Après l’austère (et décevant) remake de Jonathan Demme (avec Denzel Washington), j’avais eu envie de découvrir le film original de John Frankenheimer, tant cette histoire de soldats américains manipulés par une force ennemie ma paraissait prometteuse. Grand bien m’en a pris puisque ce thriller paranoïaque est une véritable réussite… ce qui rend son remake d’autant plus raté. On se retrouve plongé dans une Amérique crispée par une Guerre Froide qui bat son plein et on s’amuse, plus de 50 ans après, du ton terriblement anti-communiste de ce "Crime dans la tête" qui est, avant tout, un film de propagande visant à dénoncer le "Péril Rouge", qui peut surgir là on s’y attend le moins. La représentation des "Rouges" est, donc, monstrueusement caricaturale avec, en point d’orgue, la réunion de tous les courants communistes (Russes, Chinois, Cubains…) assistant à l’expérience pratiquée sur les soldats américains, qui résume à elle seule les intentions du film. Ce manque de subtilité participe pourtant au charme du film, qui remonte quand même à 1962 (Kennedy est encore vivant, la crise des missiles de Cuba pointe, la Guerre du Vietnam n’a pas encore commencé…) et qui exploite un filon intéressant (et si l’ennemi réussissait à retourner des soldats contre leur propre pays). Et cette ambiance paranoïaque est parfaitement mise en image par le réalisateur Frankenheimer qui sait magnifier le noir et blanc et ménager son rythme pour renforcer le malaise. Il parvient, ainsi, à rendre certaines scènes tout simplement glaçantes, à commencer par les meurtres perpétrés par ce pauvre Raymond Shaw (la mort de sa fiancée est sans doute la scène la plus marquante du film). Il faut dire que le réalisateur peut compter sur un formidable casting avec Frank Sinatra en héros américain patriote et volontaire (soit le soldat US parfait des 60’s), le méconnu Laurence Harvey en tueur qui s’ignore, l’incroyable Angela Lansbury en mère manipulatrice (le rôle le plus surprenant du film), James Gregory en détestable sénateur populiste ou encore, plus anecdotique, Janet Leigh dans le rôle uniquement décoratif de la petite amie du héros. Plus qu’inutile, cette love story ralentit le rythme du film et parait aujourd’hui franchement ridicule (la scène de la rencontre est assez invraisemblable tout comme les projets du nouveau couple). On se demande d’ailleurs pourquoi le réalisateur a ressenti le besoin de venir alourdir son intrigue de cette touche prétendument glamour au lieu de se concentrer simplement sur cette histoire de lavage de cerveau et de complot communiste, riche en rebondissements, jusqu’à la scène finale… qui a trouvé un retentissement inattendu avec l’assassinat en 1963 de Kennedy. "Un crime dans la tête" est donc un thriller paranoïaque rare et bien ficelé mais qui restera, malgré tout, comme un film de propagande anti-communiste un peu trop primaire dans son approche.