Voici l'exemple type du film qui bénéficie à fond de l'effet positif des derniers succés du réalisateur, le tryptique Un couple épatant - Cavale -Après la vie, justement salué par la critique, et que j'avais moi même beaucoup apprécié. Même les plus grands journaux s'y sont laissés prendre. Pourtant, ce polar ci est une simple série noire qui me fait penser à la série des téléfilms qui passaient à la télévision le samedi soir dans les années 80. Accrocheur, prenant, souvent désespéré, mais sans réelle originalité. La psychologie est sommaire, le réalisateur s'applique surtout à décrire un milieu social, celui des anciens ouvriers amers d'avoir gâchés leurs vies dans des usines, avec souvent des séquelles physiques. On ne sent pas suffisemment ce qui peut pousser un jeune homme comme celui interprété par Eric Cavacana, certes aux abois financièrement, mais qui a une maison, une jolie femme, et un enfant, à s'engouffrer dans ce scénario boiteux, à suivre des "pieds nickelés" dans un coup très risqué. Le coup de la fierté perdue, de la motocyclette, sont un peu justes pour exprimer son état d'esprit. Quand à l'ancien truand interprété par Lucas Belvaux, lui non plus ne convainc pas tout à fait. Les scènes où il exprime ce que c'est que faire un casse, les risques que cela comporte, sont un peu forcées, manquent de conviction malgré la rage du personnage. Quand au final sur le toit d'un immeuble, il renvoie à la série noire, avec une image forte pour clôturer l'échec "en beauté", si j'ose dire. Belvaux est plus à l'aise dans la réalisation, souvent inspirée, proche des gens, absolument dépourvue d'effets "à l'Américaine". Les moments à suspens, à grande densité émotionnelle, sont traités comme les autres, arrivent souvent par surprise, comme l'apparition du vigile au moment où l'on ne s'y attend plus. Le réalisateur est peut être influencé, dans ce savoir faire, par le Kubrick de l'Ultime razzia, autre description clinique d'un hold up qui vire au cauchemar.