"Nomad" est un (je cite) "film consacré à l’épopée du peuple kazakh en racontant sa lutte séculaire pour son indépendance. Il a été réalisé à l’initiative et grâce aux efforts du Président de la République du Kazakhstan Noursoultan Nazarbaïev". Telle est la présentation du film. D’entrée le spectateur est transporté par de sublimes plans sur les plaines et montagnes coincées entre la Chine et la Russie, sur les notes merveilleuses de la bande originale (signée Carlo Siliotto, nominé aux Golden Globes 2007) aux consonances de folklore kazakh. On sent que "Nomad" est empreint de beaucoup d’application, de profond respect envers la population locale et son histoire, tout en voulant faire du spectaculaire, et tout en théâtralisant cette immense aventure d’un peuple. Mais à trop vouloir en faire, on finit par tout gâcher : le théâtralisation est à mon sens trop accentuée pour le grand écran, mais le style de la mise en scène est davantage intéressant pour les estrades planchéiées. De plus, le jeu des acteurs rappelle celui que les comédiens d’antan employaient, ce qui pourrait passer aujourd’hui comme un moyen de cacher un manque de conviction. De grosses incohérences viennent compléter ces petits points négatifs de "Nomad"
: je ne comprends pas comment un sage comme Oraz peut tout savoir de l’art de la guerre, alors qu’à l’inverse un sultan en ignore tout, surtout dans le contexte de conquête des territoires ; on ne comprend pas trop comment le sage Oraz parvient à sauver l’enfant dans la cohue (mais ça encore…), et comment il obtient la garde de l’enfant loin des fortifications où réside le père biologique de l’enfant, bien que ce soit argumenté. N’oublions pas tout de même que nous sommes au XVIIIème siècle, avec une forte foi en matière de religion, de légendes, de prophéties et croyances diverses. Alors soit. Ce qui me choque le plus, c’est qu’on ne voit personne vieillir durant la croissance de l’enfant, et ce jusqu’à ses vingt ans. L’enfant aux yeux bridés devient adulte à travers les traits d’un homme latino-américain. A cela je dois rajouter la captivité des deux héros principaux : ils doivent être bien traités car ils sont toujours rasés de près. Pour compléter le tableau des incohérences, lors de leur duel (qu’on voit venir gros comme une yourte royale), il me parait illogique que l’un ait reconnu l’autre dès le premier coup de lame, et pas l’autre. Encore que je peux l’admettre car on n’est pas toujours attentifs à ce genre de détail. Quoique quand sa vie en dépend… Bon en fait je ne sais pas si c’est incohérent, mais tant pis : je décrète que ça l'est
. Malgré ces points négatifs, "Nomad" n’est pas mauvais pour autant, car il est doté d’un potentiel énorme, aux airs de fresque spectaculaire puisque la reconstitution de l’époque semble bonne, tant au niveau des décors que des costumes. Seulement les notes musicales sont trop omniprésentes, et il y a trop de ralentis sur les phases de combat. La narration en voix off est intéressante, donnant un aspect de conte musicalisé. Le potentiel était donc bel et bien là, mais mal maîtrisé malgré un budget conséquent de 40 millions de dollars par un manque de souffle épique qui donne tout l’attrait des grands films de guerre historiques.