Après le gigantesque carton du Grand Bleu (plus de 9 millions d’entrées en France, ce qui permit à Besson de ressortir une version longue sur grand écran à peine 8 mois plus tard), Luc Besson change de registre pour s’orienter plus vers le film d’action avec Nikita.
Cependant, malgré ses séquences d’action (finalement pas si nombreuses que cela), le film est loin de négliger le traitement de ses personnages. Ceux-ci sont assez finement développés et sont tous attachants. Toutefois, Besson n’a une fois encore pas évité certaines facilités de scénario.
Celles-ci ne sont pas nombreuses puisqu’elles ne sont qu’à l’ordre de 2 mais hélas concernent deux points cruciaux de l’intrigue : on ne saura jamais réellement ce qui pousser le "flair" de Bob à choisir une junkie complètement paumée et tueuse de flics pour en faire une tueuse à gages au service de l’état et on ne connaitra jamais comment Marco a découvert du jour au lendemain la réelle identité de Marie/Nikita (sur ce point, la fin d’origine semblait plus logique et aurait été plus spectaculaire).
Ces deux manques de développement sont une fois encore d’autant plus regrettables que Besson possède pour le reste un vrai bon scénario mélangeant avec un juste équilibre polar et film d’amour (une espèce de croisement entre le cinéma américain et le cinéma français, bien que ce dernier a un grand passé dans le genre policier que l’on oublie un peu de nos jours).
La mise en scène est éblouissante : Besson possède une totale maitrise de la caméra et le prouve à travers des scènes d’action éblouissantes
, en particulier la célèbre scène du restaurant (contenant le non célèbre plan subjectif de la balle)
. Toutefois, il ne faudrait pas le limiter à un habile technicien (qui se permet de jouer avec des lumières bleues et vertes dans la séquence d’ouverture sans tomber dans le ridicule) car il est tout aussi juste dans la direction d’acteurs.
Ainsi, le film possède un casting impressionnant qui regorge de prestations brillantes (Tchéky Karyo, Jean-Hugues Anglade, Jeanne Moreau, Roland Blanche, Mia Frye dans une apparition à la limite de la figuration ou encore Jean Reno dans un rôle ne dépassant pas le quart d’heure mais qui influencera fortement le reste de sa carrière et en particulier le rôle de Léon du même Besson). Mais celle qui éclipse tout ce beau monde est belle et bien Anne Parillaud éblouissante dans ce qui reste son rôle le plus marquant : elle est tout aussi crédible en délinquante rebelle et droguée qu’en tueuse à gages cherchant à sauver sa vie et à trouver l’amour. Besson, à l’époque en couple avec elle, lui a offert un réel cadeau qui lui permettra de recevoir le César de la meilleure actrice en 1991 (cérémonie où, ironie du sort, le cinéaste rencontrera la très jeune Maïween Le Besco pour laquelle il quittera Anne Parillaud).
Enfin, comment oublier la musique d’Éric Serra soulignant parfaitement les scènes romantiques et les moments de tension (en particulier grâce à son morceau The Dark Side of time, sûrement le titre le plus marquant de sa carrière) ?
Ainsi, Nikita reste de nos jours parmi les œuvres les plus marquantes du Luc Besson et a connu à juste titre un gros succès en France et à l’international, devenant par la même occasion le premier film français à dépasser la barre des 5 millions de dollars de recettes aux États-Unis
(on peut même se demander si le fait de retrouver, l’année suivante, une scène d’interrogatoire où une femme transperce la main de son questionneur dans Terminator 2 : Le Jugement dernier est un hasard)
, ce qui entrainera des déclinaisons au film avec des remakes hong-kongais (Black Cat en 1991 et Black Cat 2 en 1992) et américain (Nom de code : Nina en 1993) et des séries télévisées (La Femme Nikita en 1997 et Nikita en 2010).