S'il y a bien une chose à dire de Pixar, c'est que le studio ne manque pas de mordant. Avec Toy Story, il offrait le premier film d'animation en image de synthèse et révolutionnait l'esthétique du genre pour toujours. Par la suite, il transcendait les espoirs à coup de fantaisie et d'intelligence. Enchainant les projets originaux, mêlant personnages singuliers et motifs universels, le studio à la lampe de bureau illuminent des millions de spectateurs, les adultes s'y retrouvant autant que les enfants. Curieusement, c'est en s'attaquant à des héros plus "classiques" qu'il établit sa suprématie. Et pas seulement sur le cinéma d'animation. À l'heure où les super-héros connaissent un nouvel essor, Pixar s'empare également du sujet. Pourquoi donc surfer sur la vague alors que son talent était de déjouer les attentes? Il y a sûrement une part de défi, comme dans toute entreprise. Mais surtout parce que lui-aussi a des choses à dire. Et Les Indestructibles le dit mieux que personne. Brad Bird (réalisateur du Géant de Fer, qui porte bien son nom) convoque l'esthétisme des James Bond période sixties (décors entre démesure et minimalisme, paysages exotiques) et la mêle aux thématiques "super-héroïques". Le cocktail détonne. Les Indestructibles trouve l'équilibre parfait en fun et sérieux, offrant des séquences d'action dont la maîtrise a de quoi faire des jaloux et un discours d'une maturité peu répandue dans le domaine. Comme nous, ces super-héros cherchent leur place dans le monde. Il est d'ailleurs à mettre au crédit du film de proposer des personnages aux super-pouvoirs en parfaite adéquation avec leur condition. Mr Indestructible représente le pilier de la famille chancelant sous le poids écrasant de cette "vie normale". Elastigirl, doit faire le grand écart entre ses responsabilités entre son rôle de femme, de mère et celui d'héroïne. Leur fille aînée, Violette, veut se faire remarquer par son grand amour mais utilise son invisibilité par manque de confiance en elle. Dashiell, son petit frère, rapide comme l'éclair, a lui bien du mal à masquer sa vivacité. Joker pour le petit dernier - le bébé Jack-Jack - qui reste autant un mystère pour sa famille que pour nous.
Bref, à l'exception de ce dernier, tous devront parvenir à une harmonie entre ce qu'ils sont et ce qu'ils doivent être. Et c'est une joie de tous les instants que d'assister à leurs (més)aventures. Alors que Hollywood échoue à les traiter correctement, Brad Bird propose une relecture parfaitement synchrone des 4 Fantastiques. Jubilatoire et désopilant, Les Indestructibles met à l'amende le blockbuster moderne en combinant spectacle de première ordre et personnages virtuels bien plus "réels" que beaucoup d'autres en chair et en os. Pixar laisse libre cours à son inventivité, prend de l'avance sur bon nombre de ses collègues et laisse les autres sur le carreau. Une démonstration de force.