Il y a 10 ans, "Memento" sortait dans nos salles. L'occasion de se (re)plonger dans le cinéma de Christopher Nolan, un réalisateur qui a aujourd'hui mis une bonne partie d'Hollywood à ses pieds - Dossier réalisé par Maximilien Pierrette
Maintenant que les budgets de ses films se chiffrent en centaines de millions de dollars, et qu'ils revêtent parfois un côté épique, renforcé par la musique d'Hans Zimmer (mais ça on y reviendra plus tard), Christopher Nolan pourrait se faire plaisir avec la caméra, et tenter des mouvements alambiqués à la Michael Bay ou à la David Fincher. Mais non, le metteur en scène ne s'est pas laissé gagner par la folie des grandeurs, et il cherche toujours à rendre ses longs métrages les plus réalistes possible, quelque soit le genre abordé. En celà, son travail sur Inception s'inscrit dans la lignée de Following, filmé dans un style documentaire (et en noir et blanc, conséquence du daltonisme de Nolan) qu'on retrouvera en partie sur Memento. Depuis, sa caméra tremble un peu moins, mais la mise en scène reste précise et carrée (il faut dire que l'une de ses influences majeures est Michael Mann), soutenue, depuis Batman Begins, par le montage de Lee Smith. En regardant bien, on remarque que l'un des seuls mouvements de caméra ostensibles dans le cinéma de Nolan se situe dans Inception, lorsqu'Arthur (Joseph Gordon-Levitt) maintient son adversaire en haut d'un escalier... particulier. Sauf que cet effet se justifie pour que la feinte fonctionne au maximum pour le spectateur (voir ci-dessous).
Bref, Christopher Nolan est quelqu'un de carré, à la mise en scène maîtrisée, et ça se sent lorsqu'on sait qu'il n'a pas eu recours à un réalisateur de deuxième équipe pour The Dark Knight et Inception, préférant tout diriger lui-même. On peut d'ailleurs voir son souci du réalisme dans le making-of ci-dessous.
Autre preuve de son goût pour le réalisme : l'utilisation des effets numériques. Ou plutôt leur non-utilisation, puisque Nolan n'aime pas cette technique, et réduit son emploi au strict minimum (ceci explique peut-être pourquoi les rares effets numériques de ses films peuvent parfois faire tâche), l'exemple le plus frappant étant celui du camion de The Dark Knight, que le metteur en scène a vraiment fait se retourner au beau milieu d'une rue, ou de l'hopital, qu'il a vraiment fait exploser (mais il était abandonné depuis longtemps). Citons aussi le cas d'Inception (thriller de science-fiction situé dans l'univers de rêves, rappelons-le), qui n'a nécessité que 400 plans à effets spéciaux. Dit comme ça, ce chiffre peut n'avoir l'air de rien, sauf qu'il représente 1/5ème de la moyenne habituelle pour un blockbuster de cette trempe. Et si vous n'êtes pas encore bouche bée, attendez donc la ligne suivante, puisque vous allez y apprendre que la séquence (déjà culte) au cours de laquelle Joseph Gordon-Levitt se bat dans un couloir rotatif, avant de transporter ses compères vers un ascenseur en apesanteur, a été tournée dans un vrai décor tournant et à l'aide câbles. Pas de fonds verts ni de "on rajoutera ça en post-prod" donc, ce qui rend le passage d'autant plus impressionnant, surtout lorsqu'on se rend compte que Gordon-Levitt a effectué lui-même l'intégralité (ou presque) de ses cascades. Ce qui ne lui en a pas moins demandé beaucoup d'efforts, comme il l'avait raconté aux membres du Club 300, lors de leur rencontre avec le casting du film (à partir de 5:01 dans l'interview ci-dessous).
En voyant tout ça, on se rend compte que la Warner ne pouvait pas choisir meilleur candidat pour faire oublier la techno parade organisée par Joel Schumacher à Gotham City en 1997, surtout que, côté couleur, Nolan donne aussi dans le réaliste, malgré les teintes vertes et jaunes qui peuvent habiller certaines scènes de Batman Begins, The Dark Knight et Inception.
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