Graphiste, illustrateur d'ouvrages de luxe, assistant du sculpteur Rodin et du peintre Puvis de Chavannes... Maurice Tourneur, de son vrai nom Maurice Thomas, aura exercé toutes ces fonctions avant de se tourner vers le théâtre, sa première véritable passion. Il se produit alors sur scène, consécutivement avec la comédienne Réjane dès 1901 et au sein de la compagnie d'André Antoine de 1903 à 1909. Le cinéma ne tarde pas à l'attirer, raison pour laquelle il se lance sous l'égide de la firme Éclair dans la réalisation dès 1912 (Figures de cire, Les Gaîtés de l'escadron, Fille de pirates...).
Envoyé aux Etats-Unis par la même compagnie cinématographique, Maurice Tourneur s'y montre très prolifique (Une pauvre petite fille riche, L'Oiseau bleu, Victory...), devenant bientôt l'égal d'un Cecil B. DeMille ou d'un D.W. Griffith. Cet esthète, à qui l'on doit entre autres une adaptation de L'Ile au trésor de Robert Stevenson ou Le Dernier des Mohicans, se voit contraint en 1926 de mettre fin à son épopée américaine. Et ceci en raison d'un désaccord artistique profond avec Irving Thalberg, l'un des dirigeants de la MGM, pour qui il tourne L'Ile mystérieuse, film dont il finira par abandonner la réalisation.
De retour en France pour diriger L'Equipage d'après l'oeuvre de Joseph Kessel, Maurice Tourneur doit faire face à une virulente campagne de dénigrement. On lui reproche en effet de ne pas avoir participé de manière active à la Première Guerre mondiale. Il se réfugie alors en Allemagne où il met en scène Marlene Dietrich dans Le Navire des hommes perdus.
L'avènement du parlant l'amène à exercer son esprit critique à travers des films noirs tels que Accusée, levez-vous ! (1930), un drame judiciaire interprété par Gaby Morlay et Charles Vanel, Au nom de la loi (1932), un polar sur fond de trafic de drogue, ou encore Justin de Marseille (1934), peinture du milieu marseillais. Dans d'autres registres, Maurice Tourneur signe le mélodrame Les Deux orphelines (1933), Le Patriote (1938) et Katia (id.), deux récits historiques ayant pour cadre la Russie tsariste, une nouvelle adaptation de la pièce Volpone (1941), ainsi que le long métrage fantastique La Main du diable (1943) avec Pierre Fresnay.
Interprété en 1948 par Simone Signoret et Paul Meurisse, Impasse des deux anges, sur les amours d'une ancienne actrice avec un cambrioleur, est sa dernière réalisation. En effet, l'année suivante, un grave accident de voiture le laisse paraplégique. Maurice Tourneur se consacre alors à la traduction et à l'écriture de romans policiers. Activité qu'il pratiquera jusqu'à son décès en 1961.