Pièce de théâtre mythique signée Jules Romains, "Knock" a, également, eu les honneurs du grand écran à trois reprises… mais seule la dernière adaptation en date (tournée en 1951) a su traverser les époques. Il faut dire que les deux premières versions étaient muettes… ce qui n’aide pas vraiment à intéresser un public contemporain. Ce "Knock" de 1951 est donc l’unique adaptation cinématographique parlante de la pièce et, rien que pour ça, il mérite le coup d’œil. Pour le reste, force est de constater que la déception prend rapidement le pas sur l’excitation de la découverte. Il faut dire que le parti-pris de découper le film en une demi-douzaine de tableau fait perdre énormément d’énergie au film qu’il renvoie immanquablement à ses origines théâtrales. A ce titre, la mise en scène de Guy Lefranc est un modèle de paresse visuelle, tout juste bonne à rivaliser avec une captation de pièce de théâtre. Le seul apport serait presque les décors en extérieur… ce qui fait léger comme intérêt. On sent bien que le réalisateur n’a pas eu son mot à dire et qu’il a dû obéir au doigt et à l’œil de la star du film, Louis Jouvet, interprète du rôle-titre depuis des années, que ce soit sur les planches ou lors de la précédente adaptation muette de 1933. Résultat : le seul intérêt du film réside dans la prestation de l’acteur. Certes, Louis Jouvet est un monstre de charisme, capable de transcender les textes les plus plats par sa diction légendaire. Pour autant, "Knock" vient rappeler qu’un grand acteur peut être entravé par une mise en scène molle. L’absence d’efficacité de la réalisation, les longueurs qui viennent alourdir l’intrigue et l’omniprésence de Jouvet à l’écran (qui perd son statut de voleur de scène comme dans "Hôtel du Nord" ou "Quai des orfèvres") sont autant d’handicap qui rendent le film souvent ennuyeux, et ce malgré les dialogues de Jules Romains. Certes, on apprécie toujours cette histoire gentiment absurde de médecin faisant fortune malgré l’escroquerie dont il a été victime de son prédécesseur (avec des méthodes qui posent certaines questions déontologiques voire morales, d’ailleurs, qui sont clairement ignorées ici) et les dialogues devenus des classiques ("Les gens bien portants sont des malades qui s'ignorent". "Est-ce que ça vous chatouille, ou est-ce que ça vous grattouille ?"…). Mais, une fois encore, la mollesse ambiante vient plomber la force comique du film… ce qui empire à mesure que le film avance. En effet, si les méthodes de Knock pour gonfler son chiffre d’affaires suscitent encore l’intérêt, celui-ci s’estompe considérablement lors de ses consultations et s’est carrément émoussé lors du retour de son prédécesseur au troisième acte. L’omniprésence de Louis Jouvet empêche, en outre, l’éclosion de nouveaux talents… et ce alors que le film compte, à son générique, Jean Carmet (méconnaissable et très limité dans son jeu) et le débutant Louis de Funès (3 secondes à l’écran). Tout au plus retiendra-t-on, la prestation de Jean Brochard en médecin sur le départ et de Pierre Bertin en instituteur inquiet des maladies pouvant s’attaquer à lui. Quant au final, il tombe comme un cheveu sur la soupe et pose plus de questions qu’il ne donne de réponse. Que retenir, dès lors, de ce "Knock" ? Qu’il a le mérite d’exister, ce qui permet de connaître la pièce ? Qu’il reste indispensable pour les adorateurs de Jouvet ? Certes, mais il n’en demeure pas moins que le film n’est pas la réussite attendue et qu’il ne peut même pas se prévaloir de l’excuse d’être un vieux film puisque "Quai des orfèvres" ou "Entre onze heures et minuit " sont plus anciens que lui et bien plus réussi !