Fan de Edgar Allan Poe, j'ai hésité à regarder cette adaptation TV de peur d'être déçue. Ce ne fut pas le cas.
The Fall of the House of Usher (La Chute de la Maison Usher), adaptée de la nouvelle éponyme de Poe, est la chronique annoncée du déclin d'une famille riche et puissante, ayant fait fortune dans le domaine pharmaceutique et qui est clairement inspirée de la famille Sackler, à la tête de Purdue Pharma impliquée dans un énorme scandale aux opioïdes qui seraient liés à plus de 500 000 morts. Aucune surprise donc concernant l’issue des membres de la famille, tous plus odieux les uns que les autres (à une exception près) et que nous prenons plaisir à haïr. Ce qui est intéressant, est le traitement réservé à chacun. Tout comme la série Destination Finale, le spectateur pourra s’amuser à deviner à partir des indices comment chaque personnage va mourir, tous finalement victimes de leur hubris et de leurs choix.
Même si la trame principale est The Fall of the House of Usher, chaque épisode mêle astucieusement à sa narration une ou plusieurs oeuvres de Poe et les fans s’amuseront à les décrypter : ses nouvelles (Ligeia et The Premature Burial, The Masque of the Red Death, The Murders in the Rue Morgue, The Black Cat, The Tell-Tale Heart, The Gold-Bug et William Wilson, Bérénice, Morella et The Pit and the Pendulum, The Cask of Amontillado, Hop-Frog, The Purloined Letter, A Descent into the Maelström et The Narrative of Arthur Gordon Pym of Nantucket, Some Words with a Mummy…) ou ses poèmes (The Raven, Annabel Lee, Tamerlane, A dream within a dream, The City in the Sea, Lenore…) pour ne citer que les principales.
Les passages de récitation de certains de ces vers par les personnages de Verna ou Roderick Usher sont absolument magiques. Les noms des personnages sont également des Easter eggs.
Outre ces multiples références à Poe, Mike Flanagan opère des clins d’oeil à d’autres oeuvres gothiques cultes telles que Frankenstein de Mary Shelley ou à l’épisode de la série de Black Mirror Be Right Back qui est elle-même une adaptation moderne d’une idée de Poe.
La construction du récit peut dérouter avec ses multiples flashbacks, mais c’est justement ce qui en fait l’intérêt puisque même si le destin de la famille est connu, il y a des puzzles dans l’intrigue à reconstituer et tout s’imbrique parfaitement à la fin.
La série respecte parfaitement les codes du genre gothique et il n'y a pas de faute de goût : photo, éclairage, paysages, décors, personnages, costumes, couleurs, musique, dialogues parsemés de citations de Poe sont superbes.
Le casting est formidable. On retrouve avec plaisir les acteurs fétiches de Mike Flanagan, en particulier la somptueuse Carla Gugino qui campe une Verna à la fois fascinante et inquiétante, mais également des nouveaux-venus surprises tels que Mark Hammill (incroyable dans ce contre-emploi) ou Mary McDonnell (impeccable en femme forte et sans vergogne et féministe convaincue).
Le seul bémol pour moi est l'inefficacité des “jump scares” qui ne fonctionnent plus pour la plupart car très prévisibles tant ils sont clichés et certaines scènes d’horreur qui étaient plutôt risibles.
Ce bémol n’est évidemment pas suffisant pour vous faire bouder cette série qui nous plonge avec délectation dans l’univers plein de folie et de beauté horrible de Poe.