En 1994, le cinéaste Alex Proyas frappa fort avec The Crow, formidable adaptation du comic-book créé par l'Américain James O'Barr. Un film maudit aussi, puisqu'il sera endeuillé par le décès accidentel de son interprète principal, Brandon Lee, avec une arme à feu qui devait être chargée à blanc. Si les producteurs tenteront à plusieurs reprises de rincer la franchise avec des suites et même une série TV portée par Mark Dacascos dans le rôle-titre, on se souvient surtout de l'oeuvre d'Alex Proyas.
Fort du succès du film avec ses 94 millions $ de recettes au Box Office mondial, Proyas a les coudées franches pour mettre en boîte son prochain film, Dark City. Un projet qu'il avait pourtant en tête bien avant, et qui lui était cher.
Soit le récit des (més)aventures de John Murdoch (Rufus Sewell), qui se réveille dans une chambre d’hôtel et découvre à ses côtés le cadavre d’une femme. Il ne se souvient ni de la nuit passée avec elle, ni de celles qui l’ont précédée : il a perdu la mémoire.
Traqué par la police qui le soupçonne d’être un tueur en série et poursuivi par les Etrangers, des êtres mystérieux aux pouvoirs terrifiants, il cherche à retrouver son identité. Mais dans une ville où la réalité n’est qu’une illusion, la vérité est au-delà de toute imagination…
Torpillé par Titanic
Dans une cruelle rencontre avec le calendrier des sorties, Dark City a eu le malheur de sortir à peine un mois après le rouleau compresseur Titanic de James Cameron, qui cannibalisait largement le Box Office et dévastait tout sur son passage. La gifle au Box Office sera cinglante, et aura même la vigueur d'un sacré uppercut : Dark City ne ramassera que des miettes, avec 27 millions $ au compteur.
Une vraie injustice, tant le film de SF possède d'évidentes qualités. Visuellement époustouflant, baignant dans un fantastique univers néo-noir reprenant les codes du polar, Dark City brasse de nombreuses références et pas seulement visuelles, comme celle du Métropolis de Fritz Lang, la plus évidente.
En passant par Brazil de Terry Gilliam; Blade Runner et son futur sombre et désenchanté. Ou même Akira de Katsuhiro Otomo, pour ses affrontements dantesques. C'est peu dire que la sublime photographie signée Dariusz Wolski rend justice au film, faisant de la ville en question un fascinant personnage à part entière.
Préfigurant Matrix en s'interrogeant sur le libre-arbitre de l'humanité, porté par un scénario original et un casting plutôt solide (avec quand même un Rufus Sewell en retrait car pas toujours très expressif) au milieu duquel on retrouve un Kiefer Sutherland pas encore abonné au rôle de Jack Bauer, Dark City ne souffre pas de plusieurs visionnages. Au contraire même, il s'enrichit et se bonifie toujours un peu plus.
On vous recommande d'ailleurs chaudement la version Director's Cut du film, plus longue de 15 min, qui propose un montage subtilement différent, la disparition de l'intro en voix off, et l'apparition de nouveaux personnages secondaires. Il faudra néamoins se tourner exclusivement sur le Blu-ray / DVD pour découvrir cette version ; le film n'étant malheureusement pas disponible en streaming.