L'introduction où l'on entend un gamin lire une partie de la déclaration d'indépendance, puis l'arrivée d'une musique disco avec des images de tribunaux, ne nous met pas dans les meilleurs conditions pour apprécier ...And Justice for All.
Heureusement, plus le film avance, plus il se montre à son avantage, mettant en scène un jeune avocat impulsif qui doit défendre un juge qu'il ne porte guère dans son estime. La première force du film de Norman Jewison, c'est de nous emmener dans l'univers judiciaire et au plus près d'un avocat, par le prisme d'un personnage d'abord intéressant puis de plus en plus attachant. Il porte vraiment le film sur les épaules, même si les seconds rôles sont aussi soignés, malgré certains aspects caricaturaux.
Là où ...And Justice for All surprend agréablement, c'est dans le portrait guère reluisant que Norman Jewison dresse de la justice américaine, capable d'envoyer les innocents en taules et de relaxer les coupables. Tout se joue à peu de choses alors que le temps se charge parfois de faire oublier des affaires et de laisser les mauvaises personnes en prison ou non, et ce en pouvant respecter la loi. Il n'hésite pas à inclure sans lourdeur quelques éléments plus légers, parfois drôles, ou même mélancoliques voire tristes, comme lorsqu'un avocat se rend compte de son erreur et des conséquences de celle-ci, trouvant la bonne alchimie dans les tons et l'atmosphère mise en place.
C'est au cœur de tout ce marasme qu'apparaît donc Al Pacino, jeune avocat très idéaliste et contre ce système. Norman Jewison parvient à l'approfondir, surtout grâce à l'intérêt qu'il porte sur la vie privée de celui-ci, avant d'entamer le gros morceau du film, sa défense pour le procès d'un important juge accusé de viol. Du coup, tout en égratignant à nouveau le système, le metteur en scène de L'Affaire Thomas Crown met son protagoniste face à un important dilemme, défendre une personne qu'il déteste et représente tout ce qui lui déplaît dans ce système, sans être sûr de son innocence ou non, et dans ce sens, les cinq dernières minutes sont géniales.
Norman Jewison démontre un savoir-faire certain dans le rythme et la construction du récit, de quoi faire oublier les quelques fautes de goûts, typiques de son époque, notamment dans la musique. Il parvient à créer une ambiance assez prenante pour être maintenue tout le film, évidemment liée à son passionnant personnage principal et l'affaire qu'il devra régler. L'oeuvre tient sur les épaules d'un très grand Al Pacino, qui porte le film en étant crédible et rendant son rôle vivant et fort, notamment lorsqu'il dénonce les injustices avec une conviction à toute épreuve, alors que face à lui, les autres comédiens sont parfaits, à l'image d'un Jack Warden en juge au tendance suicidaire.
Al Pacino porte sur ses épaules ...And Justice for All, faisant preuve d'une conviction à toute épreuve pour sublimer la mise en scène de Norman Jewison qui n'hésite pas à peindre un portrait peu reluisant du système judiciaire américain.