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Uncertainregard
113 abonnés
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4,0
Publiée le 20 janvier 2014
Une histoire d’amour toute bête qui apparemment historiquement s’avère vraie mais quelle interprétation et quelle mise en scène de Mizoguchi !! Une merveille, des plans d’une beauté, des travellings d’une précision et une direction d’acteur hors pair. Voilà un grand metteur en scène que je ne connaissais pas et qui est largement de la trempe d’un Kurosawa. Beaucoup de similitude entre eux d’ailleurs dans la façon de cadrer et de placer leurs personnages suivant le décor. Les costumes sont également somptueux et bien qu’on reste confiné en studio tout du long, les éclairages illuminent le tout comme par magie. Quelques scènes font un peu carton-pâte mais on passera aisément l’éponge jusqu’à la scène finale de ce film assez court mais où le sacrifice de cette impératrice prend tout son sens…
Une fois de plus Kenji Mizoguchi réalise avec « L'Impératrice Yang Kwei-Fei » un long métrage impressionnant de maîtrise, porté par la subtile interprétation de Machiko Kyô, de Masayuki Mori et, chose nouvelle, une pellicule en couleurs. Esthétiquement parlant, on retrouve ainsi la rigueur de la composition du plan commune à tous les films du japonais, et l'on peut découvrir en plus son talent à harmoniser les teintes, nuancées à l'infini. Pour ce qui est de ses qualités visuelles « L'Impératrice Yang Kwei-Fei » vaut donc largement le détour.
Mais il est tout aussi intéressant quant à son intrigue et aux thèmes qui le traversent. Si Mizoguchi s'est singulièrement éloigné de la vérité de l'histoire de l'empereur Xuan Zong et de Yang Guifei (en réalité bien moins héroïque que dans le film), il en a fait une tragédie remarquable, à l'image de ses « Amants Crucifiés », s'achevant avec la même mélancolie, étrangement sereine malgré une issue des plus funestes.
Là encore il est question d'amour impossible, de féminité asservie, de rites étouffants ou encore de dilemme entre vie publique et privée. Mais ce qui frappe davantage, c'est cette figure de l'artiste incarnée par l'empereur, profondément ambigüe : il est peut-être l'homme qui doit le plus avoir les pieds sur terre, au vu des immenses responsabilités qui lui incombent, et pourtant il ne rêve que d'ailleurs, d'art et de beau. Ce paradoxe matérialisé par son caractère indécis va peu à peu l'isoler de tout, et de la politique et de la beauté qui lui donnait la force de vivre, et ce aux dépens de son entourage, surtout de sa bien-aimée.
Le tableau que peint Mizoguchi de cette Chine féodale et de cet idéal artistique est donc particulièrement pessimiste, mais pour autant ne verse jamais dans le pathos, préférant une retenue des sentiments bien plus troublante qu'une tristesse exacerbée et non équivoque. « Les Contes de la Lune Vague après la Pluie » ne sont pas très loin, et « Yang Kwei-Fei » apparaît comme un parfait condensé de l’œuvre de Mizoguchi. Il ne s'agit certes pas de son long métrage le plus fort, mais de l'un des plus harmonieux et des plus maîtrisés. Un film magnifique.
Une fois n'est pas coutume, l'action de ce premier film de Mizoguchi en couleurs (et quelles couleurs !) se situe en Chine, au VIIIème siècle, sous l'empereur Xuanzong, plus artiste que véritable chef d'Etat. Si le film prend de grandes libertés avec l'Histoire, il n'en garde pas moins les éléments de base, parfaits pour une tragédie digne de ce nom : un amour impossible, le pouvoir, la guerre. De ce matériau ultra-classique rabâché depuis la nuit des temps, Mizoguchi en tire un film magnifique qui vous en apprend plus sur le cinéma que tout ce que vous pouvez voir aujourd'hui. Il est toujours fascinant de contempler le déplacement des personnages dans le cadre dans un film de Mizoguchi : on pourrait presque comprendre toute l'histoire sans sous-titres rien qu'en voyant un personnage dominé par un autre avant de reprendre le dessus ou bien encore deux personnages séparés par un obstacle ou un grand vide. Dans l'absolu, tout cinéaste devrait être capable de raconter une histoire uniquement par ses images : mais c'est un art, et Mizoguchi est probablement un des plus rigoureux du 7ème.
Pour son premier film en couleur, Kenji Mizoguchi nous propose une magnifique fresque historique mais qui est doté surtout d'une histoire profondément dramatique et tragique, et qui est rendu particulièrement touchante grâce à ces deux comédiens principaux que sont : la magnifique Machiko Kyo, qui interprète avec grande sensibilité le rôle de l'impératrice Yang, ainsi que Masayuki Mori, qui est magistral dans celui d'un l'empereur plein de solitude, mais aussi rempli de sincérité. Le réalisateur japonais filme cette oeuvre comme un véritable poème d'amour, avec une grande élégance et une grande justesse, ce qui fait que l'on suit l'ensemble avec une grande passion. A noter également, la présence d'une très belle photographie, de somptueux décors et d'une musique totalement relaxante, et le tout fait que l'on se trouve en présence d'un grand film asiatique qui obtiendra le Lion d'argent au festival de Venise en 1955.
C ‘est magnifique. Un amour fou par delà la mort, les jeux du pouvoir et de la séduction, un sens extraordinaire du cérémonial et de l’ellipse, et une photographie couleur splendide.
Si les commentaires sur l'histoire peuvent remplir des pages ,sur le plan du cinéma,un seul mot:perfection.C'est d'autant plus vrai que le scénario n'est guère passionnant,L'auteur s'en débarrasse d'ailleurs en disant tout dès les premières quinze minutes.L'art du cinéaste, sa maitrise des couleurs (malgré un procédé médiocre) son accompagnement musical et sa direction d'acteurs sont ici sans failles.Le coté émotionnel de ses autres films qui nous empêche parfois d'admirer sa façon de faire n'existe pas ici.Tout est peinture et poésie.La promenade du couple, incognito dans les rues de la ville, est un exemple parfait de mise en scène si maitrisée qu'on ne la remarque plus.La beauté est telle que les yeux sont nettoyés par les larmes chaque fois que l'impératrice apparait en plans rapprochés.Même son exécution est l'occasion d'un grand moment de douceur cinématographique.Ce film qui n'est pas considéré comme le meilleur de son auteur est pour moi visuellement le plus abouti.
"L’impératrice Yang Kwei Fei" est une merveille d’une splendeur absolue, une incarnation du Beau au cinéma, à l’instar d’autres films du cinéaste, comme "Les contes de la lune vague après la pluie", "Contes des chrysanthèmes tardifs", et tant d’autres… "Kwei Fei" est l’une des dernières œuvres de Mizoguchi, et l’on peut y voir un condensé de nombre des thématiques chères au cinéaste. Le film est d’abord l’histoire d’un amour, un amour pur construit sur la sincérité et la vérité, et qui ne peut de ce fait que rentrer en confrontation avec le monde de pouvoirs, d’ambitions, de mensonges, et de manipulations politiques dans lequel il éclot. Cette pureté est, comme toujours chez Mizoguchi, portée par le personnage d’une femme, incarnation des valeurs essentielles de la vie. Le sacrifice de celle-ci souligne toute l’absurdité de cette société rigide, prisonnière de ses propres codes, en même tant qu’il révèle toute la grandeur d’âme de l'impératrice, la hissant en une véritable figure légendaire. Cela donne lieu au passage à une scène proprement splendide, d'une beauté à en pleurer, qui se passe de commentaires: contentez-vous simplement d’admirer cette nouvelle illustration de l’art si raffiné de la mise en scène de Mizoguchi. Le cinéaste assène une nouvelle charge féroce à la vanité du pouvoir et des richesses qui ne procurent qu’une satisfaction éphémère et un bonheur paradoxal. Ce n’est que dans sa condition modeste que l’homme peut accéder à la liberté, dans sa faculté et sa capacité à jouir des plaisirs les plus simples de la vie, comme la contemplation de pruniers en fleurs, ou dans la création artistique (ici la musique), et bien sûr dans l’amour, ainsi que dans la relation non marchande avec les autres. "Kwei Fei" est par ailleurs un chef d’œuvre visuel de chaque instant, indiscutablement l’un des plus beaux films en couleurs de toute l’histoire du cinéma, porté par un travail musical remarquable. Mizoguchi atteint ici, une fois de plus, la perfection.
C’est l’ultime plan qui révèle tout l’arcane de «Yôkihi» (Japon, 1955) de Kenji Mizoguchi. Dans un décor de débris, vestiges du grand Empire chinois, retentissent le dialogue et les rires d’outre-tombe de deux amants qui, eux-seuls, survivront à la marche du temps. Bien avant cette heureuse révélation, c’est un long couloir de colonnes sur lequel s’entame le film. Au bout, un vieillard, l’ancien Empereur de Chine Huan-Tsung, contemple l’horizon du haut de sa fenêtre. Sommé à quitter l’endroit, il y répugne pour mieux se plonger une dernière fois dans le souvenir de sa seconde épouse, Yang Kwei-Fei. Dès lors émerge le souvenir, flash-back introduit par le travelling sur un voile léger qui nous emporte au-delà du temps. Blessé par le deuil de sa femme, le même Empereur Huan-Tsung se voit sollicité par de nouvelles prétendantes. Or sa musique seule peut apaiser ses maux. En parallèle, Mizoguchi développe l’histoire de Yang Kwei-Fei, cousine cuisinière de la famille des Yang. Sa beauté décelée, elle deviendra l’instrument de sa famille pour accéder au pouvoir. «Je serais toujours votre jouet» constate-t-elle. Au-delà de l’usage opportuniste dont est victime Yang Kwei-Fei, elle réussit de son seul chef à séduire l’Empereur. Cette façon dont le personnage, initialement outil de pouvoir, réussit à fleurir le cœur d’un homme dénote du féminisme poétique qui abonde le cinéma de Mizoguchi. La musique du générique, une douce mélodie, apparaît fréquemment et limbe le film de mélancolie. Quant au mouvement de caméra, ce ne sont jamais des fadaises stériles qui complaisent un besoin de ne pas stagner, ils incarnent toujours la présence perpétuel du cinéma qui enveloppe ici l’intrigue comme une estampe baigne les paysages. De ce bref portrait du Féminin, c’est la scène de mise à mort de Yang Kwei-Fei qui captive. Par l’unique glissé d’une robe dans le coin d’un plan, c’est le sublime qui prend forme, c’est les femmes toutes entières qui se sacrifient pour leur souvenir glorieux.
Un petit avis: j'ai voulu aller voir un film du cycle mais les copies sont en numérique (sauf pr Les Contes). Je suis allé voir la qualité, qui à mon sens est exécrable, j'ai donc fait le choix de ne pas y aller. Le rapport dans ce cas entre numérique et projection est mauvais, ce qui n'est pas tjs le cas. Présentement, j'estime qu'il vaut mieux voir un dvd sur un écran domestique qu'une telle projection (surtout à ce prix-là)... Dommage.
Ce premier film en couleur de Mizoguchi est, comment on peut s'y attendre, un régal visuel. J'ai particulièrement apprécié la manière dont y parle ici des sentiments, en particulier de leur naissance (j'aime moins la dernière scène, qui est plus à l'image de ses autres films). Mais le film aborde aussi avec justesse d'autres sujets (le pouvoir, la violence collective). Le point faible du film est le fait que les personnages chinois soient joués en japonais par des japonais, j'ai vraiment eu du mal à m'y faire.
Si Mizoguchi est Dieu, comme le soutient Skorecki, alors "l'Impétratrice Yang Kwei Fei" doit être la meilleure manière de contempler son essence divine. Je n'avais vu de ce film jusqu'alors qu'une version pitoyablement dégradée, et pouvoir contempler les couleurs originales d'une oeuvre qui fut le "premier" travail d'un grand maitre japonais sur pellicule couleur, ajoute un incroyable choc esthétique au choc émotionnel "habituel" de cette sublime histoire d'amour (doublée d'une réflexion politique accablante). La complexité émotionnelle de la moindre scène, la sensibilité de l'interprétation, la parfaite construction de chaque plan autour d'un éblouissant assemblage de couleurs subtiles, l'intelligence de chaque mouvement de caméra (on pense évidemment ici à la scène fulgurante de la pendaison de l'impératrice) font naitre finalement une nostalgie poignante pour la beauté de ce qui est presque un Art perdu...