En réalisant La Liste de Schindler, le cinéaste Steven Spielberg offrait au Septième Art et au monde entier, la vision la plus noire, la plus violente, la plus réaliste et la plus poignante possible de la Shoah pour montrer ce qui fut la période la plus sombre de l’Histoire de l’humanité. Véritable monument cinématographique, La Liste de Schindler est bien plus qu’un chef-d’œuvre intemporel, c’est un film qui contribue au devoir de mémoire pour ne pas oublier ce qui s’est passé lors de ce deuxième conflit mondial où les nazis se déchaînèrent sur le peuple juif. Oskar Schindler, fils d’industriel d’origine autrichienne, arrive en Pologne durant l’automne 1939 dans la ville de Cracovie tombée sous le joug du IIIème Reich allemand. Membre du parti nazi, habile manipulateur et grand séducteur, il rachète pour une bouchée de pain une fabrique d’articles de cuisine qu’il met au service de l’armée allemande. Sur les conseils de son comptable, Itzhak Stern, il se met à recruter des travailleurs juifs car étant une main d’œuvre peu chère. Mais témoins des actes barbares commis sur le peuple juif par les nazis, Oskar Schindler va, durant toute la durée de la guerre, protéger ses travailleurs en continuant à les employer dans sa fabrique et ce jusqu’à la fin de la guerre où il sauva plus de 1100 juifs polonais des camps d’extermination. Sorti en 1993 aux Etats-Unis et le 2 mars 1994 en France, La Liste de Schindler fut ce que l’on peut appeler une claque cinématographique et aussi la consécration définitive pour Steven Spielberg, qui était déjà un cinéaste reconnu et acclamé par la critique. Inspiré du roman homonyme de Thomas Keneally paru en 1982, Steven Spielberg livre ce qui est sans doute son œuvre la plus personnelle et la plus noire, avant tout faite pour ne pas oublier cette terrible page de l’Histoire et se souvenir des six millions de juifs massacrés par les nazis durant la Seconde Guerre mondiale. Acclamé dans le monde entier à sa sortie, le film connu tout de même quelques rejets et controverses notamment de la part de Claude Lanzmann, le réalisateur du documentaire Shoah en 1985, qui a été le fruit d’un travail documentaire et de collecte de témoignages colossal, dénonce La Liste de Schindler comme une transgression car traitant d’un sujet grave qu’est celui de l’Holocauste sous la forme d’une fiction. Hormis ces quelques critiques, le film de Steven Spielberg mit tout le monde à genou et remporta par la suite de multiples récompenses prestigieuses dont sept Oscars avec notamment ceux du Meilleur film, Meilleur réalisateur pour Steven Spielberg, Meilleur scénario adapté pour Steven Zaillian et Meilleure musique pour John Williams. Pour faire simple ce film a profondément marqué le monde du cinéma. Et lorsque j’ai découvert ce film pour la première fois, je devais être en classe de 3ème ou 4ème, je l’ai tout de suite aimé car captivé par cette tragique et magnifique histoire qui m’a aussi bouleversé. Jamais je n’avais vus un film sur la Shoah et je pense que La Liste de Schindler et Le Pianiste de Roman Polanski, sont les plus grands films à traiter avec puissance, réalisme et émotion du génocide du peuple juif au cinéma. Parfois terrible et parfois émouvant, La Liste de Schindler nous entraîne pendant trois heures dans la vie de cet homme fascinant que fut Oskar Schindler, né en 1908 et décédé en 1974 à l’âge de 66 ans, qui sauva 1100 juifs des camps de la mort. Le film décrit avec détail la psychologie de cet homme qui au départ ne pensait qu’à faire de l’argent et produisant beaucoup grâce à une main d’œuvre pas chère qu’était les travailleurs juifs de l’époque. Mais ensuite nous assistons à un changement moral de cet homme qui va se transformer en humaniste en prenant parti pour ce peuple persécuté par les nazis. Steven Spielberg montre en Schindler un grand humaniste, ce que certains lui reproche un peu car ayant été au départ un homme d’affaire profitant de la situation de guerre pour s’enrichir. Mais peu importe, pour moi Steven Spielberg rend hommage à cet homme courageux et humaniste qu’était Oskar Schindler et ce jusqu’à la toute fin de son film où les acteurs du film accompagnés des véritables survivants qu’ils incarnent à l’écran, déposent des pierres sur la tombe d’Oskar Schindler, enterré au cimetière chrétien du mont Sion à Jérusalem. En racontant l’histoire de cet industriel allemand, Steven Spielberg en profite pour montrer toute l’horreur du génocide : des insultes faites aux juifs jusqu’aux chambres à gaz. Lors de scènes particulièrement violentes et insoutenables, Steven Spielberg n’hésite pas à montrer des corps mutilés, incinérés dans des bûchers, des violences physiques faites aux femmes, des meurtres de sang-froid d’adultes et même d’enfants, une scène de chambre à gaz terrible et qui montre le sommet de la violence que les nazis ont fait preuve pendant la Seconde Guerre mondiale. Et à chaque fois que je vois ce film je me demande comment on a pu en arriver là, à massacrer un peuple entier pour des motifs racistes et antisémites … le monde avait perdu toute humanité à cette époque. Mais pas toute car celle-ci était encore présente chez certaines personnes telles qu’Oskar Schindler qui a réussi à sauver plus de 1100 juifs. Ce grand personnage est montré dans toute son émotion par Steven Spielberg qui lors de la scène la plus poignante du film où Schindler doit fuir avec sa femme car la guerre étant terminé, fond en larme devant ses ouvriers, tous reconnaissant à vie de ce qu’il a fait pour eux : « J’aurais pu en sauver plus ! », cette phrase vous reste en travers de la gorge et l’émotion qui se dégage de cette scène est d’une telle puissance qu’il est difficile de ne pas avoir les larmes aux yeux, surtout sous la somptueuse musique de John Williams, l’une des plus belles partitions que j’ai jamais entendu, intimiste, forte et qui vous donne des frissons. Impossible de ne pas être ému devant cette scène et devant tout le film en général. La Liste de Schindler est peut-être le meilleur film de Steven Spielberg car il s’agit de son œuvre la plus personnelle, le réalisateur s’est investi corps et âme dans cette contribution à la mémoire des survivants de la Shoah et de ceux qui aidèrent des juifs à éviter les camps d’extermination. Il ne fait aucun doute que nous avons là le film le plus sombre et violent de la filmographie de Spielberg qui livre sa face la plus noire. Et c’est là qu’on voit que c’est un grand cinéaste, il n’est pas qu’un simple réalisateur de blockbusters comme Jurassic Park ou la saga Indiana Jones, il est un vrai metteur en scène qui sait réaliser des films adultes et humains comme c’est le cas avec La Liste de Schindler. De plus ce qui accentue cette noirceur, c’est ce somptueux noir et blanc qui fait de ce film une œuvre quasi documentaire notamment lors des scènes filmées en caméra à l’épaule pour pousser à l’extrême le réalisme. Certains plans sur les visages des acteurs sont sublimes grâce à une lumière blanche magnifique et des ombres qui cachent des parties du visage des comédiens. Vous voyez, en plus de porter un regard puissant sur la Shoah, le film de Steven Spielberg est aussi un film très esthétique, notamment avec la petite fille en manteau rouge qui pourrait représenter l’attachement de Schindler au peuple juif, et est aussi brillamment réalisé, comme c’est le cas avec tous les films du réalisateur d’ailleurs. Mais si La Liste de Schindler reste un chef-d’œuvre monument du cinéma c’est bien grâce à ses acteurs, tous exceptionnels dans leur rôle. A commencer par un bouleversant Liam Neeson dans le rôle d’Oskar Schindler, son plus grand rôle au cinéma à ce jour, personne ne dira le contraire. Déjà impressionnant par sa taille, Liam Neeson impressionne encore plus dans son jeu d’acteur en livrant une prestation pleine de charisme et de talent qui permet au film de gagner en intensité émotionnelle, sa dernière scène du film où il quitte ses ouvriers est sa plus poignante. Mais ce qui me révolte un peu c’est que Liam Neeson fut nommé à l’Oscar du Meilleur acteur pour son rôle mais ne fut pas retenu par l’Académie, préférant recompenser Tom Hanks dans Philadelphia, la seule récompense qui manquait à La Liste de Schindler c’était bien elle, tout comme celle qu’aurait pu avoir Ralph Fiennes en tant que Meilleur second rôle masculin. En effet, quand on évoque le film de Steven Spielberg, impossible de ne pas citer Ralph Fiennes dans le rôle du commandant SS Amon Göth, militaire sadique et terrifiant, qui prend plaisir à tuer de pauvres innocents. Brillamment interprété par Ralph Fiennes qui est sans aucun doute dans un de ses meilleurs rôles, ce personnage de commandant SS est un des plus détestables « méchant du cinéma » jamais vu. Et enfin l’acteur qui livre une autre inoubliable prestation, c’est Ben Kingsley dans le rôle du comptable Itzhak Stern, ami proche d’Oskar Schindler. Emouvant et attachant, cet homme superbement interprété par Kingsley définit de la manière la plus simple ce qui l’a sauvé lui et les 1100 juifs de Schindler, la liste : « Cette liste c’est la vie » dit-il et montre ainsi la grande valeur de ce document désormais historique. Et pour montrer à quel point ce film est une contribution à la mémoire, il faut savoir que Steven Spielberg, grâce au succès du film, créa en 1994 la Fondation de l’Histoire Visuelle des Survivants de la Shoah, une organisation à but non-lucratif ayant pour fonction de rassembler des archives de témoignages filmés des survivants de l’Holocauste, et de préserver leur histoire pour assurer la pérennité de la mémoire collective. Voilà, La Liste de Schindler est donc un chef-d’œuvre du cinéma, que je classe parmi mes films préférés et en deuxième position. C’est un film inoubliable car rendant hommage à Oskar Schindler et aux survivants de la Shoah, et si aujourd’hui encore on continue de se souvenir de cette page sombre de l’Histoire, ce film y est pour quelque chose et devrait être montré à tous les élèves en âge de comprendre ce qu’il s’est passé pour ne jamais oublier. La Liste de Schindler est un film à voir au moins une fois dans sa vie. Je terminerais cette critique en citant la maxime tirée du Talmud et gravée sur l’anneau offert à Schindler à la fin du film par les 1100 survivants : « Celui qui sauve une vie sauve le monde entier ».