J’ai découvert Silvana Mangano récemment dans L’Argent de la vieille, une comédie grinçante très drôle dans lequel elle était excellente. Du coup, j’ai voulu en découvrir plus avec cette actrice, et Riz amer est l’un de ses rôles majeurs, donc, j’y suis allé. Verdict : c’est un très bon film du néo-réalisme italien. Excellent, chef-d’oeuvresque ? Peut-être pas. A mon sens, il manque pour ça un peu plus de profondeur, une intrigue plus travaillée, une fin plus subtile. En fait, le réalisateur s’intéresse vraiment à la représentation de cette activité de mondine, jamais portée à l’écran. Il explore le métier, la vie des travailleuses, c’est d’une grande finesse d’analyse, très réaliste, et c’est tout à fait passionnant. Rien à redire. Mais de fait, curieusement, l’intrigue des voleurs et du pseudo-gangster paraît collée là-dessus de manière assez artificielle et s’avère plutôt banal et déjà vu. Il est dommage que le film n’ait pas réussi à proposer une intrigue plus intrinsèquement liée au monde des mondines, à ce milieu très féminin, et amène un côté suspense policier finalement un peu décevant.
Cela étant, le film est plein de qualité. Visuellement, on ne pourra qu’apprécier le tournage en décors naturels, avec d’authentiques mondines, une connaissance visiblement précise des rituels et habitudes dans ce milieu qui offre des scènes parfaitement reconstituées et toujours très crédibles. La mise en scène est d’ailleurs fort habile et, il ne sert à rien de se le cacher, surtout pour mettre en valeur Silvana Mangano qui s’est forgée sa réputation de sex symbol avec ce film où elle y est très provocante. Les scènes de danse sont superbement filmées.
Le casting, venons-y justement ! Le métrage est emmené par un joli casting, avec, en tête d’affiche, Silvana Mangano. Hyper sensuelle et pourtant totalement crédible en mondine, charismatique, imposant un physique robuste et totalement féminin à la fois, elle est clairement un corps, et comme je disais, magnifiquement filmé par le réalisateur. Mais elle est aussi un jeu, et elle livre une prestation pleine d’ambiguités d’un personnage attachant et énervant tout à la fois. Une très belle femme pauvre qui cherche à s’élever par des moyens pas très honnêtes… Son jeu tout en subtilité lui permet de briller au-delà de son physique. En face, Doris Dowling s’avère tout aussi convaincante. Son jeu d’une grande finesse n’a rien à envier à celui de Mangano, et je dirai qu’elle est son excellent pendant. Là où Mangano impose une solidité physique mais une fragilité mentale, Dowling s’avère fragile physiquement (du moins de prime abord), mais gagne en solidité mentale au fil du film. Entre ces deux actrices principales, Vittorio Gassman et Raf Vallone, tous les deux convaincants dans leurs rôles, mais ils se font clairement voler la vedette par leurs comparses féminines, jusqu’au final d’ailleurs !
Pour ma part, Riz amer est un film très solide que j’ai apprécié d’abord pour son excellent casting et ensuite pour sa description remarquable d’un métier et d’une époque révolue. On a les pieds dans l’eau, on saute dans les tas de riz, même en noir et blanc on sent le côté poisseux de la boucherie. Ce film est authentique, et ça fait un bien fou ! Mais comme je disais, pour moi l’histoire de voleurs greffée dessus paraît de fait assez prétexte et n’a pas beaucoup de relief et d’originalité. Oui, elle était peut-être nécessaire, mais développer une intrigue vraiment spécifique à l’univers des mondines aurait sûrement paru moins artificiel. 4