Je n'ai jamais été très attiré par le cinéma de Godard, n'ayant d'ailleurs vu que « Pierrot le Fou », à qui je reconnais de belle qualités tout en n'y étant qu'à moitié sensible. Pourtant, j'ai failli m'emballer pour cette « Bande à part ». Parfaite incarnation de la Nouvelle Vague, l'œuvre fait preuve d'une audace presque constante, transformant une banale histoire de vol en « trio amoureux existentiel » où le cambriolage est relégué au second plan, sans doute trop. Des scènes m'ont beaucoup plu, dont certaines sont restées mythiques (celle de la danse), d'autres avaient un gros potentiel mais sont peu exploitées (la traversée du Louvre en un temps record, bien que très connue également, et que Bernardo Bertolucci refera avec beaucoup plus de réussite dans son très beau « Innocents »). JLG tente énormément de choses, avec une grande intelligence et parfois une légère arrogance, à l'image de ces clichés revendiqués ou encore d'une voix-off alourdissant plus le récit qu'autre chose, même si elle peut apparaître éclairante par intermittences. Il y a un ton, une ambiance, une rupture avec les schémas narratifs classiques m'ayant séduit, donnant au récit un aspect imprévisible, surprenant, d'autant que niveau visuel, la photographie de Raoul Coutard fait merveille. J'aurais d'ailleurs sans doute été plus clément s'il n'y avait pas un problème majeur : le son. Autant tout ce qui est bruit d'ambiance est excellemment rendu, autant niveau dialogues, c'est la cata. Alors que le réalisateur y apporte beaucoup d'importance à l'écriture, c'est pas loin d'une réplique sur trois qui m'a échappé, voire parfois certains pans entiers d'échanges... Alors comme c'est Godard, on peut tout imaginer, analyser voire envisager que cela soit volontaire, mais qu'est-ce qui pourrait justifier un tel choix, à part perdre sans raison valable le spectateur ? Je l'ignore. Reste cette séduisante impression d'ensemble, évoquant à de nombreux égards le « Jules et Jim » de François Truffaut, sans laisser la même impression d' « éternité », à l'image d'un trio Anna Karina - Sami Frey - Claude Brasseur qui, sans démériter, ne m'a pas ébloui non plus, la jolie Anna en tête. À défaut d'être conquis, au moins ai-je été ici un minimum sensible au cinéma de Jean-Luc Godard : ce n'était pas gagné.