A l'époque, ce premier film de Steven Spielberg tourné en 12 jours pour la télévision américaine n'était pas destiné aux salles obscures. Pourtant, un joli succès d'audience plus tard et rallongé de 17 minutes, le voici prêt à se frotter à l’œil des cinéphiles. Une conversion un poil inattendue sans doute responsable du seul défaut léger du film, à savoir des longueurs du à un pitch forcément un peu redondant et dont ne souffrait sans doute pas une version originelle plus courte. Pour le reste, on admirait déjà le talent de Spielberg, qui réussissait lors de la phase d'ouverture de ce Duel une très belle mise en tension alors que le court synopsis était pourtant très clair sur la mise en place des événements. Mais le cadrage joue drôlement sur l'imagination, en variant énormément les plans et en en proposant donc certains très sophistiqués, demandant une grande précision technique. J'imagine donc assez bien comment, à l'époque, on pouvait se réjouir en imaginant ce que pourrait produire un réalisateur déjà capable de telles prouesses avec un budget dérisoire. La suite, on la connait. Mais revenons à Duel, qui lui se poursuivait plutôt en commençant à varier les situations après que Dennis Weaver ait compris autant que nous a quel point il était menacé. Prenant de nettes allures de western pour s'imprégner du côté brut que peuvent receler le genre et son vécu, Duel est pourtant loin de ses thématiques humaines puisqu'il cherche déjà à mettre en scène l'homme face à la mort sans visage, sans but précis, luttant pour sa survie pure. Bien qu'adapté d'une nouvelle et commandé par AMC, on comprend quand même pourquoi Duel a intéressé Spielberg tant il rappelle beaucoup de ses long-métrages futurs. D'ailleurs, le film ne développe pas à l'excès l'absurde pourtant latent de son scénario, ne s'occupe pas des buts ou des causes qui le nouent, cherchant juste à se concentrer sur la peur de Dennis Weaver et à montrer que seule la recherche d'un échappatoire nous importe quand celle-ci nous saisit. Reste peut-être un peu à redire sur la fin, quoique je n'en ai pas conçu tant de déception que beaucoup. Sinon, quelques défauts ponctuels, comme quelques transitions un peu abruptes, une scène de poursuite ou l'impression de vitesse me semble trop différente selon les différents angles. Mais franchement, rien de bien terrible, rien qui ne puisse empêcher Duel de tenir son rang parmi la filmographie monstrueuse de Steven Spielberg, malgré tous les mastodontes qu'elle comporte. Un petit exploit fait à partir de rien, annonciateur d'une des plus grandes carrières contemporaines.