Immense acteur, unanimement respecté par ses pairs, modèle absolu pour toute une génération d'acteurs et d'actrices afro-américains mais pas seulement, Denzel Washington est le premier afro-américain récipiendaire de deux Oscars. D'abord celui du meilleur second rôle pour son extraordinaire composition dans Glory; puis celui du Meilleur acteur pour son fantastique travail dans Training Day sous les traits du flic véreux Alonzo Harris.
Puissant film signé Antoine Fuqua irrigué par l'interprétation électrisante d'un Denzel Washington impérial, il y incarnait un vétéran et légende de la brigade des Stups affichant un taux record de condamnation de criminels. Un tableau de chasse respectable s'il n'était devenu entre-temps véreux et sans scrupules.
"King Kong Ain't Got Shit on me !"
Si le comédien bénéficia des conseils avisés de Paul Lozada, consultant auprès de la police de San Francisco, sur la vie des agents de la lutte anti-drogue, son personnage est inspiré d'un authentique flic corrompu.
Un certain Rafael Perez, pris dans l'engrenage d'un énorme scandale qui éclaboussa l'unité anti-gang du LAPD, où Perez commença par prendre pour lui l'argent saisi de la drogue, puis s'est mis à vendre lui-même de la cocaïne, entre 1995 et 1998.
Dans le tout dernier tiers du film, Alonzo se fait retrouver par Jack Hoyt (Ethan Hawke) dans son quartier mal famé, et après avoir rossé de coups ce dernier, lâche à l'assistance témoin de la scène une diatribe dont il a le secret; la concluant par un "King Kong Ain't Got Shit on me !!!", l'écume littéralement au bord des lèvres. Alonzo sentant clairement que les voisins et habitants du quartier ne supportent plus ses méthodes de terroriste, et que son badge de policier ne le protège plus vraiment...
Séquence souvenir...
Il se trouve que cette réplique énervée est 100% improvisée. C'est ce que révèle le réalisateur dans un formidable article de Vanity Fair consacré à 25 scènes culte de films, racontées par les talents qui les ont joué, ou filmé.
"Le moment "King Kong" est venu de Denzel. Je me souviens de ce moment parce que nous faisions la scène, et il a juste commencé à improviser. Je me souviens d'avoir regardé le caméraman et d'avoir dit : "J'espère que tu l'as eu, parce que je ne pense pas qu'on va l'avoir encore." Denzel est venu vers moi et a dit : "Whoo, je ne sais pas d'où ce truc est sorti !"
C'était épuisant pour lui [...] C'était un de ces moments où ça donne des frissons. Nous avons tourné avec des objectifs anamorphiques, donc les objectifs anamorphiques sont très sensibles pour s'assurer que tout est net. Celui qui fait la mise au point de la caméra s'est approché de moi après, ses mains tremblaient.
J'ai commencé à beaucoup entendre parler de cette séquence dans les chansons de rap, beaucoup de rappeurs disaient des trucs sur Alonzo, ou Training Day, ou "King Kong n'a rien contre moi", ou "c'est des échecs, pas des dames" [NDR : une autre réplique d'Alonzo Harris]
Le moment où j'ai réalisé que ça avait pris une autre vie, c'était avec Ethan Hawke. Un jour, Ethan était à Harlem en train de faire quelque chose et il m'a appelé et m'a dit : "Waouh, j'ai un tout nouveau public, tous ces gens sont venus vers moi. Tu as fait en sorte de faire un bon film, et c'est quelque part devenu un phénomène culturel".