Sollicitée par un producteur américain pour produire une série de prestige sur le Décalogue, Likka Vehkalahti, de la société finlandaise de distribution YLE, choisit la documentariste Pirjo Honkasalo pour réaliser le 9ème commandement : " Tu ne porteras pas de faux témoignages contre ton prochain ". De cette initiative naît le filmLes trois chambres de la mélancolie.
Pirjo Honkasalo avoue qu'elle regarde beaucoup dans l'oeil de la caméra, mais qu'elle filmepeu. Le point de vue de l'auteur se dégage d'un moment choisi, qui suggère une profondeurhors de l'image qui résonne de références les plus variées. "On reproche souventaux réalisateurs de documentaires de manipuler la réalité, mais si tout était montré,le résultat final ne raconterait plus rien", résume Honkasalo.
Il est admis qu'un film documentaire ait une trame narrative, une structure claire, un style visuel et un univers sonore. Honkasalo ajoute qu'il reste toujours une oeuvre subjective où l'auteur se sert de la réalité pour parler de lui-même. "La réalisation d'unfilm documentaire peut être difficile pour les jeunes, car c'est une discipline quirequiert une conception de la vie et de l'expérience. Son auteur doit être capable d'interpréter le monde et de comprendre comment les détails en révèlent l'esprit général.L'oeuvre décrit le rapport que l'auteur a avec son sujet".
Le tournage des Trois chambres de la mélancolie fut un véritable parcours du combattant pour la réalisatrice. Dès le début, elle dut se battre contre le producteur américain pour l'empêcher de s'immiscer dans la réalisation du film. Mais une fois les fonds obtenus, les lieux de tournage choisis, l'Ingouchie mit au service de l'équipe, des gardes armés pour leur assurer une certaine sécurité sur le territoire tchétchène. Puis survinrent les événements du 11 septembre, qui envenimèrent la situation. Cela devint de plus en plus dur de tourner, en particulier au sein de l'Académie Militaire de Kronstadt, dont le tournage se déroula en octobre 2002, au même moment que la prise d'otages par les commandos tchétchènes au théâtre Doubrovska à Moscou. Il prit fin en automne 2003, quand les hostilités gagnèrent le territoire de l'Ingouchie.
Le film a remporté en Finlande le 6 février 2005 le Jussi (équivalent du César en France) du meilleur film documentaire finlandais de 2004. Présenté dans la section " Orizzonti " ("horizon"), le film a également remporté deux prix à Venise, le " Human Rights Film Network Award” et le prix " Lina Mangiacapre " couronnant chaque année une réalisatrice.