Féministe, écologiste et pacifiste. Les trois mots qui je dirais qualifie ce film au niveau de l'engagement. Princesse Mononoke sorti en 1997 au Japon est selon moi le plus grand des chefs d'œuvre du grand Hayao Miyazaki, lui qui les enchaîne sans avoir fait aucun mauvais film. Dans la filmographie du réalisateur japonais, on retrouve beaucoup d'inspirations européenne mais Princesse Mononoke, comme Le voyage de Chihiro fait exception et sort juste après Porco Rosso qui se déroule en Italie, en mer Adriatique.
Dans Princesse Mononoke, Hayao fait s'affronter l'homme et la nature mais sans jamais vraiment choisir un camp. Pour représenter la nature, on a San qui est la princesse des loups aussi appelé "Princesse Mononoke". Mononoke qui en japonais veut dire esprit vengeur.
Du côté des humains, nous avons Eboshi, qui est à la tête du village des forges. Et au milieu nous avons Ashitaka, un jeune prince venu d'un petit village de la tribu des Emeshi que tout le monde pensait décimé par l'empereur.
Ashitaka est la figure la plus importante du film, celle qui permet de rallier "hommes et bêtes". Celui qui veut que les "Hommes et les dieux de la forêt puissent vivre en paix". Celui qui veut "porter sur le monde un regard sans haine".
Cette phrase est tellement importante et peut résumer tout le film.
3 engagements sortent donc de ce film de la part du réalisateur. Tout d'abord le féminisme. Même si notre personnage principal est un homme, comme dans tous ses films, les personnages féminins sont très importants. Le village des forges est dirigée par Eboshi, une femme forte, qui n'est ni tout noir ni tout blanc. D'un côté elle brûle la forêt, la déboise mais recueil aussi les lépreux, les aides, nettoie leurs plaies. Le manichéisme n'existe pas chez Miyazaki, on est pas chez Disney. Il représente des personnages comme dans la réalité finalement, qui ont des bons et mauvais côté. Il n'y a ni méchant ni gentil mais des camps qui ont leur intérêts propres.
Ensuite, nous avons San, la figure de proue de la nature, celle qui va tout risquer pour tuer Eboshi, celle qui n'a pas peur de mourir et qui sait se battre pour défendre la forêt. Elle ne se considère même pas comme humaine mais comme une louve à part entière.
Mais nous avons aussi Toki, une femme du village des forges, bien plus courageuse que les hommes autour d'elle.
Deuxièmement, nous avons un côté écologiste. Même si ce côté n'est peut être pas aussi extrême que dans Nausicaä de la vallée du vent, il est quand même très présent et d'une façon différente. Contrairement à son deuxième film, la nature n'est pas déjà morte mais est en train de reculer, de brûler, de mourir. Un peu comme notre monde. Mais dans ce film, la nature se défend, se rebelle, tente de tuer les humains pour survivre quitte à tout sacrifier. Ici c'est le dieu cerf qui représente l'équilibre de la nature, celui qui a aussi le pouvoir de donner la vie ou de la reprendre. Il est l'être suprême que tous les animaux veulent protéger.
Pour finir, on a le côté pacifiste qui est peut être le plus marquant et qui est représenté par Ashitaka. Le jeune prince va goûter à la haine de par le maléfice du dieu sanglier qu'il aura subi au début du film. Il va comprendre qu'il peut utiliser cette haine mais qu'en l'utilisant, même s'il devient plus fort, elle le ronge de l'intérieur.
La haine est le mot le plus représentatif du film, c'est l'état de haine, de colère qui transforme Nago et Okoto en démon. Ashitaka comprend cela très vite et va tenter de raisonner la mère louve en lui disant que "La haine ne fait qu'engendrer la haine" quand elle lui demande s'il va combattre les humains.
Au delà de ces trois thèmes important, Princesse Mononoke raconte également une histoire d'amour impossible entre San et Ashitaka, deux personnes qui ne font pas parti du même camp mais qui vont s'unir dans un même but, sauver le dieu cerf et donc sauver la forêt.
Princesse Mononoke est aussi le film de Miyazaki qui utilise le plus le silence, celui qui nous fait le plus voyager. Il y a des scènes entière dans le film sans aucun son et sans aucune musique. Je n'ai jamais vu de films utilisant autant le silence avec autant de sens et aussi bien.
On a dans ce film quelques unes des meilleurs musique de Joe Hisaishi, le thème de Princesse Mononoke est absolument sublime et est décliné de différentes façon à plusieurs moment du film, c'est tellement BEAU !! Des musiques qui traduisent le sanglot et la mélancolie des arbres, qui traduit la tristesse et la douleur d'Ashitaka, qui montre la prestance et la gravité de la haine notamment lors du combat entre Eboshi et San avec Ashitaka qui intervient. La musique montre aussi la mort avec les "Requiem". Pour créer ces musiques montrant un Japon du XVeme siècle, un Japon médiéval, Hisaishi utilise des vieux instruments traditionnels japonais.
Mais sa musique qui est peut être la plus belle, la plus douce est son Adagio de la vie et de la mort, au moment où le dieu cerf calme Okoto rongé par la haine et Moro (mère louve) qui était à bout de force, en leur ôtant la vie. Une musique qui est à mi chemin entre la vie et la mort et qui est à pleurer.
Bref Princesse Mononoke est pour moi le plus beau film de l'histoire du cinéma, un film précurseur comme l'est son réalisateur dans la protection de la nature, un film on l'on se regarde nous même finalement, où l'on assiste à ce que l'humanité est capable de faire. Mais Miyazaki le prend avec un style différent et une période différente pour nous toucher, nous montrer un voyage initiatique d'un héros qui découvre la haine et la tâche qui l'envahit. C'est un film que j'ai vu entre 20 et 30 fois, c'est aussi le premier film qui m'a rendu muet au moment du générique quand j'étais petit et qui m'a fait réfléchir pendant plusieurs jours, le premier film où j'ai regardé le générique jusqu'au bout en repensant à tout ce que je venais de voir. C'est la cinquième fois que je le revois en moins de deux ans et je ne m'en lasse jamais.
Au delà de tout ce que Miyazaki met en avant dans ce film, comme dans ses autres films, le message qu'il veut faire passer c'est : même si la vie est dur, même si le monde est maudit, il y a des raisons de vivre. C'est ce qu'Ashitaka va dire à San devant la nature qui est en train de mourir : "Nous sommes là, nous sommes vivant toi et moi" ou Toki aux personnes autour d'elle au moment où leur village brûle : "tant qu'il y a de la vie, il y a de l'espoir".
Voilà le dernier message du réalisateur : gardez espoir.