Columbo est un être en décalage, modeste au milieu des riches prétentieux, débraillé parmi les élégants, aux vieilles techniques d’investigation loin des dernières ressources technologiques. Il nous fait entrer dans les cercles fermés des grands de ce monde, il nous révèle l’envers du décor social, il prend le pouls de l’Amérique qui commande. Mais comme son homonyme Christophe, Franck Columbo est bien sûr et avant tout un découvreur, l’explorateur de la vérité. Il peaufine l’image trompeuse de flic médiocre et inoffensif qu’il se plaît à donner en spectacle. Un écran de fumée de l’illusionniste, à l’instar des volutes produites par son inséparable cigare, complète astucieusement son déguisement (le vieil imperméable) et permet au lieutenant qui se veut autre de se cacher, d‘être toujours insaisissable. Lorsqu’à la fin de l’épisode, comme toujours, il démasque le coupable, il lui faut lui aussi révéler à l’autre qui il est vraiment. En mettant à nu les motivations criminelles de l’homme, l’inspecteur doit mettre un terme provisoire à sa quête ontologique. Mais Columbo c’est aussi l’anti-policier. Un genre à rebours. L’identité du criminel est connue dès les premières minutes, le suspense est mort-né, l’action n’existe pas. Tout tient à la manière. Chaque épisode proclame le triomphe du vrai sur le faux, de la vérité sur le mensonge, de l’être sur le paraître, du pauvre sur le riche, de l’intelligence sur l’inexpliqué, du Bien sur le Mal. Aussi, en dépit des crimes sordides et des mobiles crapuleux, la série demeure foncièrement positive, optimiste, lumineuse. Elle célèbre la victoire éclatante de l’intelligence au service de la Vérité. Les apparences sont toujours trompeuses, la façade respectable des nantis se lézarde et l’aspect loqueteux révèle un cœur pur et droit. Columbo, c’est la personnification héroï-comique de la Justice en marche, offerte, le temps d’un épisode, aux hommes de bonne volonté. http://autopsie-du-monde.over-blog.com/article-33977569.html