Excellent. Spike Lee est décidément doué quand il s'agit de filmer les tensions inter ethniques... J'avais pu observer sa verve en la matière avec le monologue d'une dizaine de minutes d'Edward Norton dans la 25e heure, et je me rends compte qu'il avait déjà tapé très fort avant avec ce film. Il nous offre une œuvre très colorée, chaude (tout comme cette journée à Brooklyn) et chaleureuse (malgré le sérieux du sujet traité), dynamique, drôle et rythmée. Spike Lee est issu d'une minorité ethnique, et ça se ressent. Il sait de quoi il parle, et même si Do the right thing s’axe surtout sur la communauté noire, il donne une véritable âme à toutes les ethnies du film. Il saisit à point nommé les enjeux, les revendications et les aspirations des minorités majoritaires aux états-unis. Et il le démontre lors de cette (excellente) séquence où chaque représentant d'une communauté (noire, latino, hispanique, blanche, asiatique...) se renvoie la balle à coups de courts (mais très inspirés) monologues. Cette séquence est bien représentative du style Spike Lee : les acteurs déblatèrent leurs critiques et leurs reproches sans pause, sans temps de respiration, pour un résultat extrêmement rythmé et fluide. A côté du fait qu’il sait comprendre et retransmettre par ses dialogues ce problème (très) américain des divergences ethniques, Lee a aussi le talent pour le filmer. Sa manière de filmer est hyper «ghetto », tout à fait dans l’esprit du film. La forme se mêle parfaitement au fond : les prises de vue sont originales : des plans fixes en biais en passant des travellings avant rapides, tout est dans le même esprit. Lee joue aussi avec ironie sur les symboles : Le film se termine sur une chronique du dj radio (très justement interpreté par Jackson), or s’il y a bien un personnage dans le film qui fait la passerelle entre les ethnies et ne prend pas parti, c’est bien ce chroniqueur… La musique adoucit les mœurs. On remarque aussi avec ironie que lors de la scène où le type qui passe ses journées à écouter Public Ennemy est cloué au sol, c’est (ironie du sort), sa main droite portant la bague « LOVE » qui est au premier plan (joli clin d'oeil à La nuit du chasseur). Et pour finir Spike Lee nous laisse le choix de tirer les conclusions que l’on veut de son film… Une première citation de Luther King (dont la morale a été reprise par Americain History X) vient clore le film, puis s’ensuit une autre, de Malcom X, légitimant dans certains cas la violence. Laquelle Spike Lee choisit ? Je ne sais pas, et je ne veux pas spécialement le savoir. Du moment qu’il nous laisse le choix. Bref, je ne vais pas m’appesantir mais Do the right thing est vraiment une tuerie. A ne pas rater !