Il était très ému à l'issue de la projection de son film à Cannes, en clôture de la sélection Un Certain Regard le 26 mai 2023. Une nuit, c'est son tout dernier opus, co-écrit avec sa célèbre amie et partenaire Karin Viard, à partir d'une scène de métro insolite et marquante, puis d'une image ensuite entêtante, le tout selon un point de vue original et poétique questionnant l'amour et le temps qui passe. Dans l'interview vidéo ci-dessus, Alex Lutz nous parle de l'enjeu de son très beau film, en salles le 5 juillet 2023.
C'est à Cannes au lendemain de la projection face au public et en présence de son équipe que nous avons rencontré cet auteur, acteur et réalisateur aux multiples couleurs, connu de toutes et tous pour s'être glissé longtemps dans les robes de Catherine, copine de Liliane (Bruno Sanches) dans les pastilles comiques des mêmes noms, diffusées sur Canal+.
"Lors de la projection d'Une nuit, je me sentais comme on se sent un dimanche, lorsqu'on attend toute la journée des invités. On prépare tout et lorsqu'ils arrivent, on est un peu décalé avec notre rôti tout prêt. Mon dimanche, il a duré un an. Donc lorsque les invités sont arrivés, je n'étais pas comme on dit "en pleine conscience". C'est après que j'ai pu réaliser et profiter".
Profiter de l'accueil chaleureux qui a été réservé à son histoire d'amour peu commune, mettant en scène un Paris nocturne, quasi désert, où après s'être bousculé et disputé dans un métro bondé puis s'être aimé dans un photomaton isolé, un homme et une femme se baladent, désireux l'un de l'autre, incapable de se quitter. La nuit et ses heures étirées leur appartient désormais.
Marie-Camille Orlando
Un film né d'une dispute charmante, d'une image insolite et d'une amitié cash
"Cette scène de dispute dans le métro à laquelle j'ai vraiment assisté était pleine de charme, d'arguments assez truculents. Je me suis dit que ces deux personnes avaient l'air de bien se plaire. Parallèlement à cela, j'avais une note en tête "tiens, faisons l'amour maladroitement dans un photomaton de couleur de métro, un peu comme on peut". Tout était là, bien avant mon film Guy (dont on vous parle ici). Puis au fur et à mesure de notre amitié grandissante et de notre relation de travail avec Karin Viard, je trouvais que c’était la partenaire idéale et j'avais envie de faire cela avec elle."
Son envie ? Mettre "l’énergie de [leur] chouette et franche amitié qui se dit les choses sans détour de manière assez cash" au service d’une histoire d’amour : "J'avais la voix de Karine en tête, je voulais qu’elle y mette sa patte à l’écriture, son énergie."
Si Alex Lutz a en effet écrit le film et sa structure en amont, c'est bien aux côtés de Karin Viard qu'il l'a recréé, mêlant scènes très écrites et décrites et intentions de dialogues que l'on se permet ensuite de dilater, diminuer, faire glisser. L'une des scènes magistrales du film où les amants tentent de définir ce qu'est l'alchimie, alors qu'elle semble entièrement improvisée, a été ainsi notamment très décrite, isolée par thèmes de discussion que le duo s'est ensuite occupé de mettre dans l'ordre souhaité, ce qui "crée vraiment quelque chose, car on se paume un peu et cela ressemble à la manière dont on se parle dans la vie!"
Une réflexion sur le temps qui passe, ingrédient de tout ce qui est "joyeux, grotesque, dramatique ou terrible"
Écrite au cordeau, l'histoire d'Une Nuit est celle justement d'une alchimie, d'une rencontre amoureuse entre un homme et une femme avec chacun une vie déjà bien remplie. Une très belle réflexion sur le couple passé un certain âge mais aussi sur les individualités qui se questionnent à mesure que le temps commence à manquer.
Parce que comme il le dit dans notre interview filmée ci-dessus, "le temps qui part comme du sable" est sa "thématique préférée, l'engrais de nos joies, peines, colères, enragements, frustrations, de nos envies de nous serrer, de nos amours", Alex Lutz s'est plu à soigner chaque détail de cette rencontre résolument inscrite dans l'instant présent, celui d'une nuit, qui nous libère en ce qu'elle nous impose moins de rôle que le jour. Une nuit où l'amour se joue à coup de petits détails insolites ou inattendus, comme dans l'errance amoureuse de Before Sunrise et ses suites où l'on refait le monde, en se parlant beaucoup et en s'aimant surtout, envers et contre tout.
"Je voulais m’amuser des codes de la séduction aussi. Comment être fou d’amour, regarder une peau, une nuque avec des habits inadaptés, volés dans une soirée, avec une parodie de tenue. Montrer que le coup de foudre ou ce qui va plaire c’est subjectif. Lors d'un adultère, la personne trompée s’interroge parfois : "Quoi c’est avec elle qu'il m'a trompée ? " C’était marrant de s’amuser des imaginaires physiques d’un couple ensemble, de les montrer dans une maladresse inadaptée qui soit quand même belle."
La romance revue et réimaginée par le duo Alex Lutz / Karin Viard est à découvrir en salles dès ce mercredi 5 Juillet.
Un avant-goût en images :
