprêtait à faire sa première sur la plage du Festival de Cannes, la fille de Florence Arthaud a intenté un référé en justice, devant le tribunal judiciaire de Paris, pour obtenir une copie du scénario. Demande rejetée.
Dans son jugement, le tribunal estimait qu'"aucun des éléments produits" par Marie Arthaud-Lingois, la fille de la navigatrice, "ne permet de confirmer les craintes qu'elle exprime de voir exposer" la vie de sa mère "de manière dégradante de nature à porter atteinte à sa mémoire".
AlloCiné a rencontré la réalisatrice Géraldine Danon, en août dernier, à l'occasion de la présentation de Flo au Festival du film francophone d'Angoulême. Nous l'avions interrogée sur la procédure intentée contre le film. "On a gagné. De toute façon, pour moi, c'est une fausse polémique, puisque je pense que quand la famille verra le film, ils s'apercevront que je me suis attaché à raconter la lumière de Florence. Puisque, pour moi, elle est un être de lumière. Le film parle pour lui. Donc le reste, je ne sais pas de quoi on parle, en gros."
Le film n'a donc finalement ni été interdit, ni été retouché. Néanmoins, Géraldine Danon s'est vue contrainte d'y ajouter une mention dans le générique, sur la part fictionnelle du film. "Oui, j'ai été obligée de l'ajouter. Je raconte des choses vraies. Mais j'ai été obligée d'ajouter des mentions pour respecter la vie privée de chacun. C'est un souci de respecter la vie privée des personnes qui sont encore là. Il y a une liberté qui est prise dans le sens où je fais du cinéma, de la fiction et pas du documentaire. Donc je me sers d'images fortes pour raconter la vérité, en gros."
Flo : le film sur Florence Arthaud est-il bon ? Voici ce que pensent les premiers spectateursHubert Arthaud, frère de la navigatrice, n'a pas saisi la justice, mais a fait savoir, depuis, à plusieurs reprises, qu'il était très mécontent de ce projet. Ce dernier a d'ailleurs posté son avis sur le film dans la rubrique "notes spectateurs" de notre site. "Un biopic réalisé par Géraldine Danon qui en est à son premier film. Un film totalement déformé, dont les dialogues sont ridiculement transformés, et pauvres. La magie du personnage de Florence ne ressort absolument pas. Les images de bateau 30 % du film, le reste de la beuverie, ou du sexe. Un loupé total qui fera sans aucun doute un flop. Quel dommage qu'un beau sujet comme celui-ci n'ait pas été réalisé par Besson." Hubert Arthaud a probablement en tête Le Grand Bleu, film réalisé par Luc Besson, sur le plongeur apnéiste Jacques Mayol, et d'ailleurs récemment rediffusé sur Arte.
Charlotte Arthaud, nièce de Florence Arthaud, fille de Hubert Arthaud, a également posté un long texte dans notre rubrique de critiques spectateurs. "C’est un affront personnel et une déception que de voir l’héritage de ma tante ainsi caricaturé, tout comme il est insultant de voir mon père injustement attaqué. La mémoire de Florence, ainsi que la dignité de ma famille, méritent, bien plus que ce qui a été présenté à l’écran".
Son film est diffamatoire dès la première scène !
Hubert Arthaud a par ailleurs accordé, tout récemment, un entretien au magazine people Closer : "Je suis furieux. Nous n'aurions pas été contre si le film avait été un hommage à Florence. Ce film est soi-disant fait par des amis, mais ma sœur n'a jamais été amie avec Géraldine Danon ! Elle fait partie de ces groupies, de ces affairistes.... Son film est diffamatoire dès la première scène !"
Et d'ajouter : "Elle a préféré faire ressortir des côtés sombres du personnage, qui existaient, mais qui sont totalement déformés, voire inventés de toutes pièces. Comme cette scène de l'accident dans laquelle elle conduit en état d'ébriété. A l'époque, Florence faisait des études de médecine et elle ne buvait pas du tout. Danon fait croire que c'est elle qui a causé l'accident alors qu'en réalité, elle était assise à l'arrière de la voiture. Comme les ceintures n'étaient pas obligatoires à l'époque, elle a été éjectée par la vitre arrière, ce qui lui a causé un lourd traumatisme crânien".
Sur le site de France Inter, Géraldine Danon dément avoir dépeint Florence Arthaud comme une alcoolique. "Florence Arthaud n'a jamais été alcoolique et elle n'est pas alcoolique. Dans mon film, c'est bien clair !", dit-elle.
Parmi les reproches de Hubert Arthaud, il y a l'aspect privé de la vie de sa soeur : "Il y a beaucoup de scène de sexe. Pourquoi ? Certes, ma sœur était très belle et elle a eu des aventures, comme tous les humains. Mais pourquoi ne pas montrer d'autres aspects plus importants ?"
En interview, Géraldine Danon donne des explications sur cette envie de montrer l'amoureuse qu'était aussi Florence Arthaud. A notre micro, la réalisatrice dit qu'"elle aimait la bonne chère, elle aimait les hommes". Dans le dossier de presse, elle en dit davantage sur le fait de parler de ses différents partenaires : "Dans le film, je me suis attachée à montrer quelques-uns de ces hommes qui ont compté dans sa vie. Tout d’abord Jean-Claude Parisis, le premier à lui avoir fait découvrir la mer, avec qui elle a fait sa première traversée de l’Atlantique du « Petrouchka ». Ensuite, j’ai décidé de faire d’Olivier de Kersauson, (qui est pour moi un des voileux les plus charismatiques et poétiques), le marin des marins et de leur faire vivre une grande histoire d’amour… Cette phrase à la fin du film est là pour indiquer que nous respectons la vie privée de chacun. Olivier est un homme extrêmement pudique et il n’a pas pour habitude de s’exprimer sur sa vie sentimentale. Mais il est évidemment au courant de ce que nous avons fait…"
Cette phrase à la fin du film est là pour indiquer que nous respectons la vie privée de chacun
Toujours dans le dossier de presse, l'actrice Stéphane Caillard, qui prête ses traits à Florence Arthaud précise : "La relation avec Kersauson est traitée de manière assez fictionnelle mais elle permet de montrer le côté compétiteur de Florence Arthaud. Ça place leur rapport sur le principe du « tu ne cours jamais sur l’eau, de quoi as-tu peur ? » ou « je fais le même métier que toi » et ça nous permet, à travers le portrait d’une héroïne, de raconter ses combats..."
En avril dernier, France Inter donnait la parole à Géraldine Danon, afin de répondre aux différentes attaques dont elle était l'objet. "Dès le début, j'ai contacté Marie, que je connais depuis toute petite, pour lui parler d'un projet de film avec sa mère et au début, elle a semblé intéressée. Le film est une œuvre librement adaptée de la vie de Florence Arthaud, c'est inscrit en début de film, c'est un point de vue sur Florence que j'ai bien connue."
"Je l'ai rencontrée avant la route du Rhum 90", poursuit-elle, "et on est devenue très proches, c'est une amitié qui a passé les années, on s'est toujours retrouvées dans toutes les étapes de nos vies jusqu'à la veille de son décès, où j'ai reçu un texto d'elle d'Ushuaïa où elle me dit qu'elle va aller acheter une améthyste dans un magasin, pour moi !"
Connue comme "la petite fiancée de l’Atlantique", Flo raconte le destin d’une femme farouchement libre, qui va vivre pleinement ses rêves, et tragiquement disparue en 2015. Le film est actuellement en salles.