Me souvenant bien de l'événement réel, j'ai regardé la série. Elle est intéressante, bien filmée, assez juste, m'a-t-il semblé, sur le plan des faits. L'accent est mis sur la famille Oussekine, admirablement représentée et qui provoque une émotion d'autant plus vive que tous les protagonistes jouent sans pathos, avec beaucoup de dignité et de classe. On remarquera que, il y a deux semaines, sortait Varsovie 83 : une affaire d'Etat, film qui relate un fait semblable en Pologne, cinq ans avant l'affaire Oussekine. Semblable ? Pas tout à fait. En Pologne, le jeune homme arrêté et frappé à mort dans un commissariat, était réellement un opposant au régime de Jaruselski et sa mère avait été incarcérée quelque temps dans les semaines précédentes.. Cela n'excuse pas ses tortionnaires, mais il était dans le collimateur de la police d'Etat. Malik Oussekine, lui, n'était qu'un jeune étudiant amateur de jazz, qui sortait d'un cabaret. Il n'était ni un terroriste, ni même politisé. Il était juste un petit gars qui aimait la musique, qui aimait la France (il ne parlait pas arabe et voulait se convertir au catholicisme.) et la vie.. La rue Monsieur-le-Prince était en dehors des manifestations; d'ailleurs, il était minuit quand il y est passé, et les manifs du Quartier latin étaient terminées. Il est tombé sur trois individus, censés être des policiers, en réalité, des tortionnaires assoiffés de sang et pleins de haine envers les Nord-Africains (mais ils étaient tellement ivres de tuer qu'ils auraient peut-être fait la même chose avec un Européen ; il faisait sombre dans l'entrée de l'immeuble et ont-ils vraiment vu celui qu'ils tabassaient à mort? ils n'avaient qu'une envie : frapper, frapper pour ôter la vie à quelqu'un.) Finalement l'affaire Oussekine est plus indigne d'un Etat que l'affaire du jeune étudiant polonais. Et pourtant, en 1983, les partis de droite avaient fortement condamné l'événement varsovien qui leur semblait représenter l'horreur d'un régime totalitaire. Cinq ans plus tard, dans la France démocratique, la même chose, en pire, se produisait.