Je n’aime pas commencer les avis par « je », mais je n’ai cette fois guère le choix, simplement pour dire que je n’avais jamais entendu parler de ce film au titre quelque peu présomptueux. Présomptueux ? Absolument, dans le sens qu’il concerne une personne. Enfin ça c’est ce qu’on pourrait penser quand on ne sait absolument rien de l’origine du scénario. Mais si on creuse un peu, on s’apercevra que "La belle des belles" ("La donna più bella del mondo" en version originale dont le titre n’est pas difficile à traduire littéralement), classé en balance entre la comédie, le drame, la romance et le musical, n’est rien d’autre qu’un biopic. Eh oui, Gina Lollobrigida a pris le rôle de Lina Cavalieri, une cantatrice devenue célèbre plus grâce à sa beauté qu’à sa voix, jugée limitée. De ce point de vue-là, le scénario se révèle rigoureusement exact et le titre pas vraiment volé. Pour votre information personnelle, sachez que la soprano a fait tourner bien des cœurs puisque, dit-on, elle aurait reçu plus de 800 propositions de mariage, excusez du peu ! Et il y avait de quoi, si effectivement la cantatrice évoluait au plus près des spectateurs pour rendre ses spectacles plus vivants et laissait ses porte-jarretelles apparents pendant ses prestations sans que ça fasse pour autant vulgaire. Notez tout de même le paradoxe quand on la voit refuser de montrer ses jambes à l’occasion d’un casting… Alors certes la beauté de Gina Lollobrigida sert plutôt bien cette légendaire beauté apparemment irrésistible, mais quizz de la vraie vie de la véritable Lina ? D’accord on sait qu’elle est partie de rien puisque cela est évoqué de façon très succincte, mais pour le reste, on ne peut pas dire que la réalité ait été vraiment respectée, à commencer par l’identité du prince russe, pour qui le nom a été changé du tout au tout ! Donc, pour le biopic, on repassera. Construit sur une adaptation très libre de la vie de la soprano italienne, "La belle des belles" est par conséquent à classer dans les différents genres cités plus haut, tant la fiction semble avoir pris une part prépondérante. Quoiqu’il en soit, les libertés prises ont permis d’intégrer des scènes des plus savoureuses, à commencer par le crêpage de chignon né d’une rivalité venant d’un égo surdimensionné. Mais cela a aussi ses inconvénients, avec ce duel quelque peu ridicule, certes amusant en raison du sexe des deux belligérantes. Malgré tout, il en ressort un film assez sympathique, construit un peu comme le conte de "Cendrillon". Là ce n’est pas la belle qui perd une de ses chaussures, mais le prince qui lui fournit un bijou. Sauf que l’image de la royauté se retrouve écornée par un pari stupide. Et tel un écho, on élargit les bassesses y compris les plus viles à l’ensemble de la gente masculine par un crime astucieux. "La belle des belles" : un film féministe ? Allez savoir, mais assez proche de la réalité peu glorieuse des faits divers. Il n’empêche qu’il reste un film au propos gentillet qui change de ce que nous avons pris l’habitude de voir. A la condition d’être accessible à ce genre de cinéma, il se suit sans véritable ennui, même s’il ne fait pas vraiment rêver bien que les costumes et décors plongent assez facilement le spectateur en ce début du XXème siècle (l’action débute en 1905). Dans tous les cas, même si la chansonnette est poussée régulièrement, il n’y a pas besoin d’être un fan d’opéra, simplement parce que le mélodrame fait bon ménage avec cet art lyrique, ce qui représente en soi un vrai petit exploit. Pas étonnant pour autant quand on sait que le réalisateur Robert Z. Leonard était un spécialiste hollywoodien de la comédie musicale des années 30/40. Alors quand en plus il reçoit l’aide de Mario Bava, l’un des plus éminents directeurs photos de tout le cinéma italien, et que Gina Lollobrigida a su mettre tout son éclat au profit d’une interprétation pleine de fougue… "La belle des belles" ne peut pas et ne doit pas être considéré comme mauvais, même si je sais pertinemment que ce film ne plaira pas à tout le monde. Cela dit, ce n’est certainement pas un chef-d’œuvre non plus. Mais il a été considéré comme étant suffisamment intéressant pour avoir bénéficié d’une restauration et d’une scène supplémentaire (ça se voit par la définition de l’image) : une scène coupée au montage et qui a été retrouvée ?