Les Monstres de Dino Risi est considéré par beaucoup comme l'une des meilleures comédies italiennes de l'âge d'or du genre, dans les années soixante. Observateur implacable de ses contemporains, pourfendeur des travers son époque, Dino Risi laisse libre cours à sa verve satirique. En une vingtaine de "tableaux", le cinéaste croque une humanité dont la bêtise n'a d'égale que la cruauté. Un résultat que l'on doit en grande partie aussi à la plume trempée dans l'acide de brillants scénaristes : Furio Scarpelli, Agenore Incrocci Ruggero Maccari, sans oublier Ettore Scola. Pour la petite histoire, l'expression consacrée de "comédie à l'italienne" avait le don d'agacer Dino Risi, qui déclara : "Pourquoi s'obstiner à dire " comédie à l'italienne " ? Celles qui sont faites en Amérique ne sont pas appelés " à l'américaine ". Si les critiques aiment les étiquettes, je proposerais celle-ci : " la comédie à l'italienne comme la définissent les critiques à l'italienne".
Acteur principal du film aux côtés d'Ugo Tognazzi, Vittorio Gassman, décédé en 2000, a souvent déclaré que le tournage des Monstres figurait parmi ses meilleurs souvenirs au cours de sa carrière. Il déclarait ainsi en 1999 : "Dino Risi est le metteur en scène avec lequel je me suis le plus amusé. Il comptait sur l'improvisation. On inventait continuellement. Il avait un talent pour l'observation du détail, une curiosité pour tout ce qui se passe. On s'est amusés comme des fous !". Vittorio Gassman était l'un des acteurs fétiches du cinéaste : ils tournèrent ensemble pas moins de seize films, devenus des classiques : Le Fanfaron, La Marche sur Rome, Au nom du peuple italien, Parfum de femme, Cher Papa...
En 1977, Dino Risi donne une suite à ses Monstres, avec Les Nouveaux Monstres, cité à l'Oscar du Meilleur film étranger en 1979. Mais il est cette fois-ci entouré d'un autre grand nom de la comédie italienne : Mario Monicelli, ainsi qu'Ettore Scola. On y retrouve les plumes acérées de Agenore Incrocci, Ruggero Maccari et celle de Ettore Scola. Dans ce film, les intellectuels, l'Eglise et la domination masculine continuent d'être les cibles favorites de Dino Risi. Si le film reste une féroce comédie, celle-ci va encore plus loin que le volet de 1963 : le cinéaste dépeint les désillusions d'une société au bord du chaos. Une tonalité tragi-comique qui doit aussi beaucoup au contexte politique très tendue de l'Italie, alors en proie aux "années de plomb" marquées par de nombreux actes terroristes.
Les plus attentifs des spectateurs auront sans doute remarqué la présence de Michèle Mercier dans le sketch L'oppio dei popoli. En 1963, à la date de la réalisation du film, l'actrice avait déjà joué de petits rôles dans une vingtaine de films. Mais ce n'est qu'en 1964 qu'elle deviendra une véritable icône du grand écran, éclipsant même temporairement le phénomène Brigitte Bardot, avec Angélique marquise des anges.