Dans le paysage cinématographique contemporain, où l'innovation se fait souvent éclipser par le recyclage et la réitération, "Baby Driver" d'Edgar Wright se positionne comme un vent de fraîcheur, bien que non exempt de turbulences. Wright, connu pour sa capacité à mélanger avec brio humour et action tout en y injectant une originalité stylistique, nous offre ici un film qui démarre sur les chapeaux de roue, porté par une bande-son rythmée et des séquences de poursuite éblouissantes qui sont, sans conteste, la colonne vertébrale de ce long-métrage.
Ansel Elgort, dans le rôle de Baby, apporte une justesse remarquable à son personnage, un chauffeur prodige aux oreilles constamment bercées par de la musique pour couvrir ses acouphènes, conférant au film une dimension musicale presque continue. Cette symbiose entre la musique et l'action n'est pas sans rappeler les chorégraphies soigneusement orchestrées de Wright dans ses précédentes réalisations, faisant de chaque course-poursuite un ballet motorisé. La performance de Kevin Spacey, en revanche, bien qu'efficace, n'apporte rien de nouveau à son répertoire de personnages autoritaires et manipulateurs.
Là où le film patine, c'est dans le développement de ses personnages secondaires et de la romance centrale. Bien que Lily James livre une prestation charmante, son personnage de Debora reste superficiel, limité à l'archétype de la muse sans profondeur narrative propre. De même, le gang de braqueurs, malgré la présence de talents tels que Jon Hamm et Jamie Foxx, souffre d'un manque d'exploration qui les réduit à de simples figures stéréotypées plutôt qu'à des personnages pleinement réalisés.
Le scénario, bien que truffé de dialogues pétillants et de rebondissements captivants, tend à s'enliser dans une certaine prévisibilité, surtout dans son troisième acte où le film semble perdre de son élan, trahissant peut-être l'ambition de Wright de concilier une esthétique soignée avec une narration complexe.
"Baby Driver" excelle dans son exécution technique, la photographie de Bill Pope et le montage de Paul Machliss étant particulièrement dignes de mention, créant un spectacle visuel et auditif qui est un pur plaisir sensoriel. Néanmoins, le film, pour toute sa virtuosité stylistique, ne parvient pas tout à fait à équilibrer ses éléments, laissant le spectateur avec un sentiment de manque inexpliqué, comme une mélodie dont les dernières notes auraient été étouffées.
En somme, "Baby Driver" est un voyage exaltant avec des accélérations éblouissantes et quelques ralentisseurs inattendus. Edgar Wright prouve une fois de plus sa maîtrise de la forme, mais laisse entrevoir des lacunes dans le fond, rappelant que même les courses les plus trépidantes peuvent bénéficier de quelques pauses réfléchies.