"The last Show" s'inspire d'une émission fondée en 1974 qui existe réellement, et qui s'appelle aussi "A Prairie Home Companion". L'animateur de ce show est Garrison Keillor, qui signe le scénario du film d'Altman, et qui y joue son propre rôle de Mr Loyal. Originaire comme lui du Midwest, Altman raconte l'importance qu'a eu pour lui la radio dans son enfance : "C'est par la radio que je me suis d'abord intéressé à la fiction. Je me revois, gamin dans les années 30, allongé par terre comme tous les gosses de l'époque, à écouter la radio pendant des heures". Dans "Nashville", il s'était déjà intéressé au monde la musique country, avant de s'attacher à celui du cinéma dans "The Player", celui de la mode dans "Prêt-à-porter" et celui de la danse dans "The Company".
Mais ici, cette évocation d'un milieu artistique défini, celui d'une radio diffusant essentiellement de la musique country, prend un tour bien particulier : il est placé sous le signe de la fin, et même de la mort. La fin annoncée de la radio et du théâtre qui abrite son show hebdomadaire, et la mort qui prend les traits d'une femme mystérieuse qui rôde dans les coulisses et dont on apprend qu'il s'agit d'une auditrice littéralement morte de rire, victime d'un accident de la route alors qu'elle écoutait une blague de G.K. Il est toujours étrange de découvrir un film posthume, comme ce fut le cas pour moi avec "Eyes Wide Shut". On est plus sensible à ce qui peut paraître comme des prémonitions, et dans "The Last Show", ces signes sont partout (le titre "français" n'étant pas le titre original) : l'idée de la dernière séance, la mort du vieux chanteur, la double présence de l'ange venu aider à faire le dernier voyage et de l'exécuteur (Tommy Lee Jones, cynique à souhait)...
Certaines scènes sont délicieuses, à la limite de l'absurde voire du surréalisme, comme cette improvisation à plusieurs voix pour meubler un trou dû à la perte des papiers de la scripte, ou le vieux bruiteur qui s'emballe et se met à accompagner les blagues scato des deux cow-boys. Cependant, le film met longtemps à trouver son rythme, et les travelings fluides de maître Bob sont un peu à l'étroit dans ce huis-clos. La multitude des personnages n'est pas exploitée aussi brillament que dans "The Player" ou "Short Cuts", l'histoire étant forcément aussi linéaire que le conducteur d'une émission radiophonique. Malgré ces réticences, "The last Show" est à voir, avec déjà la nostalgie de ce qui ne nous sera plus donné à déguster tous les deux ans, ce mélange de tendresse pour ses personnages et ses acteurs (formidable Meryl Streep) et d'ironie cruelle pour les petits défauts des hommes et les grandes perfidies des systèmes.
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