10 secrets sur l'univers de Jacques Demy... - Page 8

Au milieu des années 70, Jacques Demy souhaite réunir Catherine Deneuve -déjà une star- et Gérard Depardieu -pas encore un monstre sacré- dans Une chambre en ville. Ce long métrage musical (dans la forme) et social (sur le fond) lui tient particulièrement à coeur, car il a pour toile de fond Nantes, la ville de son enfance. Catherine Deneuve, dont la voix était doublée dans "Les Parapluies de Cherbourg", "Les Demoiselles de Rochefort" et "Peau d'âne", tient cette fois à chanter elle-même. Elle estime que le doublage créerait un problème de crédibilité, les spectateurs connaissant trop bien sa vraie voix. Gérard Depardieu partage ce point de vue. Le réalisateur ne parvenant pas à trouver un accord avec ses acteurs, le projet est abandonné... avant de refaire surface avec un autre casting : Dominique Sanda (déjà dirigée par Demy dans La Naissance du jour, téléfilm inspiré de l'oeuvre de Colette) et Richard Berry. A noter que la partition est signée Michel Colombier, car son complice habituel Michel Legrand n'a pas été séduit par le scénario. Deneuve racontera ce "malentendu douloureux" aux Inrockuptibles en 1996 : "On a (...) commencé à travailler le chant mais Jacques n'a rien fait pour que ce soit probant et a décidé trop vite, sans qu'on ait assez travaillé, que l'essai n'était pas concluant. Je dois dire que ça m'a braquée (...) C'est très, très triste parce qu'on est restés brouillés assez longtemps."

Demy-échecs

Film de tous les désaccords, "Une chambre en ville" sera boudé par le public en 1982, avant de devenir un des films favoris des Demyphiles. Au moment de la sortie, il est pourtant soutenu par une partie de la critique, qui le met en opposition avec L' As des As, film grand public avec Jean-Paul Belmondo en salles la même semaine. Les années 80 sont difficiles pour le cinéaste, entre les projets qui ne se font pas, les expériences de tournage malheureuses (la production américaine Louisiane, avec Margot Kidder, qui sera finalament réalisée par Philippe de Broca après le désistement de Demy), maus aussi un film qui ne convainc ni la critique, ni le public, ni même le réalisateur (Parking). Son dernier long métrage, Trois places pour le 26 (1988), ne lui permettra pas de renouer avec le succès commercial, mais au moins Demy peut-il avoir la satisfaction d'avoir vu aboutir ce projet très ancien. Malade depuis le milieu des années 80 (il est atteint du sida, comme le révèlera Varda bien plus tard, dans Les Plages d'Agnès), il disparaît le 27 octobre 1990.

VIDEO : Michel Piccoli évoque "Une chambre en ville"