L’ultime réalisation de Michael Curtiz remplit le cahier des charges du western classique : les grands espaces du grand Ouest américain (le Texas), des indiens (les comanches), des hommes blancs affublés de colts et fusils (les Rangers), des hommes qui profitaient de la guerre entre les tribus amérindiennes et les hommes colonisateurs et, bien sûr, des fusillades. Et pourtant, "Les comancheros" ne figure pas parmi les films majeurs du réalisateur de "Les aventures de Robin des bois", pas plus que dans la filmographie de John Wayne, grand spécialiste du genre. Bon après, il faut dire que l’acteur américain en a tourné des tonnes, et de très bons dans le lot. Mais quand on voit que dans la distribution des rôles figurent Lee Marvin et Stuart Whitman, on se dit qu’on va avoir droit à de belles confrontations. Hélas, en dépit d’une bonne petite pige avec John Wayne, Lee Marvin ne fera qu’une assez courte apparition. Tout repose en fait sur l’association entre un Texas Ranger (John Wayne) et un joueur professionnel de poker, deux gars pas vraiment issus du même monde. Constat régulièrement rappelé non sans ironie par le capitaine Cutter. C’est d’ailleurs par ce Texas Ranger gradé qu’un soupçon d’humour a été incorporé. Oh pas grand-chose, mais quand on connait John Wayne, on s’attend à quelques-uns de ses bons mots auxquels il a pris l’habitude de gratifier le spectateur. Et en effet, il ne s’en prive guère dès que l’opportunité se présente, tantôt par une métaphore personnifiée en Père Noël, tantôt par son goût « immodéré et soudain » envers les mulets. En somme, John Wayne est égal à lui-même et fait ce qu’il sait faire de mieux : du John Wayne, son côté bourru envers les femmes en moins. Là, aucune surprise digne de ce nom de ce côté-là. La surprise, si tant est que ça en est une si on ne tient compte du titre, c’est que la confrontation se déplacera entre le nouveau duo et ceux qui vivent dans l’ombre. Et c’est là que réside mon principal problème : les méchants ne sont finalement qu’assez peu exploités, relayant en même temps les comanches en toile de fond (et encore). La faute en revient-elle à cette romance que je considère pourtant comme bien peu crédible, pour ne pas dire impossible ? Oui impossible, si on tient compte des origines du père de Pilar et la nouvelle condition de Paul Regret. Toujours-est-il que du côté des méchants, il y avait matière à développer. Quand bien même, Michael Ansara tire tout de même son épingle du jeu en dépit de ses rares et courtes apparitions dans la peau d’Amelung, tandis que Nehemiah Persoff en Graile n’inspire pas vraiment de véritable inquiétude. Je trouve que c’est dommage, cela aurait permis d’installer une certaine tension. Parce que le suspense, il n’y en a guère : on sait d’avance que nos héros vont s’en sortir ! Ainsi était fait le cinéma d’antan… Il n’empêche que j’ai trouvé le final un peu parachuté, un comble pour un film qui approche les 2 heures. Aussi je dis qu’il manque quelques éléments sur l’ange gardien âgé seulement de 18 ans, lequel disparait lentement mais sûrement de l’écran. Qu’importe, les vieux briscards de ma génération et de celles qui la précèdent auront plaisir à retrouver le charme désuet du cinéma d’antan tourné en cinémascope, d’autant qu’on entend dès le générique de début un des thèmes les plus connus du monde des westerns.