Fasciné par les juifs orthodoxes, Tony Krawitz le réalisateur, a décidé de consacrer un film sur leur univers : " Le projet de Jewboy est né de mon désir de raconter l'histoire d'un jeune homme déchiré entre ses désirs et sa foi. Je souhaitais que les conflits, les sentiments, mais aussi l'espoir occupent une place importante dans le film, et je voulais aussi situer l'action dans un univers qu'on a peu l'habitude de voir dans le cinéma australien. "
Dans Jewboy, Tony Krawitz nous transporte dans une période douloureuse de la vie de Yuri, le personnage principal. L'auteur explique: " Yuri a perdu tous ses points de repère. Il cherche à se retrancher du monde et à refouler ses pensées : il voudrait bien vivre sans se poser sans cesse les mêmes questions et sans être obsédé par les attentes que son entourage a toujours placées en lui. Il ressemble, en un sens, au protagoniste de L'Etranger d'Albert Camus: comme lui, il observe ce qui se passe autour de lui, mais n'y prend plus part. Il est comme un étranger qui cherche à trouver sa place dans le monde."
Tony Krawitz a veillé à donner un aspect réaliste et authentique à son film. Ainsi la mise en scène souligne parfaitement les états d'âme des personnages et en particulier ceux de Yuri : " Ce sont les personnages qui ont inspiré la mise en scène dans Jewboy. L'itinéraire de Yuri, qui le mène des ténèbres vers la lumière, nous a servi de point de référence pour la mise en scène. Le chef-opérateur Greig Fraser a tourné des plans serrés et claustrophobes au départ pour s'orienter ensuite vers des plans larges. La plupart des scènes ont été filmées dans un style quasi documentaire. Nous avons tourné en super 16 en recherchant la plus grande intimité. Nous tournions souvent dans des lieux exigus, comme des salles de bain, des taxis ou des cuisines. Pour restituer toute la densité de ces scènes et tourner dans les meilleures conditions possible malgré ces contraintes de décors, nous avons filmé caméra à l'épaule."
Considéré comme l'un des talents les plus prometteurs du cinéma australien, Ewen Leslie n'a pourtant pas entièrement convaincu le réalisateur au début de leur rencontre: " Nikki Barrett a été notre directrice de casting. Elle a d'abord réuni plusieurs jeunes comédiens pour qu'ils fassent des bouts d'essai pour les rôles principaux. Ewen Leslie faisait partie de ces jeunes comédiens. Il avait une veste en cuir, les cheveux teints de deux couleurs différentes et portait un bouc. J'ai trouvé que c'était un acteur formidable, même s'il était difficile de l'imaginer dans le personnage de Yuri."
Travaillant principalement sur l'improvisation avec ses comédiens, Tony Krawitz a également tenu à ce qu'ils soient totalement immergés dans l'univers des juifs orthodoxes: "Il me semblait essentiel d'accorder aux acteurs autant de temps que nécessaire pour qu'ils comprennent l'univers du film et leurs personnages. Entre le moment où nous avons trouvé tous les comédiens et le début du tournage, nous ne disposions que de trois semaines. Ils ont passé les dix premiers jours avec les Juifs religieux, ils sont allés à l'école talmudique, à la synagogue et ont assisté aux dîners de shabbat le vendredi soir. Certaines personnes ont été d'une aide inouïe et nous ont beaucoup donné de leur temps. La plupart des religieux étaient aussi attentifs que nous à chercher à donner de la communauté une image aussi juste que possible – à tenter de faire un film qui aurait tout aussi bien pu être réalisé par une personne de la communauté, et non pas une reconstitution en costumes truffée de clichés. Pendant la phase des répétitions, j'ai tâché de ne pas trop m'attacher au scénario. La plupart des répétitions ont été des improvisations organisées. C'étaient des exercices destinés à faire entrer les comédiens dans la peau des personnages. L'une des impros a duré plus d'une heure et demie. Les comédiens riaient, se bagarraient, quittaient la pièce, se faisaient du thé – tout en s'appropriant leurs personnages – et à la fin, il s'est créé une véritable osmose entre les comédiens et leurs personnages.
L'audacieuse Naomi Wilson a impressionné le réalisateur lors du casting, ce dernier se souvient encore: " Un après-midi, Naomi Wilson s'est présentée. Elle avait vu l'annonce dans le Jewish News. Elle portait des talons aiguilles, un rouge à lèvres éclatant, et une jupe branchée assortie à sa coupe de cheveux. Elle avait l'air bien trop jeune et dans le coup pour incarner Minnie. On s'est mis à bavarder. Elle nous a dit qu'elle n'avait pas beaucoup joué la comédie, mais qu'elle avait en revanche une solide expérience de marionnettiste, d'animatrice d'émissions de télévision et de radio et, récemment, de ventriloque. Je lui ai demandé de nous faire un numéro de ventriloque : elle s'est exécutée et c'était à hurler de rire.. Nous avons été stupéfaits et nous sommes très fiers de son interprétation de Minnie."
Ce film a été présenté au Festival de Cannes 2005 dans la section Un Certain Regard.