The Haunting of Hill House est librement adaptée du roman éponyme, publié en 1959, de la romancière américaine Shirley Jackson, spécialiste du récit fantastique et d’horreur. Dans son essai "Anatomie de l’horreur" (1981), Stephen King le cite notamment comme étant l’un des meilleurs romans horrifiques de la fin du XXème siècle. Cette oeuvre a été adaptée par deux fois au cinéma (La Maison du diable en 1963, puis Hantise en 1999) ; ainsi qu’au théâtre (en 1954 par F. Andrew Leslie, puis en 2015 par Anthony Nelson) ; et a également été parodiée dans Scary Movie 2.
Si la série n’est pas l’adaptation directe de l’oeuvre de Shirley Jackson, elle joue sur des effets de mise en abîme, à travers des citations et des clins d’oeil. Le premier épisode s’ouvre notamment avec les quatre premières lignes du roman original, tandis que l’aînée de la famille Crain (Elizabeth Reaser) emprunte son prénom à la romancière. Par ailleurs, Steven Crain, incarné par Michiel Huisman, est le célèbre auteur d’un livre également intitulé "The Haunting of Hill House", dans lequel il relate son enfance.
Avec The Mirror, Pas un bruit, ou encore Ouija: les origines, Mike Flanagan s’est imposé, en quelques années, comme l’un des maîtres de l’horreur au cinéma. The Haunting of Hill House est sa toute première série, sur laquelle il cumule les casquettes de créateur, scénariste, réalisateur, producteur délégué et monteur des dix épisodes. "Je lui tire mon chapeau. (…) Il a perdu presque 20 kilos sur le tournage. (…) Il était en train d’écrire Docteur Sleep en même temps !", confie l’actrice Elizabeth Reaser. L’expérience sérielle semble, en tout cas, avoir plu au prolifique Mike Flanagan, qui a ainsi exploré une approche différente de l’horreur : "En 90 minutes, on peut effrayer le public trois ou quatre fois. Pour un programme de dix heures, les règles changent complètement. Je voulais créer une tension et la faire durer le plus longtemps possible."
Après avoir plébiscité le roman original de Shirley Jackson, le maître de l’horreur, Stephen King s’est enthousiasmé de son adaptation sérielle par Mike Flanagan, comme il l’a fait savoir sur son compte Twitter : "Habituellement, je me désintéresse de ce genre de révisionnisme, mais c’est génial. Proche de l’œuvre de génie, vraiment. Je pense que Shirley Jackson approuverait, mais qui peut véritablement le savoir."
Souhaitant revenir à "une époque où l’horreur avait un but bien plus profond que l’épouvante", Mike Flanagan et son équipe de production ont décidé de mettre l’accent sur des effets prothétiques et pratiques, plutôt que sur des images de synthèse. Un choix apprécié par l’ensemble de la distribution. "Robert Kurtzman, le maquilleur, a fait un super travail pour créer les fantômes. C’était toujours un plaisir de les voir sortir des loges et se dire : ‘C’est incroyable !’.", confirme Kate Siegel. Le recours aux effets spéciaux n’a servi que par mesure de sécurité vis-à-vis des acteurs, lorsque des vitres se brisent par exemple.
Après plusieurs mois de recherches, l’équipe de repérage a déniché la maison parfaite pour incarner Hill House, à environ une heure et demie d’Atlanta, en Georgie. La façade a servi à tous les plans en extérieurs, notamment pour les scènes correspondant à l’emménagement de la famille Crain. Ensuite, la production l’a laissé à l’abandon pendant six ou sept mois, avant de revenir y tourner et capter ainsi l’authenticité de la détérioration. Quant à l’intérieur de cette maison, il a été recréée en studio à Atlanta, quasiment à l’identique. En effet, Mike Flanagan souhaitait réaliser de longs plans en steadicam, ce qui nécessitait de pouvoir démonter ou remonter les murs à l’envie. Le plateau, opérationnel, s’étendait ainsi sur deux étages. "Franchement, j’ai connu des décors immenses dans ma carrière, mais là, c’est clairement le plus gros décor en studio dans lequel je n’ai jamais travaillé !", déclare d’ailleurs Michiel Huisman.
Réaliser un épisode uniquement en plans séquence était un défi que Mike Flanagan rêvait de relever. C’est chose faite avec l’épisode 6, dont le tournage, qui a pris deux matinées, a conditionné l’ensemble de la série, notamment la construction des décors. "Les mouvements de caméra traversent les murs, les plafonds… Il fallait des parois amovibles, faire en sorte que la salle des pompes funèbres soit connectée à la maison hantée par un couloir", explique Kate Siegel. Outre l’aspect technique, les comédiens ont également dû répété la scène à la manière d’une pièce de théâtre, deux semaines en amont du tournage. Un challenge particulièrement excitant selon Michiel Huisman : "Savoir que la prise va durer au moins dix-huit minutes, qu’il sera impossible de s’arrêter, d’envisager un plan de coupe pour masquer une petite erreur, que tout devra être au point, apporte une tension que j’aime bien". Pour le plan d’ouverture, le plus long (23 minutes), le troisième essai fut le bon. Et heureusement, car un souci technique n’aurait pas permis de nouvelle tentative. En effet, à force d’avoir répété la scène, les fibres du tapis se sont prises dans les roues de la Dolly, qui est ensuite tombée en panne.
Suite à l’obtention du rôle de Shirley adulte, Elizabeth Reaser a dû se pencher sur la profession de son personnage : la thanatopraxie. La production lui a notamment envoyé des vidéos d’embaumement. D’abord profondément réticente, l’actrice les a finalement regardé afin de se sentir à l’aise pendant ce type de scènes sur le tournage. Celle-ci a également mené ses propres recherches afin de mieux comprendre le métier. "L'une des choses que j'ai apprises, c'est que certaines personnes aiment vraiment ça et que pour d’autres, c’est en quelque sorte leur façon de donner aux personnes endeuillés leur dernier moment avec le ou la défunt(e), et de faire en sorte que ce moment soit beau. Accorder ce moment à quelqu'un, c'est une chose très importante à laquelle, bien sûr, je n'avais jamais pensé, et que j’ai trouvé très intéressante.", explique-t-elle. Toutefois, malgré sa préparation ainsi que la présence d’une vraie croque-mort sur le plateau (dans le rôle de son assistante), Elizabeth Reaser a confié ne pas toujours avoir été à l’aise : "L’expérience la plus troublante a été de devoir (…) ouvrir une cavité thoracique et d’en retirer des organes. Ca semblait très réel. Les détails des faux cadavres avec lesquels nous travaillions donnaient l’impression de pouvoir sentir la mort."
Outre la lecture du roman original de Shirley Jackson, l’acteur Michiel Huisman s’est également inspiré du documentaire My Amityville Horror. "C’est l’histoire d'un homme qui, enfant, a grandi dans une maison réputée pour être hantée. C’était très intéressant. Cela aborde vraiment la façon dont cela l’a affecté sur le reste de sa vie. Ca a été très utile pour moi de regarder ce documentaire pour comprendre les effets psychologiques que cela peut avoir.", raconte-t-il.
La présence de jeunes enfants sur un plateau apporte son lot de précautions, mais est également agréable, selon l’acteur Oliver Jackson-Cohen : "Le tournage a duré neuf mois. Donc c’était sympa, après une journée de travail où vous avez été confrontés à des choses intenses et dramatiques, de voir ces gamins toujours souriants." Très professionnels, certains d’entre eux sont d’ailleurs des habitués du genre. En effet, Lulu Wilson est apparue dans Ouija: les origines et Annabelle 2, tandis que Mckenna Grace a joué dans Amityville: The Awakening. Au final, ce sont les comédiens adultes qui ont éprouvé le plus d’inquiétudes : "Il y avait cette scène, où je parle avec deux de mes enfants dans leur lit. Ils parlent d’un cauchemar horrible… J’étais tellement inquiète de la tourner avec eux. Durant les répétitions, j’ai vu Michael [Fimognari], un gars plutôt stoïque, avoir les larmes aux yeux. Je me suis dit : ‘Mon dieu, comment allons-nous faire ?’. Pourtant, dès la prise finie, les enfants s’exclamaient : ‘Hey ! Qui veut un chocolat chaud ?’. Ils sont fantastiques.", confie Carla Gugino.