Un film intéressant qui préfigure bien ce que sera l'oeuvre de Noé par la suite. Tout d'abord le choc de l'image : Gaspar Noe n'a pas peur de taper dans le dur, de choquer, l'image crue est là pour déstabiliser, pour mettre le spectateur en position "inconfortable", plus réceptif, pour lui apporter autre chose que le cinéma aseptisé. Il ne s'agit pas de choquer pour choquer, comme on l'a dit à tort de " Irréversible", mais bien de présenter autre chose au spectateur. Du cinéma vrai, du cinéma qui montre la souffrance , le sang, ou le vrai sexe , comme dans 'Love'. Ici la scène d'intro : avec l'abattage du cheval, puis l'accouchement , ou le meurtre du pseudo violeur , sont là pour créer cette ambiance. Toutes les scénes de découpe de viande dans la boucherie sont là aussi pour rappeler la fonction animale de l'être humain. Et puis il y a quelques rares scénes de tendresse, quand le boucher habille sa fille autiste, qu'il lui glisse sa culotte , qu'il la douche, c'est de la tendresse. Mais la posture nihiliste de Noé réapparait très vite , la rencontre du boucher avec la cafetière ( superbe prestation de Frankie Pain) , leur scène de sexe, le dégout qu'il porte à race humaine, à la procréation, son monologue sur l'homme perdu sans futur , tout cela est très noir, on est dans une rétorique de la vie très " Célinienne" , un nihilisme jouissif. L'image est souvent rouge , criarde , des couleurs très saturées qui annonce bien les films suivants. Un galop d'essai intéressant, comme un avant projet de tout le cinéma futur de Gaspar Noé.