Francis Ford Coppola a fait réaliser par un dessinateur un storyboard d'un millier d'images et l'a filmé pour créer une version animée sommaire du film. Il l'a mis en musique en y intégrant des images de La Belle et la bête de Jean Cocteau et d'œuvres de Gustav Klimt afin de montrer à ses décorateurs et costumiers des exemples de l'esthétique qu'il souhaite donner au film (l'un des vêtements de Dracula est directement inspiré d'une peinture de Klimt intitulée "Le Baiser"). A noter par ailleurs que deux très grands noms des comics participèrent à la création d'illustrations pour le film : Jim Steranko, qui travailla sur des dessins préparatoires du film. Célèbre notamment pour avoir créé le personnage de Nick Fury dans les années 60, Steranko fut entre autre chargé du concept artistique d'Les Aventuriers de l'Arche perdue, en créant le look du plus célèbre archéologue du 7e art. L'autre illustrateur est bien connu chez les lecteurs de Dark Horse Comics : Mike Mignola, le papa d'un certain Hellboy.
Pour Francis Ford Coppola, il était important que les acteurs passent le plus de temps possible entre eux; notamment pour les répétitions et la phase de pré-production du film. "On a tous des souvenirs communs, mais pas les acteurs" explique le réalisateur; "J'essayais de leur créer des souvenirs : dîners, blagues, jeux..." Une méthode qui ne plaisait pas forcément à Anthony Hopkins, qui incarne Van Helsing : "je n'aime pas les atmosphères familiales. Je déteste les familles. Je pars dès la fin des répétitions, j'ai toujours été un vagabond. Je déteste être enfermé, mais Francis voulait qu'on soit unis". Gary Oldman ajoute : "Francis nous a fait faire des trucs pour entrer dans le personnage. Ils ont fait ds tours en ballon, vêtu comme dans le films, Keanu allait faire du cheval...et moi j'ai dit : "Que dois-je faire ? J'ai 400 ans et je suis supposé être mort !"
Ce fut Winona Ryder qui apporta à Francis Ford Coppola l'idée de réaliser une nouvelle adaptation du célébrissime roman de Bram Stoker. L'agent de l'actrice lui avait donné une pile de scripts, et l'un d'entre eux était intitulé : "Dracula : the Untold Story". Le réalisateur Michael Apted fut d'abord contacté pour réaliser un téléfilm, avant de décliner l'offre. L'actrice eut alors l'idée de contacter Coppola pour lui soumettre l'idée de réaliser non pas un téléfilm, mais un film. Le cinéaste accepta d'autant plus volontiers que Winona Ryder devait jouer dans son film Le Parrain, 3e partie et tenir le rôle de Mary Corleone, finalement tenue par Sofia Coppola. Pour ne pas froisser Michael Apted, Coppola accepta de réaliser Dracula à condition que Michael apted soit le producteur exécutif du futur film; ce que ce dernier accepta.
Le vrai Dracula, ou plutôt celui que l’on appela Vlad Tepes ("Tepes" signifiant "l’empaleur" en roumain), appartient à l’Histoire ; la vraie. Né fin novembre – début décembre 1431 à Târgoviste, capitale et cour princière de Valachie, le futur souverain Vlad III eut une enfance difficile. En 1442, il est envoyé comme otage au sultan Murad II, avec son jeune frère Radu III l'Élégant; il est retenu en Turquie jusqu'en 1448, et son frère jusqu'en 1462. Cette période de captivité turque a joué un rôle important dans la montée au pouvoir de Vlad. Probablement a-t-il adopté durant cette période son attitude intransigeante face à la vie. Le supplice du pal était inconnu à cette époque dans toute l'Europe car il était l'apanage des Turcs : on peut penser que Draculea a découvert ce supplice durant son séjour et l'a ramené chez lui. En août 1456, après des années de lutte pour l'accession au trône de Valachie, Vlad III l'Empaleur commence une période de règne de six ans, pendant laquelle il sait qu'il ne peut garder sa place qu'en la défendant chèrement contre tous ceux qui la convoitent. Il établit un régime de terreur dans l'aristocratie, de telle façon que tous le redoutent et le craignent. Cherchant à se venger contre ceux qui tuèrent son père, il fit arrêter le dimanche de Pâques 1459 toutes les familles coupables qui faisaient la fête à la cour princière. Après avoir mis au pal les plus vieux, il oblige le reste à marcher une centaine de kilomètres, sur une route difficile. Beaucoup trouvent la mort en chemin. En 1462, il lance une campagne contre les Turcs sur le Danube, tuant plus de 30 000 hommes, et fait clouer sur leur tête les turbans des émissaires du Sultan de l'empire Ottoman. Ce dernier envahit la Valachie pour châtier Vlad III. Arrivé aux portes de Târgoviste, la capitale, Vlad lui réserve une vision d'horreur : sur des centaines de pals, les corps de nombreux prisonniers turcs sont dressés. Une scène si terrifiante qu'elle fut surnommée "la Forêt des Pals"...En 1476, Vlad est reconnu à nouveau comme prince de Valachie, mais il ne se réjouit que peu de temps de son troisième règne. Il est assassiné à la fin du mois de décembre 1476 à Bucarest. Le corps de Vlad Tepes est décapité et sa tête envoyée au sultan, qui la pique sur un pieu comme preuve de sa mort.
L'impressionnante scène se déroulant à l'asile, où Dracula affronte dans une chambre Van Helsing alors qu'il est transformé en chauve-souris, fut l'objet de vives tensions lors des répétitions avant le début du tournage. En fait, Gary Oldman trouvait que la scène ne fonctionnait pas, que son personnage n'était pas assez effrayant : "ca ne marchait pas; je voulais discuter du contenu de la scène, en disant : c'est une répétition valable autant pour toi que pour moi" dira-t-il plus tard. Excédé, Francis Ford Coppola rétorqua alors au moment des répétitions : "Relisez plusieurs fois la scène et étudiez le rythme ! Quand vous sentirez bien le rythme, vous pourrez la jouer. Je ne me sent pas capable de la mettre en scène maintenant". "Je me suis dit qu'il fallait suivre le mouvement. Ce fut une leçon" se souvient Anthony Hopkins; "je suis un bagarreur, j'adore donner des coups. Mais maintenant, j'apprends mes dialogues et je m'exécute. C'est plus simple". Ce n'est finalement qu'après ces échanges quelque peu houleux que Coppola eut alors l'idée de grimer Gary Oldman en chauve-souris vampire, comme on le voit à l'écran.
En cinéphile averti, Francis Ford Coppola a parsemé son film de nombreuses références aux précédentes oeuvres mettant en scène le comte Dracula. Par exemple avec le personnage de Renfield, joué par le musicien Tom Waits, qui est dans le film son malheureux prédécesseur ayant succombé à la folie. Ce personnage a été mis en scène à plusieurs reprises, notamment dans le chef-d'oeuvre de Friedrich Wilhelm Murnau, Nosferatu. La scène où Dracula sort en s'élevant de son cercueil est également un emprunt - hommage à Nosferatu. Lorsque Gary Oldman déclare à Keanu Reeves "je ne bois jamais...de vin", peu après l'arrivée au château de ce dernier, cette réplique est un hommage rendu au Dracula de Tod Browning, incarné par Bela Lugosi. Autre exemple : l'asile de fous à Londres, où est interné Renfield. Lorsque ceux-ci rentrent en quasi "transe", annonçant en fait la venue du Comte, c'est une référence au Dracula de John Badham. On peut également noter une référence, plus poétique cette fois-ci, à La Belle et la bête de Jean Cocteau, lorsque Dracula change en diamants les larmes de Mina.
De la version incarnée par Bela Lugosi en passant par celle de Christopher Lee ou le Nosferatu de Friedrich Wilhelm Murnau, on relève près de 200 incarnations de Dracula. Pour autant, la version proposée par Francis Ford Coppola se démarque de bon nombre des versions précédentes en ce que, tout comme dans le roman, Dracula apparaît d'abord comme un vieil homme, et rajeunissant au fur et à mesure du film, grâce à sa consommation de sang; fidèle en cela à l'une des phrases-clés répétées dans le film : "le sang, c'est la vie !" Toutefois, le metteur en scène s'écarte sensiblement du roman lorsqu'il présente Gary Oldman en vieillard. Dans le roman, Dracula est décrit comme un vieil homme assez grand, rasé de près avec une fine et longue moustache, vêtu de noir de la tête aux pieds, sans une once de couleur sur lui. Dans le film au contraire, il est de taille moyenne, ne porte pas de moustache, et porte une sorte de robe de chambre richement décorée, de pourpre et d'or, avec les motifs de dragons; l'ordre de chevalerie à laquelle appartenait le vrai Dracula.
C’est à l’immense artiste et créatrice Eiko Ishioka que l’on doit les somptueux costumes du film. Graphiste, vidéaste, réalisatrice de clips et créatrice de costumes, elle est née à Tokyo le 12 juillet 1939. Elle étudia le design à la Tokyo National University of Fine Arts & Music. Son travail avec Francis Ford Coppola a débuté quand celui-ci lui a confié la conception de l’affiche d’Apocalypse Now. Elle a ensuite travaillé sur Mishima, l’extraordinaire film de Paul Schrader et produit par Coppola. Son travail novateur pour Dracula lui a permis d’être considéré comme un talent-clé. Comme toute l’esthétique du film, les costumes ont été inspirés par de nombreuses influences : les peintres symboliques, notamment Gustav Klimt, les surréalistes, Botticelli, Rossetti…et de la recherche historique consacrée à l’époque victorienne où se déroule une partie de l’intrigue. Son travail a été justement récompensé par l’Oscar des Meilleurs costumes. Pour la petite histoire, Ishioka n’avait, avant de travailler sur le film Dracula, jamais vu de film sur ce légendaire personnage. Cela parait difficile à croire, et pourtant ! Elle fut d’ailleurs initialement engagée par Coppola pour être la directrice artistique. C’est après avoir vu ses dessins que le réalisateur décida de lui confier la création des costumes du film. Eiko Ishioka est décédée le 21 janvier 2012.
Dès le départ, Francis Ford Coppola ne voulait surtout pas avoir recours aux effets spéciaux générés à partir des ordinateurs; il voulait, selon ses propres termes, travailler "à l'ancienne". C'est ainsi qu'il a fait appel à son fil alors âgé de 29 ans, Roman Coppola, qui a utilisé les vieux trucages du cinéma. On relève plusieurs exemples dans le film. Par exemple lorsque Jonathan Harker se rend en Transylvanie, et que la carte de la région se place en surimpression sur son visage. Un effet très simple obtenu en projetant l'image de la carte sur le visage de Keanu Reeves. Dans la même scène, on peut aussi voir les yeux maléfiques de Dracula qui apparaissent dans le ciel, regardant Harker. Un effet obtenu à partir de trois plans combinés : le premier plan montrant les yeux de Gary Oldman, maquillé de telle manière qu'on ne puisse voir que ses yeux lorsque l'image est projetée dans le ciel; le second consistant à projeter un oeil sur le décor des montagnes des Carpathes, soulignant l'illusion d'avoir deux yeux regardant dans le ciel et non plus un seul; et enfin un plan consistant à filmer Keanu Reeves assis dans le train, combiné avec les deux plans précédents. Tous les trucages furent réalisés au moment du tournage; aucun en post-production.
James V. Hart, auteur du script, a en fait commencé son travail en...1977 ! A l'époque, il avait alors en tête de confier la réalisation du film à David Lean (!), qui déclina de toute façon le script car ce dernier travaillait à la réalisation d'un film baptisé Nostromo, qui fut abandonné à son décès. Rien à voir avec le nom du vaisseau de l'Alien de Ridley Scott, puisqu'il s'agit d'une oeuvre de Joseph Conrad publiée en 1904, et se déroulant au XIXe siècle dans un pays d'Amérique du Sud. L'idée centrale de Hart, c'est de partir du roman, et non comme trop souvent de la pièce de théâtre adaptée du roman. "Tous les films de Dracula que j'ai vu ne tiennent pas la route comparé à ce qu'a écrit Bram Stoker en 1897" se souvient le scénariste, peu après le début du tournage. "Stoker, c'est ce régisseur empâté et sévère du Lyceum Theatre. Il écrit un roman incroyablement érotique, fiévreux, oral, humide, qu'on a fui comme la peste. Alors j'ai dit aux gens de lire le livre. Personne ne lit les livres à Los Angeles !". Une séance de lecture -complète- du livre, à voix haute et durant deux jours, fut ainsi organisée chez Francis Ford Coppola, avec les Casting.
Francis Ford Coppola a confié qu'après avoir tourné une version stylisée de la scène du mariage, il n'était pas comptant du résultat à l'image. Il tourna donc une version réaliste, un véritable mariage orthodoxe suivant la tradition grecque pour unir les personnages de Keanu Reeves et Winona Ryder. La cérémonie ayant été effectuée complètement, Ryder et Reeves sont "techniquement" mari et femme. Cependant, la scène dans le film étant muette, on ignore si le mariage a été fait avec le nom de leurs personnages ou leurs véritables noms.