Les avis divergent quant à sa date de naissance : certains avancent le 27 avril 1962, d'autres le 22 janvier. Quoi qu'il en soit, la carrière de Choi Min-sik aurait pu ne jamais voir le jour : alors qu'il n'est encore qu'en primaire, on lui diagnostique une tuberculose. Les médecins ne peuvent rien pour lui. Pourtant, l'enfant survivra après un séjour prolongé au fin fond des montagnes coréennes pour recouvrer ses forces et purifier ses poumons.
Après avoir été diplômé de l'université de Dongguk, le comédien se fait d'abord connaître sur les planches, avant de rencontrer un premier succès cinématographique avec Our Twisted Hero (1992), de Park Jong-won. C'est avec ce réalisateur qu'il était auparavant apparu sur le grand écran, en 1989, dans Kuro Arirang. Sa carrière des années 90 oscille entre la continuité de son parcours théâtral et ses apparitions dans plusieurs séries et dramas coréens. Il obtient ses premiers rôles principaux à la fin de la décennie, dans The Quiet Family (1998), de Kim Jee-woon et Shiri (1999), de Kang Je-kyu, incarnant des personnages de policier peu scrupuleux et d'agent double. Ce dernier film le fait largement remarquer du fait qu'il est souvent considéré comme le premier blockbuster coréen.
Cette même année, il apparaît enfin en tête d'affiche, dans Happy End, de Jung Ji-woo, dans lequel il interprète un mari trompé découvrant l'infidélité de sa femme. Il partage la vedette avec Cecilia Cheung dans Failan (2001), mélodrame de Song Hye-sung depuis devenu culte en Corée et qui valut à l'acteur plusieurs prix, notamment au Blue Dragon et Festival du film asiatique de Deauville. Mais c'est dans Ivre de femmes et de peinture (2002), fresque historique d'Im Kwon-taek, qu'il joue son premier rôle d'envergure, incarnant un peintre reconnu mais d'origine roturière dans la Corée de la fin du XIXème siècle.
Il est finalement applaudi d'un plus large public, tout aussi bien occidental qu'asiatique, dans le film culte Old Boy (2003), de Park Chan-wook, notamment grâce à son jeu tout en contenance et à la scène improvisée de la bagarre au marteau. L'acteur diversifie encore ses rôles, jouant un professeur de trompette en 2004 dans Springtime, de Ryoo Jang-ha, puis un boxeur en 2005 dans Crying Fist. Il revient travailler pour Park Chan-wook cette même année dans le deuxième film de sa trilogie vengeresse, intitulé Lady Vengeance et dans lequel l'acteur retrouve les comédiennes Kang Hye-jeong et Yun Jin-seo avec qui il avait déjà joué dans Oldboy.
Accusé avec Song Kang-ho en 2005 de fraude professionnelle par le réalisateur et directeur du département cinéma du gouvernement coréen, Kang Woo-suk, l'acteur se lance l'année suivante dans un combat pour l'industrie cinématographique coréenne. Avec d'autres professionnels du cinéma, il manifeste à Séoul et au Festival de Cannes contre la décision de l'administration sud-coréenne de réduire les quotas coréens à l'écran à partir de 146 à 73 jours dans le cadre de l'Accord de libre-échange avec les États- Unis. En signe de protestation, il refuse la prestigieuse médaille Okgwan du mérite culturel.
Au cours des quatre années qui suivent, il s'exile volontairement de la profession du fait de sa protestation contre les quotas à l'écran, mais aussi en raison de la réticence des studios à embaucher un acteur politiquement actif. Il retourne à la place à ses racines théâtrales, et revient finalement au cinéma fin 2008, dans Destination Himalaya, puis en 2010 dans J'ai rencontré le diable, sa deuxième incarnation dans un film de Kim Jee-woon, ici en tueur ultra-violent. Ses apparitions se font alors plus rares et souvent controversées, jusqu'à ce qu'il accepte de jouer dans son premier film occidental en anglais, Lucy, réalisé par Luc Besson en 2014.
Claire Lefranc