"Them" est un grand film, sûrement l'un des plus grands que j'ai pu voir jusqu'ici dans le sous-genre des films d'invasion de monstre. Je m'attendais à une petite série b sans prétention, loin de me douter sur quelle réussite je tomberais. Balaise, solide et instruit sur son sujet ( contrairement à un certain Village des Damnés), "Des monstres attaquent la ville" s'avère être un excellent divertissement, doublé sur une parabole traumatique par rapport au nucléaire, et qui n'est pas sans rappeler par bien des aspects "Godzilla", le chef-d'oeuvre de Ishirô Honda. Bien écrit s'il en est, le scénario est aussi convaincant que propice à de sacrées situations d'action; spectaculaire, couillu et saisissant, le résultat final m'a marqué au plus haut point; nombre de scènes restent encore en ma mémoire, alors que je peine parfois à me rappeler l'intégralité d'un film. Vu une fois, et je le connais déjà presque par coeur. Si ça c'est pas balaise.
"Them!" est un grand film dans le sens où il apporte réellement quelque chose à son genre de prédilection, la science-fiction, ainsi qu'au cinéma en règle générale; je veux parler ici du message même de l'oeuvre, prônant l'arrêt d'un nucléaire tellement destructeur qu'il en vient jusqu'à modifier la nature qu'il touche. L'action de l'homme, ses inventions sont donc cancérigènes pour notre monde; car si la Terre doit mourir, ce sera par la faute de l'homme, son mal dominant. Le message, profondément bien évoqué, est appuyé par une justesse du propos qui manque à nombre d'autres métrages du genre. Armée d'une rigueur scientifique de tous les instants, l'oeuvre nous explique le déroulée de la société fourmilière, toute cette organisation titanesque pour de petites bêtes pas même plus grosses que le plus petit ongle de la plus petite des femmes. L'on sent d'ailleurs un intérêt certain pour le sujet traité, une certaine fascination pour ces créatures organisée à la perfection, sans que rien ne soit laissée au hasard. C'est aussi la nature que mettent ici en avant les artistes en charge du projet; car si les fourmis sont ainsi, c'est que la nature leur en a fourni la possibilité. Et si l'homme s'attaque à elle, s'il les extermine, il devient le tueur de son monde; c'est même lui qui a causé leur taille gigantesque, ainsi que leurs attaques ( involontairement, certes ); l'homme se retourne donc contre l'homme, la création contre le créateur, création qu'il devra exterminer s'il veut continuer à vivre sur cette Terre. Une autre variation du thème de Frankenstein, en somme. Il faut en plus ajouter à cela une terrible parabole sur les conséquences de la guerre froide dans notre monde moderne, cause principale, par la course à l'armement, de différentes catastrophes nucléaires. Et si le message pourra paraître aujourd'hui quelque peu éculé, il n'en demeure pas révolutionnaire pour l'époque; sans être le premier à l'avoir abordé, "Them!" est sûrement le film à l'avoir le mieux approfondi. Et tout ce qui gravite autour de l'oeuvre, ses évidentes qualités plastiques, avec ses fourmis géantes qui ressemblent à des peluches menaçantes, mais tout de même assez bien foutues pour amener un côté spectaculaire à l'oeuvre; tous ses acteurs engagés et investis; cette mise en scène qui ne laisse rien au hasard, pas même sa bande-son de très forte qualité; ainsi que sa conclusion pessimiste et avant-gardiste, vision du début de la fin d'un monde capitaliste où les pires excès se mêlent aux meilleurs profits; oui, tout ce qui se trouve dans ce chef-d'oeuvre permet à son message de passer de la manière la plus crédible qui soit, de la meilleure manière possible : par un rappel brut de la nature de l'homme et des conséquences que ses actions insensées pourraient entraîner dans le futur s'il décidait d'agir encore comme cela, irrémédiablement, jusqu'à la fin des temps. L'homme entraîne la mort de l'homme, ne laissant dans son sillage que souillure et destruction.