Tout se passe sur une île Japonaise passablement arriérée, et sur la mer qui l’entoure, la pêche constituant, avec l’agriculture (la canne à sucre remplaçant les ancestrales rizières), sa principale ressource. On parle de la « métropole » et de sa capitale Tokyo, et si certains personnages s’y déplacent, on ne la verra jamais. La nature est omniprésente, et grouillent en permanence insectes et reptiles, créatures récurrentes dans le cinéma de Imamura. Cette importance centrale de la nature et la façon de la filmer font penser au cinéma de Terrence Malick. Les dieux invoqués par la population sont d’ailleurs ceux de la pluie et du vent, dans ce monde où sont vivaces les ancestrales traditions, coutumes et superstitions. L’histoire est centrée sur une famille, représentée par trois générations, au sein de laquelle, comme dans une très belle et vieille chanson contant la naissance de l’île, l’inceste est monnaie courante. Cette histoire est tragique, et se termine dramatiquement, alors que la civilisation fait irruption sur l’île (on retrouve le symbole du bulldozer déjà vu dans « La femme insecte »). Le film est long, lent, contemplatif, et l’on sent l’ampleur du projet et des moyens mis en œuvre pour le réaliser. Il montre et raconte sans prise de position morale, et déroute souvent le spectateur, comme l’ingénieur qui représente la société moderne est lui-même dérouté. Il s’en dégage une impression générale de fort dépaysement, de voyage poétique, et de fascination pour un monde oscillant entre légende et dure réalité.