De quoi ça parle ?
Laura, vingt ans, fort belle et démunie, revient au pays pour retrouver son père Max, ancien boxeur et chauffeur du maire, Quentin le Bars, la soixantaine. Pour faciliter son installation, Max demande au maire d'aider sa fille à trouver un logement...
Entre Laura et Quentin le Bars, l'engrenage perfide du désir et de la fascination ne tarde pas à se mettre en place. A partir des corps, l'histoire se déroule comme une plaidoirie mêlant injustice sociale et arrogance politique.
Vendredi 13 octobre à partir de 20h55 sur Arte. La fiction est disponible jusqu'au 22 janvier sur arte.tv.
C’est avec qui ?
Réalisée et co-écrite par Charlène Favier, dont le premier long métrage Slalom avait été sélectionné en compétition officielle au Festival de Cannes 2020, La fille qu’on appelle est une fiction portée par Alba Gaïa Bellugi, une jeune comédienne vue dans les séries Manon, Le bureau des légendes et plus récemment Into The Night.
Elle donne pour l’occasion la réplique à Pascal Greggory (La Reine Margot, Jeanne du Barry), qui campe le maire abuseur Quentin Le Bars. Le père de la jeune femme est quant à lui campé par Jean-Pierre Martins, qui s’était notamment glissé dans la peau du boxeur Marcel Cerdan dans La Môme d’Olivier Dahan.
Patrick d’Assumçao (Paris Police 1900, Tapie), Anne Suarez (Zone Blanche, Caïn) et Omar Mebrouk (le frère de Karadec dans HPI) viennent compléter la distribution.
Ça vaut le coup d'œil ?
Adaptant le roman éponyme de Tanguy Viel publié en 2021, Charlène Favier nous offre avec La Fille qu’on appelle un drame percutant sur le thème de l’emprise. “J’étais la fille qu’on appelle”... C’est par ces mots que Laura Corre, venue au commissariat porter plainte contre Quentin Le Bars, se présente aux policiers.
Ministre depuis peu, l’homme a longtemps été le maire de la petite ville dans laquelle Laura a grandi, et où elle est revenue vivre après quelques années de galère à Paris. Hébergée par son père Max, chauffeur du maire et ancien boxeur, elle accepte de se rendre à un rendez-vous avec l’édile afin d’obtenir un logement.
Percevant dans le comportement de la jeune femme tout les atours d’une proie facile, il demande à l’un de ses obligés, le gérant du casino local, de donner à Laura l’un des studios disponibles dans son établissement. Cette faveur n’est cependant pas gratuite.
C’est à travers la déposition que Laura Corre fait aux policiers que Charlène Favier et son co-auteur Antoine Lacomblez (Jeux d’influence, Laetitia) exposent les mécanismes de l’emprise et de la domination, qui font de son héroïne une victime à la fois impuissante et consentante.
Car si la jeune femme n’a jamais vraiment dit “non” à son bourreau, elle n’a pas non plus accepté la nature des visites du maire dans son petit appartement. Une zone grise qui ne joue pas en la faveur de Laura, qui aura bien dû mal à faire entendre sa voix.
Face à Pascal Greggory, glaçant en homme de pouvoir prêt à tout pour assouvir ses besoins primaires, Alba Gaïa Bellugi insuffle au personnage de Laura une force et une fragilité qui la rendent hypnotisante.
Elle parvient avec talent à retranscrire le détachement du personnage, devenu une sorte de zombie plus vraiment maître de son corps lorsque le maire abuse d’elle. Face aux non-dits et à l’hypocrisie, aussi bien de ses collègues que de son père, qui semble ne pas vouloir voir ce que subit sa fille, Laura doit trouver le courage de dénoncer l’ancien maire, quitte à tout perdre.
Car l’actualité nous l’a prouvé maintes fois : dénoncer un homme politique n’est pas sans conséquence…
Si la fiction se perd quelque peu dans la troisième partie, La fille qu’on appelle n’en reste pas moins un drame poignant qui s’empare d’un sujet fort, et qui parvient, grâce à un scénario bien ficelé, à nous faire entrer dans la tête de l'héroïne.