Firebrand - Le Jeu de la Reine aurait pu être un drame historique classique mais le nouveau film du réalisateur Karim Aïnouz est bien plus complexe que ça. Sélectionné en Compétition officielle, ce film, écrit par Jessica et Henrietta Ashworth, revient sur l'histoire de Catherine Parr, la sixième femme du roi Henri VIII.
Elle est consciente du danger permanent à être l'épouse de ce roi, puisque ses précédentes conjointes ont été soit répudiées, soit décapitées (une seule étant décédée suite à une maladie). Avec l’aide de ses dames de compagnie, elle tente de déjouer les pièges que lui tendent l’évêque, la cour et le roi…
Le Jeu de la Reine dresse le portrait d'une reine rebelle, convaincue de la nécessité d'un monde plus libre et plus moderne, qui va combattre l'abus de pouvoir des hommes qui l'entourent.
Véritable thriller où Catherine l'intelligente et impertinente Belle est prisonnière du château d'Henri VIII, la répugnante et violente Bête, ce film lorgne également du côté du mystique tant dans sa mise en scène hypnotisante que dans son récit.
En suivant le parcours de Catherine et des ses dames de compagnie, le film met en lumière le pouvoir de la sororité contre la violence de la chasse aux sorcières menée par la fausse morale pudibonde des hommes placés en haut lieu.
Le long-métrage se la joue également naturaliste et authentique en proposant des séquences horrifiques près des corps sur des blessures profondes ou des plaies béantes mais aussi des scènes plus colorées de danses et de compositions musicales vibrantes et intensément vécues.
Les performances dingues d'Alicia Vikander et Jude Law
Ce qui distingue surtout Le Jeu de la Reine au sein de la compétition de la 76ème édition du Festival de Cannes, c'est le jeu des deux acteurs principaux, Alicia Vikander, dans la peau de Catherine Parr, et Jude Law, incarnant Henri VIII.
Leur performance mérite une grande attention de la part des membres du jury du Festival de Cannes. Pourraient-ils décerner un prix d'interprétation à l'un des deux acteurs ?
Jude Law s'est en tout cas investi à 100% dans son rôle, surtout qu'il a utilisé une technique particulière pour se glisser dans la peau de son personnage de roi monstrueux et boiteux. Un stratagème étonnant dont nous a parlé Alicia Vikander en interview :
"Jude avait cette méthode de travail qu'il a utilisée sur plusieurs projets, qui concernent ses parfums. Il a un parfumeur à Londres, qui lui concocte des parfums qui sont raccord avec ses personnages pour les ressentir vraiment.
Mais pour Firebrand, il avait lu que l'odeur d'Henri VIII pouvait être sentie, selon les livres d'Histoire, par les occupants du château jusqu'à trois chambres plus bas à cause de son extrême infection, c'était tout simplement épouvantable.
Alors il a fait en sorte que son parfum reproduise ces odeurs. C'était la chose la plus dégoûtante au monde. Donc quand Jude arrivait après une répétition et qu'il commençait à jouer pour moi et à se rapprocher de moi, j'étais choquée et dégoûtée. Ça rajoute beaucoup d'intensité à la scène."
Outre cet attrait odorant - avec un parfum qui mêle du sang, des matières fécales et de la sueur comme il l'a révélé en conférence de presse -, Jude Law s'est littéralement transformé en bête ignoble pour incarner Henri VIII.
Sa carrure imposante, ses costumes étouffants et sa manière de se mouvoir ont été travaillés avec une grande précision et une grande force. Et l'acteur n'a jamais été aussi brutal et effrayant que dans ce rôle d'envergure.
De son côté, Alicia Vikander est impériale dans la peau de Catherine Parr et impressionne par sa palette de jeu. Le réalisateur Karim Aïnouz, également rencontré lors du Festival de Cannes, nous a expliqués pourquoi l'actrice suédoise avait été choisie pour ce rôle :
"Alicia a un corps, un regard et une âme qui sont très modernes. Et pour moi, c'était important d'avoir cette touche de modernité. Et elle a aussi beaucoup de mystère. Je pensais que ce serait intéressant de ne pas nécessairement choisir une actrice qui a le visage de Catherine Parr, mais plutôt une personne qui puisse nous rapprocher du passé. Le fait aussi qu'elle ne soit pas anglaise, ça m'a beaucoup intéressé."
Pour appréhender son rôle, Alicia Vikander s'est surtout attardée sur une préparation psychologique et physique intense, car elle souhaitait, avec ce film, mettre l'accent sur la torture, la dangerosité et la pression qu'a vécu Catherine Parr dans sa relation toxique avec Henri VIII :
"Il y avait beaucoup de préparation historique évidente, des livres que je pouvais lire. Nous avons rencontré des conférenciers fantastiques qui sont venus nous parler et ont répondu à toutes nos questions.
Mais pour moi, ce qui m'a vraiment attiré dans ce film, c'est le fait que Karim voulait vraiment raconter une histoire émotionnelle assez contemporaine, dans le sens où il voulait se concentrer sur la relation très intime entre elle et Henri. Ce n'est pas qu'un drame en costumes royaux. C'est l'histoire d'une femme qui a survécu à une relation extrêmement brutale."
Le film Firebrand - Le Jeu de la Reine n'a pas encore de date de sortie en France.