Allociné : Qu’est-ce qui vous a attiré dans le personnage de Manu au moment de vous lancer dans l’aventure Un si grand soleil ?
Moïse Santamaria : Le fait qu'il y avait tout à faire. J'avais quelques lignes pour me parler du personnage mais il y avait tout à inventer et à découvrir. Son parcours m'a beaucoup plu. Son origine sociale, sa maturité et son côté un peu borderline aussi.
Manu a vécu beaucoup de choses dans Un si grand soleil. Quel bilan faites-vous de l’évolution de votre personnage ?
Il prend les leçons de la vie. Je dirais que c'est quelqu'un qui est à l'écoute de ce qu'il se passe. Il prend en considération les autres, il a une capacité à se remettre en question et à avancer. Je dirais ça, tout simplement.
C’est un Manu beaucoup plus à fleur de peau qui nous est donné de voir à l’écran actuellement. Est-ce que ça vous plaît de creuser cette fragilité chez votre personnage ?
Tout à fait ! Finalement, c'est un sensible. Dans cette arche, il montre davantage ses failles. C'est un Manu qu'on n'avait jamais vu jusqu'à présent. Il s'ouvre à un psy, à quelqu'un d'inconnu pour lui. C'est un moment très intime.
Ce qu'il se passe actuellement avec Eve (Emma Colberti), c'est assez grave pour lui. Il va devoir apprendre à mettre tout ça de côté alors que c'est quelqu'un qui a une forme de fierté. On a tous dans la vie cette forme de fierté. On n'aime pas être pris pour des cons, surtout avec notre conjoint ou notre conjointe. Pardonner, ce n'est pas quelque chose de facile. Entre dire "Je te pardonne" et vraiment pardonner, c'est quelque chose de compliqué. Manu est à cette étape. Il se sépare d'Eve tout en continuant à faire un travail sur lui-même avec la psy. On va voir où ça va le mener. Est-ce qu'il va pardonner Eve ? Est-ce qu'il réussir à dépasser cette trahison ?
Manu a en effet récemment mis un terme à son histoire d'amour avec Eve. Bien que les choses semblent définitives, est-ce vraiment fini ou existe-t-il encore un espoir pour qu’ils se remettent ensemble ?
Je dirais que là c'est fini... mais il y a toujours un espoir dans la vie, non ? [rires]. Il y a toujours un espoir. Là, c'est sûr que ça a l'air d'être cuit, mais à voir.
Les scènes autour de la rupture d'Eve et Manu sont fortes en émotion. Est-ce qu’une scène en particulier a été difficile à tourner ?
Non. Je dis non parce que c'est la situation qui est dure à vivre, mais ce n'est pas le jeu qui est dur à faire. En revanche, il a fallu se mettre sur la même longueur d'onde et la même vibration avec Emma Colberti. Il a fallu qu'on trouve ce manège, c'est à dire ces questions-réponses, ce jeu qui ne fait qu'un.
On a eu un dialogue avec les réalisateurs pour trouver la mise en scène. On ne pouvait pas nous dire "Tu te mets là et tu fais ça". Il fallait qu'on trouve nos places. Il a fallu chercher. C'était très intéressant à chercher d’ailleurs. Dans une quotidienne, on n'a pas trop le temps de faire comme au cinéma. Là, on a pris ce temps rapidement (rires). On a eu une complicité de jeu pour pouvoir trouver ça. C'est sûr que quand on joue des choses de cet ordre, c'est un peu plus complexe.
En tout cas, ça n'a pas été dur à jouer. J'aime jouer et d'autant plus quand c'est intense. Je ne peux pas dire que c'est dur mais plutôt que c'est intéressant. C'est intéressant et ça me plaît de me mettre dans certains états émotionnels.
Manu va prochainement reprendre du service et enquêter sur la mort suspecte d’Aline Delclos. Comment va-t-il réagir en apprenant que Virgile (Fred Bianconi) et Eve enquêtent secrètement de leur côté ?
Manu va être en colère, évidemment. Pas tellement par le fait que c'est encore un mensonge mais parce qu'ils vont prendre des risques et que Virgile fait prendre des risques à Eve. Manu va en vouloir particulièrement à Virgile parce que c'est son pote et qu'il ne lui a rien dit. Ça ne va pas se passer comme ils l'entendent et pas vraiment super bien.
La jalousie de Manu vis-à-vis de Virgile pourrait-elle remonter à la surface ?
Non. On est plutôt dans le registre de l'amitié.
Comme vous l’avez évoqué, Manu a débuté une thérapie avec une psychologue. D’une manière générale, ce type de démarche reste encore tabou. Est-ce important pour vous que les téléspectateurs puissent voir Manu se mettre à nu de cette façon ?
Je trouve que c'est assez répandu mais ça dépend vraiment du milieu socioculturel auquel on appartient. Après, il faut avoir les moyens de consulter, de payer 70 ou 80 euros pour une psychanalyse. Les gens que je connais et qui consultent n'ont aucun malaise à dire qu'ils vont voir un psy. Je ne sais pas si c'est encore un sujet tabou. Le tabou qu'il faut lever selon moi, c'est le coût. Tout le monde devrait pouvoir consulter s'il en a envie.
Mais pour répondre à votre question, c'est en effet important que les téléspectateurs voient Manu se mettre à nu chez un psychologue. C'est bien qu'on le voit consulter. J'ai pris plaisir à emmener Manu sur ce terrain-là. C'est quelque chose que j'ai beaucoup aimé parce que ça montrait une autre facette de lui au bout de cinq ans. C'est très intéressant et ça enrichit davantage le personnage.
Ce qui était important aussi, c'était de montrer un policier très humain. Je voulais vraiment montrer ses failles, montrer qu'il est fou amoureux, que c'est un papa poule et qu'il puisse être parfois faible aussi. Toutes ces choses sont importantes. Ça en fait un humain tout simplement. Je suis persuadé que nous avons tous de multiples facettes qui forment notre personnalité. Pouvoir faire ça à travers un personnage permet de montrer aux gens ces facettes pour qu’ils se reconnaissent davantage à travers lui.
Récemment, Manu était au cœur d’une intrigue très importante sur le viol d’une jeune femme dans le milieu de la pornographie. Quel regard portez-vous sur cette intrigue ?
Ça m'a été présenté de cette manière-là par la direction artistique. On m'a fait comprendre que c'était une arche importante qui allait montrer une évolution du personnage. J'étais très content de pouvoir traiter et défendre ce sujet. J'ai mis beaucoup de moi dans cette intrigue.
Je connais des policiers qui sont en brigade des mineurs ou en brigade des mœurs. Je suis allé leur rendre visite. Personnellement, je ne sais pas comment ils font pour séparer l'émotionnel du travail.
Quand j'ai lu cette arche sur le milieu du porno underground, je me suis dit que ça allait être dur pour Manu de rester droit dans ses bottes. Il l’a été pendant un temps mais au bout d'un moment, il a pété un plomb. J'ai beaucoup aimé jouer cette arche parce qu'elle impliquait des choses fortes et traitait d'un sujet important.
Manu pourrait-il à nouveau enquêter sur la disparition de Tresson ou bien se mettre sur la piste de Christophe (Hubert Benhamdine) ?
Je ne sais pas s'il sera amené à enquêter de nouveau. S’il cela arrivait, il remonterait probablement la piste de Christophe et ça ne sentirait pas bon pour lui (rires).
D'une manière générale, qu'est-ce qui attend Manu dans la suite de la série ?
Après l'enquête sur la mort d'Aline, on va voir un peu comment les rapports entre Eve et Manu vont s'établir. Ça va mettre du temps mais ils vont peut-être se recroiser, je ne sais pas. Il va également reprendre son activité de flic et on tourne en ce moment une arche qui est pas mal.
Est-ce qu'il y a d’autres sujets que vous aimeriez défendre à travers Manu ?
Manu l'a déjà plus ou moins fait et il va le refaire mais la désobéissance face à des ordres qui ne correspondent pas à sa morale à lui. Je respecte beaucoup les policiers qui désobéissent à des ordres qui ne sont pas acceptables moralement.
Avez-vous d'autres projets en dehors d'Un si grand soleil dont vous pouvez parler ?
L'été dernier, j'ai tourné Je suis né à 17 ans, un unitaire pour France Télévisions adapté du livre de Thierry Beccaro qui sera diffusé dans l’année. Ça parle de l'enfance et de la maltraitance aux enfants. C'est réalisé par Julien Seri, je joue le père de Thierry Beccaro.