Serge Reggiani voit le jour en 1922 dans le Nord de l'Italie, mais sa famille fuit bientôt le régime fasciste et arrive en France en 1931. Attiré très tôt par le cinéma, Reggiani monte à Paris et obtient le Premier prix de comédie au Conservatoire des arts cinématographiques en 1937. Jean Cocteau le remarque, et lui offre un rôle dans sa pièce Les Enfants terribles.
En 1938, Serge Reggiani apparaît pour la première fois sur grand écran, mais non crédité au générique, dans Les Disparus de Saint-Agil de Christian-Jaque. Il obtient un joli succès en jeune premier dans Le Carrefour des enfants perdus en 1944, mais c'est dans Les Portes de la nuit, de Marcel Carné quatre ans plus tard, qu'il trouve son premier rôle marquant, celui d'un homme veule, un emploi dans lequel il s'illustre souvent au début de sa carrière (Manon de Clouzot). C'est alors que Serge Reggiani devient un acteur de premier plan grâce à ses rôles de héros romantique dans Les Amants de Verone, film à succès de Cayatte avec Anouk Aimée, et surtout Casque d'or de Jacques Becker. Il y incarne avec panache un ouvrier au sang chaud, fou amoureux de Simone Signoret, et qui connaîtra au destin tragique.
La carrière cinématographique de Serge Reggiani se partage dès lors entre la France et l'Italie, le pays dont il est originaire. Jean-Pierre Melville insiste pour faire tourner cet acteur aux allures d'ours mal léché dans Le Doulos en 1962 - il fera de nouveau appel à l'homme engagé pour L' Armee des ombres, un film sur la Résistance qui marque les retrouvailles du comédien avec Signoret. S'il apparaît en 1963 dans Le Guépard de Visconti et triomphe à la même époque au théâtre dans Les Séquestrés d'Altona de Sartre, les années 60 marquent surtout les débuts fracassants de Serge Reggiani dans la chanson, grâce au "découvreur" Jacques Canetti. Remarqué par Brel et Barbara, il connaît un grand succès en 1967 avec son deuxième album, sur lequel figurent notamment Les loups sont entrés dans Paris et sa version du Déserteur de Vian.
Vedette de music-hall - avec des succès comme Sarah, Il suffirait de presque rien, Le Barbier de Belleville ou encore L'Italien - Serge Reggiani ne délaisse pas pour autant le Septième art. Il est Paul le journaliste, l'un des quinquagénaires de Vincent, François, Paul et les autres, photographie de la France des années 70 et succès de Sautet (avec au scénario Jean-Loup Dabadie, un de ses auteurs de chanson fétiches, avec Moustaki) et tourne trois films avec un autre cinéaste très populaire, Claude Lelouch (notamment Le Chat et la souris avec Michèle Morgan). Dans les années 80, il est à l'affiche d'un nouveau portrait de groupe nostalgique (La Terrasse de Scola, dans lequel il a pour partenaire un autre émouvant gentleman, Marcello Mastroianni, qu'il retrouvera dans L' Apiculteur d'Angelopoulos.
Mais, très éprouvé par le suicide de son fils Stephan, également musicien, en 1980, Serge Reggiani se fera plus rare sur scène comme sur les plateaux de cinéma. Il participera néanmoins à des projets audacieux, tels que Mauvais sang de Carax ou J'ai engage un tueur du Finlandais pince-sans-rire Aki Kaurismäki. Se consacrant à d'autres formes d'expression artistique, comme la peinture, il tourne sous la direction de son fils Simon, un film aux accents autobiographiques, De force avec d'autres en 1992. A plus de soixante-dix ans, il continue d'enregistrer des disques et de donner des récitals - son dernier album, paru en 2000, s'intitule Enfants, soyez meilleurs que nous - et apparaît une dernière fois au cinéma en 1997 dans Héroïnes.