Le Viager est une comédie grinçante, signée Pierre Tchernia, qui se montra réalisateur peu prolifique. Son film est certes un peu redondant, sûrement un peu long, et pas forcément toujours d’une grande application, mais c’est sympathique de voir une comédie française sociale incisive, et versant volontiers, dans l’humour noir.
Je crois que c’est vraiment la force de ce film, sa tonalité. Souvent amusant, le film sait aussi être tranchant, toujours avec subtilité, mais toujours de façon bien sensible. C’est alerte, la confrontation entre les personnages est plaisante, les situations sont bien vues, bref, Le Viager offre une histoire originale, peu traitée, et le fait bien, sans méchanceté excessive car l’humour est toujours là, mais en nous confrontant aussi aux sentiments et aux bassesses humaines ! A noter la bonne idée d’introduire l’arrière-plan historique dans ce métrage. C’est parfois traité un peu rapidement, mais c’est sûr, ça apporte un plus en terme de relief. Reste que la narration est parfois un peu lourde, trop raide, manquant de fluidité, et que l’usage de la voix off, qui apporte un peu plus encore ce style démonstratif n’est pas forcément d’un usage judicieux. Je crois aussi que le film aurait pu s’alléger un peu, car dans sa seconde partie il y a quelques petites longueurs.
Le film c’est aussi des numéros d’acteurs, et, en premier lieu, la confrontation Serrault-Galabru. Si le second est toujours aussi pertinent dans le registre comique, dès lors qu’on lui trouve un rôle de qualité, le premier encore une fois épate, s’emparant d’un genre de rôle qu’il adore, dans un registre qu’il affectionne : la comédie caustique. Particulièrement drôle, sa confrontation avec la famille Galipeau est réjouissante. A noter la petite présence, tardive cependant dans le film, de Claude Brasseur, dont la prestation est tout de même plus anecdotique.
Sur la forme Tchernia ne fait pas non plus des miracles. Sa mise en scène est alerte mais un peu saccadée, elle aurait parfois pu soigner davantage certains gags visuels, alors qu’elle reste un poil démonstrative (notamment dans la première partie, mais je n’en dirai pas davantage). Pour ma part le film séduit surtout par la variété de ses décors, et de ses contextes historiques, qui apporte un certain style au métrage. Un film qui en revanche ne peut pas trop s’appuyer sur la bande son.
En fait Le Viager c’est un film que Mocky aurait pu tourner, et qui ressemble assez au style de ce dernier. Une histoire pleine d’idée, grinçante, un rythme plutôt soutenu en dépit d’une petite baisse vers la fin, des numéros d’acteurs marquants avec d’ailleurs Serrault, récurent de Mocky, dans un rôle. C’est solide, mais tout de même, à la fin on se dit qu’il était temps d’arriver, car Tchernia ne s’applique pas trop dans la narration et la manière d’emballer son sujet, ce qui fait que parfois ça devient un peu pesant au spectateur. 3.5