Né à Paris, Roman Polanski a pourtant passé son enfance en Pologne. Echappé du ghetto de Cracovie, il perd sa mère dans les camps et ne reverra son père qu'après la guerre. Ce traumatisme et le manque d'affection marquera toute son oeuvre.
Dans les années 50, Roman Polanski tourne dans plusieurs films et entre à l'école de cinéma de Lodz, où il réalise plusieurs courts métrages. En 1962, il réalise son premier long, Le Couteau dans l'eau. Nommé à l'Oscar du Meilleur film étranger, le film permet au jeune cinéaste de partir en Angleterre où il réalise, entre autres, le thriller Repulsion (Ours d'argent à Berlin), l'étrange Cul-de-sac (Ours d'Or à Berlin) et la comédie d'horreur Le Bal des vampires.
Ces succès critiques et commerciaux lui permettent de réaliser son premier film hollywoodien en 1968, le thriller fantastique Rosemary's Baby. L'année suivante, sa femme, Sharon Tate, est assassinée par le tueur en série Charles Manson. Il revient alors en Europe pour tourner le très violent Macbeth. Mais c'est en 1974 qu'il obtient son plus grand succès public et critique avec Chinatown, qui reçoit 11 nominations aux Oscars.
En 1977, une condamnation pour le viol d'une adolescente de 13 ans le conduit à fuir les Etats-Unis pour éviter la prison. Roman Polanski réalise alors le mélodrame Tess (nommé 6 fois aux Oscars) en hommage à sa femme. Dans les années 80 et 90, il alterne des films commerciaux comme Pirates et La Neuvieme Porte et des films plus intimistes comme La Jeune Fille et la Mort, sans connaître le succès rencontré dans les années 60/70.
Roman Polanski renoue avec le succès en 2002 grâce au Pianiste, film au sujet plus personnel, celui de l'occupation de la Pologne et du ghetto de Varsovie pendant la Seconde Guerre mondiale. Le film lui vaut la Palme d'Or à Cannes. Trois ans plus tard, il réalise Oliver Twist, adaptation du classique de Charles Dickens. Après une longue parenthèse, Polanski revient en 2010 avec le thriller The Ghost Writer, emmené par Ewan McGregor et Pierce Brosnan, qui sort en salles alors qu'il est assigné à résidence dans son chalet suisse, du fait de ses problèmes avec la justice.
Fin septembre 2009, le cinéaste est en effet arrêté sur mandat d'arrêt américain dans l'affaire, vieille de plus de trente ans, de sa condamnation pour viol. Il passe deux mois en prison, et est ensuite encore une fois assigné à résidence en attendant une décision de la justice américaine. En juillet 2010, les États-Unis émettent une demande d'extradition du cinéaste, mais cette décision est refusée par la Suisse, qui le déclare libre à l'intérieur de son territoire. La même autorisation se produira en sol français.
Ainsi, c'est en France que Polanski voit la pièce Le Dieu du Carnage, de Yasmina Reza, qu'il décide assez rapidement d'adapter au cinéma, avec la dramaturge en co-scénariste. Le huit clos comique et caustique entre quatre adultes bourgeois est rebaptisé Carnage, et se dote d'un casting quatre étoiles : Kate Winslet, Jodie Foster, Christoph Waltz et John C. Reilly. Le film présenté en sélection officielle au festival de New York, est récompensé lors de celui de Venise où il obtient un petit Lion d'Or. Surtout, il rapporte au cinéaste un César de la meilleure adaptation en 2012.
Roman Polanski ne reste pas longtemps inactif. Alors qu'il est à Cannes pour la présentation de Tess en version restaurée, le cinéaste hérite du manuscrit de La Vénus à la fourrure écrit par David Ives et qui triomphe à Broadway. Le coup de foudre est immédiat pour cette histoire d'un metteur en scène recherchant désespérément la comédienne de sa future pièce. En compagnie d'Ives, il réécrit la pièce et l'adapte au langage cinématographique, porté par Mathieu Amalric et sa femme Emmanuelle Seigner.
Après l'échec tant critique que commercial du thriller psychologique D'après une histoire vraie, Roman Polanski s'attaque à un projet des plus ambitieux : J'accuse, centré sur la tristement célèbre affaire Dreyfus. Le long métrage, qui lorgne davantage du côté du thriller d'espionnage que du film en costumes, est emmené par Jean Dujardin dans le rôle de Picquart, lequel tente de prouver l'innocence de Dreyfus, joué quant à lui par Louis Garrel.
La sortie du film est accompagnée d'une nouvelle accusation d'agression sexuelle concernant le metteur en scène : Valentine Monnier, une photographe française, affirme avoir été violée par lui en 1975. Via son avocat, Roman Polanski nie ces accusations. Ce nouveau témoignage intervient moins de deux ans après le classement sans suite d'une plainte pour viol sur mineure pour des faits qui se seraient également déroulés en 1975. Depuis 2009, et les suites de l'affaire Samantha Geimer, Polanski fait régulièrement la Une de la rubrique judiciaire pour des affaires de moeurs.
Suite à cette nouvelle accusation, la promotion de J'accuse est fortement chahutée : plusieurs avant-premières sont ainsi annulées par les actions de militantes féministes. Cela étant, le film est nominé dans douze catégories aux César 2020, placés sous le signe du malaise suite aux révélations d'Adèle Haenel en novembre 2019, et en remporte trois, dont celui du meilleur réalisateur. Une récompense qui aggrave la polémique et provoque, dans la foulée, le départ de la comédienne et de Céline Sciamma (nominée pour la mise en scène de Portrait de la jeune fille en feu) de la salle Pleyel.