Fils du rédacteur en chef d'un magazine de mode et d'une mère dessinatrice pour journaux féminins, Alexandre Astruc est un élève doué pour les mathématiques mais rêve de devenir romancier ou écrivain. Etudiant en droit, il se voit proposer en 1942 par l'écrivain Jean Lescure de collaborer à la revue poétique Messages. Proche des auteurs de la NRF, il fréquente Sartre, Camus, Queneau et le Saint-Germain-des-Près bouillonnant d'après-guerre.
Défenseur du cinéma hollywoodien dans L'Ecran français, critique dans Combat ou plus tard Les Cahiers du Cinéma, il signe en 1948 un texte autour du concept de "caméra-stylo", qui exercera une grande influence sur les cinéastes de la Nouvelle Vague. "Je pensais que, dans les années à venir, non seulement les scénaristes feraient leur films eux-mêmes, sans passer par l'intermédiaire d'un metteur en scène, mais aussi et surtout que désormais aucun domaine n'était interdit au cinéma, pas plus la réflexion philosophique que la méditation la plus abstraite." (1)
Pressé de passer de la théorie à la pratique, il écrit aux cinéastes qu'il admire (Jean Renoir, Jacques Becker), devient l'assistant de Marc Allégret ou Marcel Achard et travaille comme scénariste ("La Putain Respectueuse"). Il s'essaie à la mise en scène avec "Aller et retour" grâce au producteur Pierre Braunberger, mais le premier film qu'il revendique est Le Rideau cramoisi, d'après Barbey D'Aurevilly. Récit d'un amour tragique en huis clos, le film remporte le Louis-Delluc en 1952. Les deux héros du film, Anouk Aimée et Jean-Claude Pascal, seront aussi au générique de son premier long métrage primé à Venise, Les Mauvaises Rencontres (1955) qui confirme son goût pour le lyrisme et l'étude psychologique.
Trop esthète pour obtenir de grands succès commerciaux, Alexandre Astruc semble se spécialiser dans les adaptations littéraires : il tourne Une vie (1958) avec Maria Schell, puis L'Education sentimentale (1962), co-écrit par Roger Nimier avec Jean-Claude Brialy. Il collabore égalemant avec Françoise Sagan sur La Proie pour l'ombre. Toujours féru de mathématiques, il signe un court métrage consacré à Evariste Galois, primé à Cannes en 1965. La guerre est le cadre de ses deux derniers longs métrages, La Longue Marche (1966), film sur la Résistance avec Maurice Ronet et Jean-Louis Trintignant, puis Flammes sur l'Adriatique en 1968. En dehors de ses activités d'écrivain, et d'une collaboration au scénario des Âmes fortes en 2000, il se consacre ensuite au petit écran, réalisant des émissions sur Proust, Borges ou Murnau, et des adaptations de Balzac ou Edgar Poe. Lauréat du Prix René-Clair de l'Académie-Française en 1984, il reçoit le Prix France Culture Cinéma Consécration en 2011.
(1) Alexandre Astruc, Le Montreur d'ombres, Bartillat, 1996