Bon… J’essaye de comprendre… Oui j’essaye de comprendre comment j’ai pu entendre autant d’éloges au sujet de cette série-là. Parce que franchement, après toute cette première saison, j’avoue que je reste… coi. Honnêtement je ne savais pas à quoi m’attendre vu que je ne m’étais pas du tout rencardé à son sujet. Du coup j’ai lancé ça l’esprit ouvert et le cœur curieux. Malheureusement tous les signaux de la série cheap se sont très vite allumés. Et quand je dis ça, je ne parle pas d’effets spéciaux ou de décors. On est sur une série : j’accepte pleinement les restrictions que cela implique. Non, pour le coup le souci vient bien plus des choix formels opérés par cette série et qui trahissent vraiment une approche assez primitive et abêtissante du média. Tous les plans de scènes se situant dans l’espace bougent beaucoup et dans tous les sens. On sent qu’on privilégie la nervosité à la lisibilité ; voire même à la nécessité de rendre lieu des échelles et des inerties. Idem pour les scènes d’intérieur. On ne pose jamais les lieux. On cut et on gigote pour un rien. Les musiques – omniprésentes et interchangeables – s’inscrivent dans la logique : il s’agit de surappuyer en permanence. Ce vice va jusqu’à se retrouver dans la photographie dont l’exposition lumineuse est très agressive et les teintes bleues très exagérées. Formellement, cette série a clairement décidé de tout sacrifier en termes de signifiance et d’élégance au profit d’une agitation permanente et dénuée de sens. C’est comme si elle cherchait à conserver à tout prix notre attention faute d’avoir autre chose à nous offrir que des vaisseaux qui volent et des décors futuristes. Et malheureusement ça n’a pas manqué : effectivement, le seul premier épisode révèle déjà très rapidement le manque cruel de fond et de savoir-faire narratif de cette série. 45 minutes consacrées à quoi ? A bien tout prendre : surtout à de l’exposition. Exposition de lieu. Exposition de personnages. Exposition de situations. « Quoi de plus normal pour un épisode d’introduction » me diriez-vous. Certes. Seulement comment se fait-il que la seule chose que je retienne de sept longues minutes de présentation du personnage de Miller soit réduite à seulement trois pauvres informations ? C’est un flic bagarreur, il est habitué des sales quartiers et des sales besognes, et il occupe une position délicate en tant que natif de Cérès qui bosse au service de « l’ennemi » terrien. Franchement, il y avait vraiment besoin de sept minutes pour un personnage aussi archétypal ? On le connait tous ce Miller ! On l’a déjà vu 20 milliards de fois dans tous les films de genre et de séries B ! Même chose pour le personnage du bellâtre cœur-tendre qu’est Holden ! Onze minutes d’exposition le concernant ! (Oui j’ai vérifié.) Non mais vous êtes sérieux ??? Onze minutes juste pour nous dire : « Ah je suis un cœur tendre et je suis amoureux de la belle Ade ! Oh Ade ! Je pense à tout raccrocher pour qu’on puisse vivre notre bel amour sincère loin de la folie des hommes… » …Non mais vous le voyez venir le truc qui va arriver là ou pas ?
Bah ouais ! Elle va crever la cocotte ! Et tout ça seulement pour essayer de nous faire entrer en empathie avec ce bon vieux personnage transparent de Holden ! Eh ouais ! C’est aussi primitif que ça !
Et le problème c’est que c’est là-dessus que la série s’attarde. En permanence. D’épisode en épisode, ces personnages ne cessent de gigoter et de jacasser afin qu’on finisse par s’attacher à eux. On enchaîne les anecdotes, les backstories, les moments de colère et de doute afin de leur donner de l’épaisseur. Mais l’absence critique d’imagination et – osons le dire – de talent des scénaristes transforme cette accumulation en un pensum totalement factice qu’il est assez difficile à digérer. Drôle de stratégie pour une série qui semble visiblement surtout miser sur son univers SF. Mais bon, le problème c’est que l’intrigue n’étant pas très riche, il faut occuper le temps comme on peut. Parce qu’oui, à bien tout prendre, dans toute cette première saison, il ne se passe quand même pas grand-chose. La situation est au fond assez statique. Plus de la moitié des épisodes font du surplace, à tel point que Miller doit passer une bonne demi-douzaine de fois dans l’appartement de Julie, suivies par autant de discussions (répétitives et stériles) avec Anderson Dawes, pendant qu’à quelques flopées de klics de là, Holden et ses copains tournent en rond, allant d’un vaisseau à un autre, peinant même parfois à en justifier la raison. Le pire, c’est que malgré la sécheresse assez déprimante de cette saison en termes d’intrigue, il m’arrivait parfois d’être perdu. « Mais attends… Pourquoi ils vont voir Johnson au fait ? …Euh et c’est quoi sinon leur mission sur Eros ? …Et attends… D’où il la tire cette information déjà ? » Plus d’une fois, il m’a fallu revenir en arrière pour saisir ce que j’avais loupé. Et surtout comprendre pourquoi je l’avais loupé ! Et – là encore – la faute revient à l’écriture. Cette série passe tellement de temps à faire parler ses personnages pour ne rien dire – juste pour essayer de leur donner de l’épaisseur ! – qu’au final je n’accordais plus d’importance à ce qu’ils racontaient. Surtout qu’il n’y a aucune différence de traitement formel entre les révélations-clefs et les bullshiteries jetables. Tout ça sort un peu en random, parfois au cours d’une marche, d’autre fois par un simple coup de fil d’allure insignifiante au milieu d’une conversation. En plus l’enchâssement de l’intrigue est fait de telle manière à ce qu’on ne se souvienne plus vraiment d’où vient l’information, du coup je me suis souvent retrouvé à me dire : « Mais attends… On parle de quoi là ? C’est quoi ce vaisseau Anubis dont on ne m’a jamais parlé ? D’où il tire ce plan de vol ? Ah oui ça vient peut-être la carte qu’il a tirée du cadavre qu’il a récupéré… Mais d’ailleurs… Il le sort d’où son cadavre au fait ? Comment il est tombé dessus ? D’où qu’il a fait le lien avec son affaire ? Rolalah… Non mais… Pfff… » Et ce « pfff » malheureusement, je l’ai utilisé pour beaucoup de choses. Je l’ai utilisé à chaque fois que j’ai vu Naomi résoudre un problème grâce à une nouvelle compétence qu’on ne lui connaissait pas. Je l’ai utilisé à chaque fois que Holden disait « il faut qu’on se dépêche car sinon on va crever… Mais attendons un peu, car il faut que je te raconte un truc sur mon passé… » Je l’ai utilisé à chaque fois que je voyais Miller cracher ses boyaux parce qu’il avait été dangereusement irradié mais qui, dans la seconde qui suivait, pouvait marcher, tirer et déblatérer sans souci. D’ailleurs, dans les faits, je l’ai utilisé à chaque fois que je voyais Miller parce que – franchement – c’est quand même incroyable de jouer aussi mal ! Ah mais non ! Décidément – quelque-soit le secteur – cette série ne fonctionne pas ! Alors oui, du coup, forcément, je cherche à comprendre… Comprendre pourquoi cet engouement autour de « The Expanse » ? …Parce que c’est de la « hard SF » comme j’ai pu lire parfois ? Parce qu’il y a une intrigue politique ? Parce que les effets spéciaux sont bien fichus ? Franchement, ce sont des arguments que je n’arrive pas à assimiler. Sur tous ces domaines cette série me parait tellement limitée. Alors pourquoi dans ce cas ? …A dire vrai, il ne faut pas lire des masses de critiques pour voir un modèle se dessiner parmi les adorateurs de cette série. Deux mots reviennent très souvent. Ces mots, c’est « Battlestar » et « Galactica ». Ah ça ! On la cite souvent la série de Ronald D. Moore. Et on sent que beaucoup d’adorateurs d’épopées spatiales se sentent depuis orphelins depuis la fin de cette saga en 2009… Ces adorateurs étaient tristes. Ils voulaient retourner dans l’espace. A n’importe quel prix… Ce « The Expanse » leur en a donné l’occasion. Ça les a rendus contents. Moi, en tout cas je ne vois pas d’autre explication. Parce qu’oser parler de hard SF pour ça ? Non mais franchement ! Parce qu’il y a des scènes en apesanteur, même si cette pesanteur, c’est un peu quand ça arrange la série ? (Faudra qu’on m’explique notamment comment ça se fait qu’il y ait de la pesanteur sur Eros vu le petit caillou que c’est, mais bon) Parce qu’il y a de la géopolitique ? Une géopolitique qui se met en stand-by dès l’épisode 3 et qui ne bougera plus jusqu’à l’épisode final ? Non mais franchement non ! Je peux entendre qu’il y en a qui soit en manque – de même que je peux entendre aussi qu’il y a des gens comme le Joueur du grenier qui veulent qu’on reste très terre-à-terre dans une série sur l’espace – il n’empêche qu’il faut savoir raison garder. Je peux comprendre le plaisir coupable d’un nouvel univers spatial – j’y ai moi-même été sensible d’où ma note au final très conciliante – mais il ne s’agirait pas de tout mélanger non plus ! Alors après, l’ami Fred Molas reconnait qu’il a lui aussi galéré sur la première saison mais que le reste « casse tout ». Alors bon. Me risquerai-je à donner une chance supplémentaire à cette série ? Eh bah l’avenir nous le dira parce que, pour le moment, j’ai envie que l’expansion s’arrête là…Mais bon… Après, ça ne reste que mon point de vue. Donc si vous n’êtes pas d’accord et que vous voulez qu’on en discute, n’hésitez pas et venez me retrouver sur lhommegrenouille.over-blog.com. Parce que le débat, moi j’aime ça… ;-)