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    À l'ouest des rails
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    🎬 RENGER 📼
    🎬 RENGER 📼

    7 220 abonnés 7 513 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 14 janvier 2023
    Dans le quartier TiěXī Qū à Shenyang (en Mandchourie), au nord-est de la Chine, fut construit en 1934 le plus grand site industriel du pays. Au moment de l’occupation japonaise, ces usines servaient à fabriquer du matériel de guerre pour l’armée impérial japonaise.
    Lors de l’instauration de la République populaire de Chine en 1949, les usines furent reconverties et réaménagées avec du matériel fournis par l’Union Soviétique (lui-même confisqué aux allemands pendant la Seconde Guerre Mondiale).
    Plus de 150 usines étaient alors en activité, jusqu’au début des années 60, après la séparation sino-soviétique où la plupart des usines furent délocalisées dans le centre du pays. Au début des années 80, c’est le plein emploi dans les usines, allant jusqu’à atteindre le million d’ouvriers. C’est à la fin des années 90 que les usines commencent à fermer les unes après les autres, laissant sur le carreau des milliers d’ouvriers.

    Wang Bing (Madame Fang - 2017) a filmé avec une simple caméra DV de 1999 à 2001 la lente agonie des entreprises d’État rendues obsolètes par l’économie de marché, nous montrant ces hommes dans l’incertitude et l’effondrement d’un système devenu archaïque et ces usines qui une à une, finissant inéluctablement par être démolies.

    À l'ouest des rails (2003) 铁西区 est une immersion saisissante qui avoisine les 9h30. Découpée en 3 chapitres : "Rouille" (铁西区第一部分:工厂), "Vestiges" (铁西区第二部分:艳粉街) & "Rails" (铁西区第三部分:铁路), elle nous entraîne dans un incroyable voyage dans une Chine comme rarement on aura eu l’occasion de la voir.

    Dans le 1er chapitre "Rouille" (4h), le réalisateur a filmé pendant dans plusieurs usines du complexe industriel, les fonderies de cuivre, de plomb ou encore de zinc, les usines de câbles, de placage sur plomb ou sur cuivre, ainsi que dans une ancienne usine de baïonnettes (qui a servi pendant la guerre) transformée par la suite en tôlerie. Devant les hauts fourneaux jusqu’à leur salle de repos, des vestiaires jusqu’au douches communes, il filme la lente descente aux enfers et le quotidien de ces ouvriers. L’immersion est totale, le bruit y est assourdissant, il ne manque plus que le l’odeur et le goût âcre au fond de la gorge, pour imaginer à quel point leur santé (notamment des problèmes respiratoires et les nombreuses contaminations au plomb) et leur espérance de vie pouvaient être impactées. Un bien triste sort réservé à cette classe ouvrière alors que, quelques décennies plus tôt, elle était glorifiée par la Révolution chinoise.

    Dans le 2ème chapitre "Vestiges" (3h), le réalisateur s’intéresse aux résidents des allées « Arc-en-ciel », un quartier populaire de Shenyang. Dans les années 30, il accueillait de nombreux chinois venant travailler dans les usines japonaises. Lors du tournage, la population était essentiellement composée d’ouvriers employés dans les usines des alentours (vouées à une fermeture imminente). Non seulement ces derniers finiraient tôt ou tard par perdre leur travail mais ils se voyaient aussi être chassés de chez eux par les autorités (ces derniers souhaitant raser l’intégralité des habitations pour y faire construire des cités HLM, ils n’avaient d’autres choix que de les extrader). Le réalisateur les suit dans leur quotidien, les relations amoureuses des jeunes et l’épicerie qui sert de lien social. Ils vivent tous de façon très précaire dans un bidonville qui ne reflète absolument pas le nom du quartier dans lequel ils vivent entassés. Des conditions de vie très précaires et pourtant, les habitants semblent déterminés à rester chez eux plutôt qu’à vivre au chaud dans le confort d’un appartement neuf proposé par l’État (qu’ils jugent bien trop petit pour tous les accueillir).

    Enfin, dans le 3ème chapitre "Rails" (2h30), le réalisateur a suivi le quotidien des cheminots sur les 20 km que compte le chemin de fer pour le fret, construit au même moment que le complexe industriel et qui sert à relier l’ensemble des usines par le biais de deux réseaux ferroviaires bien distinct, le premier pour les matières premières et le second pour les produits finis. On retiendra de ce dernier chapitre, le portrait d’un père (surnommé le « vieux Du ») et son fils Yang Du, qui tentent de survivre en glanant ici et là tout ce qui peut l’être.

    À l'ouest des rails (2003) est un film-fleuve, une œuvre patrimoniale nécessaire pour les générations futures (et pas uniquement les chinois). Bien qu’ils aient pour fil conducteur le quartier TiěXī Qū, ces trois chapitres peuvent être vues séparément (mais pour une meilleure appréciation et immersion, je vous recommande de les voir d’une traite). Le film témoigne d’une triste réalité et est par la même occasion, la mémoire du temps qui passe, comme pour mieux nous rendre compte à quel point la Chine évolue vite, parfois au détriment de ses concitoyens, comme c’est le cas ici.

    ● http://bit.ly/CinephileNostalGeek ● http://twitter.com/B_Renger ●
    Christoblog
    Christoblog

    828 abonnés 1 674 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 2 février 2011
    A l'ouest des rails fait partie de ces films dont beaucoup de cinéphiles ont entendu parler, mais que très peu ont vu.
    Il faut dire que l'idée de se coltiner un documentaire chinois de plus de 9 heures (oui, vous avez bien lu) sur la fermeture d'un complexe sidérurgique géant (vous lisez toujours bien) Tie Xi, peut en refroidir plus d'un.

    Commençons par la première partie, Rouille.
    La première comparaison qui m'est venue à l'esprit, c'est Alien. Passée une fascinante introduction sous forme d'un long travelling avant, monté sur un train s'enfonçant dans l'usine enneigée, le film impose tout de suite un point de vue quasi onirique sur ces lieux gigantesques (plus d'un million d'ouvriers ont travaillé dans ce complexe), dans lesquels les hommes paraissent des fourmis. Au milieu du métal en fusion, ils semblent démunis et en danger. Lorsqu'on les voit dans l'intimité de la salle de repos, ou dans les bains, on songe à des explorateurs se réchauffant dans le cocon de leur vaisseau spatial.

    Le film - contre toute attente - n'est pas ennuyeux.

    Il alterne trois types de séquences, ce qui ne laisse jamais la monotonie s'installer :
    - les vues magistrales des lieux industriels, véritables poèmes visuels
    - les scènes de groupes, captivantes et profondément dépaysantes (karaoké entre collègues après le travail, séjour à l'hôpital pour traiter les maladies dues au plomb, jour de paye, jeux d'échecs chinois, discussions sur l'avenir de l'usine, essais de vêtements)
    - les interventions de personnes seules face à la caméra, qui sont autant d'historiettes émouvantes et parfois bouleversantes

    Wang Bing sait faire ressentir le temps qui passe (les évènements se déroulent sur plusieurs années) et de nombreux évènements marquants scandent le récit (un ouvrier est licencié, un autre meurt accidentellement dans une mare, du métal en fusion se répand accidentellement sur le sol..). On s'attache progressivement à ces Chinois qui paraissent toujours stoïques face à l'absurdité ubuesque de certaine situation.

    Le film parvient ainsi à tenir en haleine (une gageure !), tout en présentant un objet qui ne ressemble à aucun autre et qui laissera à coup sûr son empreinte dans l'histoire du cinéma. D'autres critiques sur Christoblog : http://chris666.blogs.allocine.fr/
    Pascal
    Pascal

    159 abonnés 1 651 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 7 septembre 2021
    Après avoir découvert au cinéma "le fossé " puis " les âmes mortes", j'ai finalement pu voir, mais cette fois en dvd, " A l'ouest des rails" du documentariste chinois Wang Bing. Au plan formel, cette œuvre se présente sous la forme de trois parties, faisant un ensemble de plus de 9hoo ( Rouille puis Vestiges enfin Rails). Dans le supplément dvd , Wang Bing , dont A l'ouest ... sera sa première réalisation explique que son film a été entrepris sans but précis. Il s'agissait pour lui de se familiariser avec une caméra. Étudiant dans la ville de Shenyang, il a décidé de filmer ce qu'il voyait dans trois ateliers situés dans un immense complexe industriel qui datait de la guerre et qui fonctionnait toujours en 2000. Le film a été vu en Occident comme une illustration des changements économiques dans la chine contemporaine. C'est vrai, mais pas seulement. Finalement cette série de films nous montre à quelle vitesse se produit un changement de civilisation. Et le regard de Wang Bing sur son propre pays, pourrait tout à fait se décliner sous nos latitudes. Tout à l'air immuable quand soudain tout change et le basculement radical se produit à la vitesse de la lumière. Pour le meilleur ? On n'en saura pas grand chose ( sauf succintement à la fin de Rails). Maintenant l'expérience que va connaître le spectateur de A l'ouest des rails, se mérite de part sa durée, son rythme assez lent dont on comprendra raison qu'à chacune des fins de chacun des films. Œuvre essentielle elle ouvre les yeux du spectateur sur quelque chose d'invisible et qui pourtant est là devant nous. Mais sa durée est telle que peu de spectateurs verront intégralement ce film, finalement réservé aux happy few. A l'ouest des rails est à la fois une épiphanie, une prise de conscience et une expérience de la vie et de la mort et peut-être du caractère cyclique du temps. Il y a un peu de Splenger dans ce film.
    Michel Gillen
    Michel Gillen

    23 abonnés 155 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 31 décembre 2023
    Document remarquable, où les conditions de vie de ces travailleurs sont montrés sans misérabilisme mais qui donne une vision de la vie des ouvriers chinois qui m'a permis d'enrichir mon point de vue concernant la nature de ce régime que je caracteriserai de mafioso. c'est selon moi ce que doit apporter le cinéma, l'art du 20eme siècle..
    stans007
    stans007

    23 abonnés 1 314 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 9 mars 2022
    3ème partie d’une fresque de 9 heures, plutôt médiocre techniquement, décrivant le déclin de la zone industrielle de Shenyang, dans les années 1999-2000, au Nord-Est de la Chine. On se promène longuement dans un décor sinistre –industriel, crasseux, froid, désolé – en compagnie des rudes employés du chemin de fer et des coups de klaxon de la locomotive. Conditions de vie pénibles avec altercations, pauvreté, omniprésence de la police, c’est un documentaire extraordinaire sur la Chine de l’après-Mao, au tout début de son expansion, à voir absolument.
    Arthur Debussy
    Arthur Debussy

    155 abonnés 693 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 19 mai 2012
    Formidable aventure humaine, «A l'Ouest des Rails» est une expérience marquante pour le spectateur, aussi bien par sa durée que par la richesse de ce qu'elle filme. Rien que pour sa longueur, paradoxalement nécessaire pour rendre compte de la vitesse à laquelle la Chine évolue, l'on ne peut oublier un tel film. 9 heures! 9 heures consacrées à la vie d'ouvriers chinois au chômage et dans une misère noire, vie qu'on partage d'une certaine manière, grâce à Wang Bing et sa volonté de témoigner d'une réalité qui peu à peu s'évanouit, d'une humanité meurtrie mais pas pour autant réduite à néant. Parlons justement de Wang Bing : rien que sa démarche force l'admiration. Aller passer 2 ans environ au sein d'une population d'une pauvreté incroyable, vivre leur vie, parler d'eux, filmer les individualités, et ce toujours avec une honnêteté, une curiosité, une humilité rares... Bravo! A l'image de ce travelling incessant, à l'avant de ces trains roulant sans arrêt sur des rails sans fin, la caméra de Wang Bing va vers l'inconnu et ne s'arrête jamais. Il enregistre les moments les plus banals comme les plus émouvants, mettant sur un pied d'égalité chaque instant, qu'il s'agisse des plus tragiques ou des plus drôles. Wang Bing filme La Vie, et plus particulièrement une vie, celle des habitants d'un vieux quartier industriel de Shenyang, promis à la disparition. Pas de discours politique martelé, pas de point de vue partial ou biaisé, pas de commentaires (ou si peu) : Wang Bing s'efface devant son monumental sujet, bien que l'on puisse tout de même reconnaître ça et là la beauté de ses plans, cette façon qu'il a de sublimer une réalité peu avenante. Alors certes «A l'Ouest des Rails» n'est pas un long métrage vraiment révolutionnaire, mais il montre tant de courage et de disponibilité, de la part des personnes filmées comme du cinéaste, qu'il mérite la plus grande des reconnaissances. Un peu long mais ô combien nécessaire, un magnifique documentaire à voir sans hésiter! [3/4] http://artetpoiesis.blogspot.fr/
    anonyme
    Un visiteur
    5,0
    Publiée le 16 mai 2008
    Avant de poster ce commentaire, une seule question me trottait dans l'esprit: comment vais-je parler de "A l'ouest des rails" sans tomber inéluctablement dans une accumulation de superlatifs ? un sacré dilemme en effet, car l'œuvre qui nous est présentée ici, ce véritable voyage en Chine, que Wang Bing a tourné est un témoignage extraordinaire, auquel on ne peut que en remercier infiniment le réalisateur, car le travail fourni est tout simplement monumental, 9h de film, plus d'une année passée avec les ouvriers chinois, comprendre leur condition de vie, etc...

    Le documentaire est divisé en 3 parties, Rouille, Vestiges et Rails.

    Rouille traite de la condition de travail des ouvriers restants, dans ce complexe industriel au bord de la faillite et où chaque ouvrier ne reçoit pas forcément son salaire tout les mois, en plus d'être dérisoire.
    Cette partie nous fait terriblement bien prendre conscience du calvaire d'un tel métier, travailler dans la fumée toxique dégagé par certains matériaux, dans une chaleur insoutenable, un travail physique et répétitif, insupportable.
    Les plans de Bing sont tout simplement fabuleux.

    Vestiges filme le quartier des employés, quartier pauvre évidemment, beaucoup vivent dans la misère la plus totale mais font tout pour s'en sortir, un effort terrible et éternel, juste pour pouvoir survivre.
    Le complexe industriel faisant faillite, du jour au lendemain tout le monde se voit expulsé de chez eux, sans mot dire les gens doivent quitter ces lieus où plusieurs vivent depuis leur naissance.
    Certains resteront même au-delà des menaces des promoteurs, ils y resteront sans électricité ni chauffage jusqu'au moment fatidique. Poignant.

    Rails nous parle cette fois, de l'énorme réseau ferroviaire appartenant au complexe, soit 20 km de rails, dans lesquelles les trains semblent se conduire sans destination finale, où les cheminots sont les personnes dont on nous parle, ou plutôt que Wang Bing filme, et une fois de plus on est percuté de
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