Avec « The Tin Star » Anthony Mann opte pour le noir et blanc (belle photographie de Loyal Griggs, en VistaVision - 1.85) pour un western majoritairement urbain, puisque seul le dernier tiers se passe « à l’extérieur » (le titre français : « Du sang dans le désert » est un abus de mercantilisme, en faisant croire qu’il est de la même veine que « La fille du désert » de Raoul Walsh ou « La prisonnière du désert » de John Ford). Cette histoire très classique de Barney Slater et Joel Kane est scénarisée par le grand Dudley Nichols auréolé de deux réussites dans le gente : Stagecoach (La chevauchée fantastique) pour John Ford en 1939 et “Rawhide” (L’attaque de la malle-poste) pour Henry Hathaway en 1951. Le film s’attache à décrire le faux courage d’une meute excitée par un revanchard dont la testostérone a submergé le cerveau, face à des notables (maire, commerçants, etc…) qui masquent leur lâcheté derrière des discours aussi habiles que convenus. Entre les deux un jeune sheriff (dont le manque d’expérience le pousse dans une audace dont toute lucidité est absente et un chasseur de prime détesté (Henry Fonda), ancien sheriff et donc très expérimenté. Ainsi le récit s’attarde à la fois dans la description clinique et sans concession de ces habitants et dans l’initiation du débutant, au grand désespoir de sa fiancée pour qui l’étoile d’étain (d’où le titre du film) est devenue synonyme de mort. A côté Mann traite également du racisme dans le développement d’une relation amoureuse avec Nona, la veuve d’un indien, qui vit avec Kip, son fils métis, dans une maison dont le bon Dr Joe lui laisse la jouissance. Le jeune sheriff est interprété de manière convaincante par Anthony Perkins, découvert l’année précédente au cinéma dans « La loi du Seigneur » de William Wyler et qui sort du curieux « Jicop le proscrit » d’Henry Levin), avec lui, l’expérimenté gunfighter est campé par Henry Fonda, acteur fétiche de John Ford, dont la présence est une fois de plus impressionnante. Ils sont face à Neville Brand grand spécialiste du rôle de méchant, Peter Baldwyn et Lee van Cleef. Betsy Palmer est magnifique dans le rôle de la veuve et John McIntire (un habituel des westerns de Mann) fait le Job en bon Dr Joe (il sera avec Anthony Perkins dans le « Psycho » d’Hitchcock). La galerie des citoyens de second rôle (je sais, elle est facile) sont tous convaincants. Une fois de plus la direction d’acteur de Mann est superlative, la mise en scène d’une efficacité évidente à la fois dans les mouvements de caméra (la scène de l’enfumage est un modèle à montrer dans toutes les écoles de cinéma) et l’absence de plans inutiles. Malgré la lenteur du déroulé pour ne rien oublier et la fluidité pour ne jamais perdre le rythme, à aucun moment la tension ne tombe, si bien que les 93 minutes du métrage passent sans ennui. Seuls regrets, la fin d’une platitude surprenante (mal scriptée, ils avaient envie de finir ?) et une musique d’Elmer Bernstein souvent utilisée de manière saugrenue, limite dérangeante.