De quoi ça parle ?
Afin de célébrer la fin du lycée, Tara, Skye et Em s'offrent leurs premières vacances entre copines dans une station méditerranéenne ultra fréquentée. Le trio compte bien enchaîner les fêtes, cuites et nuits blanches, en compagnie de colocs anglais rencontrés à leur arrivée. Pour la jeune Tara, ce voyage de tous les excès a la saveur électrisante des premières fois… jusqu'au vertige. Face au tourbillon de l'euphorie collective, est-elle vraiment libre d'accepter ou de refuser chaque expérience qui se présentera à elle ?
Son titre attire forcément l'attention : How To Have Sex ! Mais derrière ces quatre mots se cachent une des plus grandes surprises du cinéma indépendant britannique de l'année. Le film est même reparti de Cannes avec un buzz incroyable et surtout un prix dans la section Un Certain Regard, décroché après un sprint inédit et mémorable !
How To Have Sex a également été remarqué dans de nombreux festivals, y compris lors de la première édition de Nouvelles Vagues à Biarritz.
Après les remarqués Aftersun de Charlotte Wells (le film vient d'arriver sur myCANAL), Blue Jean de Georgia Oakley, sans oublier Toi & moi ? (Rye Lane) de Raine Allen Miller, (disponible sur Disney+), How To Have Sex, écrit et réalisé par Molly Manning Walker, arrive enfin en salles, et s'inscrit dans cette "nouvelle vague" de réalisatrices d'outre-manche, dont chacun des premiers longs métrages ont connu un très bel accueil critique.
Ce long métrage réalisé par Molly Manning Walker possède de vraies idées de cinéma, un scénario solide et un sujet a priori sexy (celui de jeunes se laissant aller à toutes les tentations).
Mais derrière ce vernis s'illustre un propos très fort sur l'injonction à "coucher" avec quelqu'un quand on est jeune, et surtout la notion de zone grise, ou de consentement. Et plus largement, le film s'intéresse à ce qu'on nomme la culture du viol.
Le film est très riche. C'est vraiment la subtilité avec laquelle l'œuvre s'empare de sujets forts qui fait sa vraie réussite.
Nous avons pu rencontrer Molly Manning Walker et sa comédienne Mia McKenna Bruce, au lendemain de la toute première projection du film à Cannes. L'occasion notamment d'évoquer la subtilité du propos et l'énergie très singulière qui se dégage de ce film...
Molly Manning Walker (réalisatrice) : L'écriture de ce film s'inspire de la réalité, provient de références d'expériences et de choses. Et pendant le tournage, j'ai essayé de libérer tous les acteurs, qu'ils se sentent à l'aise d'improviser autant que possible, de pouvoir employer leur propre langage, leur propre vérité dans les mots.
Mia McKenna Bruce (actrice) : En tant, qu'actrice, c'était une expérience incroyable. Nous avons pu avoir 3 semaines de répétition. Cela veut dire que nous avons vraiment eu l'opportunité de se connaitre entre acteurs. Nous étions tous très à l'aise, il y avait une vraie complicité entre nous. On pouvait faire des plaisanteries, échanger comme si on se connaissait depuis des années. De vraies amitiés sont nées sur ce tournage, ce qui a été un atout supplémentaire.
AlloCiné : L'énergie si particulière qu'on sent dans ce film provient donc notamment de vos improvisations...
Mia McKenna Bruce : Oui, tout à fait. C'est l'ambiance générale qui régnait sur le plateau. Tout le monde avançait dans la même direction. Nous étions tous en ébullition, hyperactifs, excités de faire ce que nous faisions tout le temps. C'était comme un flux constant d'énergie. On tournait souvent de nuit, il y avait des scènes de fête. C'était comme une grande famille sur le plateau.
Molly Manning Walker : L'équipe était très jeune et pleine d'énergie. Je pense que ce qui était vraiment intéressant à propos de l'équipe, c'est que non seulement elle était vraiment passionnés par l'idée de raconter une histoire sur le consentement, ils étaient tous des fêtards. Ils ont aimé et compris cette culture de la fête et ils étaient toujours aussi passionnés par l'histoire. Ils ont adoré les scènes de fête, où tout le monde était là. Tout le monde était là pour créer une ambiance. Et ils ont bien sûr aussi beaucoup travaillé sur le plan émotionnel. C'était la bonne équipe pour ce projet. Ils ont tous saisi ce qu'était l'essence du film.
Comment tourne t-on une scène de fête pour un film comme celui là ? Est-ce que vous faites une vraie fête ?
Molly Manning Walker : Tout est chorégraphié. Tous les participants autour des acteurs sont des figurants.
Avez-vous eu recours à ce qui se fait de plus en plus fréquemment au cinéma, à savoir avoir recours à un coordinateur d'intimité, qui veille au tournage des scènes intimes, qui sont justement généralement très chorégraphiées ? C'est quelque chose d'encore assez récent en France.
Mia McKenna Bruce : Oui. En Angleterre aussi, c'est aussi encore quelque chose d'assez nouveau. Mais à vrai dire, c'est assez fou de se dire que tout ça est récent. Quand on y pense, c'est comme si on demandait à des acteurs de se battre sans avoir imaginé la chorégraphie de la scène. Attendre ça d'acteurs, c'est de la folie.
Nous avons fait beaucoup de répétitions. Cela signifiait que nous avions l'espace nécessaire pour partager ce qui nous convenait à tout moment. Tout était chorégraphié. Nous savions donc exactement ce que nous faisions à tout moment. Le coordinateur savait ce que nous ne voulions pas, ou ce que nous voulions, ce qui nous était inconfortable ou confortable, et que cela soit aligné avec ce dont Molly avait besoin pour le film.
Ce film est comme un tour de grand huit, en terme d'émotions et de ressentis. Il y a des moments festifs, joyeux, puis on sombre dans une forme de peur, d'inquiétude. On passe d'une forme de légèreté à une lourdeur.
Je voulais réfléchir à la façon dont on dépeint une victime au cinéma. Pas simplement montrer une victime dont on constate l'agression, et ensuite leur vie est finie ou attristée. Pour moi, il était très important que la trajectoire de Tara soit le reflet de ce qui arrive vraiment. L'idée est que Tara est une fille normale, et pas l'idée traditionnelle qu'on pourrait se faire de la victime.
Propos recueillis et traduits par Brigitte Baronnet, au Festival de Cannes 2023
Le casting du film est impeccable, et en premier lieu l'incroyable Mia McKenna-Bruce. Mention spéciale également à l'excellente playlist de musiques.
How To Have Sex de Molly Manning Walker sort en France ce mercredi 15 novembre 2023.