Cinquième long métrage du Thaïlandais Pen-ek Ratanaruang après notamment Monrak transistor, remarqué à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes en 2002, et Last life in the universe, projeté à Venise en 2004, Vagues invisibles a été présenté en 2006 au Festival de Berlin, en Sélection officielle en compétition.
Le réalisateur s'est entouré des mêmes collaborateurs que sur son précédent film, Last life in the universe : le scénariste Prabda Yoon ("il venait de temps en temps sur le tournage de Monrak transistor, car il sortait à l'époque avec l'actrice principale du film", raconte le cinéaste), le comédien Tadanobu Asano (acteur vu entre autres dans Tabou, Zatoichi et The Taste of tea) et le chef-opérateur Christopher Doyle. A propos de ce dernier, qu'il a rencontré au Festival de Rotterdam, Pen-ek Ratanaruang se souvient : "Chris était saoul, j'étais saoul, et nous avions quelques amis en commun. Nous aimons tous les deux la musique de Tom Waits et celle de Leonard Cohen."
Si on retrouve une partie de l'équipe du précédent film de Pen-ek Ratanaruang dans Vagues invisibles, le cinéaste s'est aussi amusé à donner les mêmes prénoms aux personnages féminins des deux films. De même, le tueur de ce cinquième opus s'appelle Lézard : or cet animal était très présent dans Last life in the universe. Cependant, précise le réalisateur, "Vagues invisibles n'est pas une suite de Last life. Dans les deux films, l'idée d'un étranger perdu dans un endroit qu'il ne connaît pas est plus évidente que dans mes précédents films, peut-être parce que les deux sont interprétés par Tadanobu Asano".
Tout en parlant des contraintes de production du film, le cinéaste précise ses intentions : "Toutes les compagnies maritimes ont rejeté notre proposition de faire le film sur leur bateau car elles avaient un problème avec le scénario. Elles disaient que le film allait ruiner leur réputation. Très juste ! Donc, comment tourner un film à propos d'un bateau, sans bateau ? Nous avons donc décidé d'aller vers l'abstraction. En fait, c'est plus intéressant de cette façon (...) on sent que le voyage se déroule dans la tête d'Asano. Il ne faut pas oublier que ce personnage est rongé par la culpabilité du début à la fin." Concernant ce thème, le cinéaste ajoute : "L'élément que j'ai ressenti le plus en réalisant Vagues invisibles était la culpabilité du personnage principal (...) J'ai blessé beaucoup de personnes dans ma vie. J'ai agi en lâche de nombreuses fois. Vous savez, la culpabilité du personnage principal ne dure que le temps du film. moi, je dois vivre avec jusqu'à ma mort."
Christopher Doyle est un des chefs-opérateurs les plus réputés de sa génération. Après avoir beaucoup bourlingué, cet Australien né en 1952 est arrivé à Taïwan à la fin des années 70. Travaillant notamment pour une émission de télévision, il est repéré par Edward Yang qui l'engage comme directeur de la photo sur That Day on the Beach en 1983. Mais c'est à un autre fer de lance de la nouvelle vague asiatique que Doyle doit sa célébrité : Wong Kar-Wai. Au générique de Nos années sauvages Chungking Express, ou encore In the Mood for Love, le chef-opérateur contribue à forger le style du maître de Hong Kong. Il est dès lors très sollicité, par de grands metteurs en scène asiatiques (Chen Kaige Zhang Yimou), mais pas uniquement : citons Gus Van Sant (Psycho), Barry Levinson (Liberty Heights), ou M. Night Shyamalan (La Jeune fille de l'eau).